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À Madagascar, ce «Colisée» de béton sème la discorde
information fournie par Le Figaro 26/06/2020 à 06:00

Cette arène largement inspirée de la Rome antique a été voulue par le président malgache. Située dans un quartier historique, elle suscite l’indignation des protecteurs du patrimoine.

Il a poussé à l’ombre du palais d’une reine, sur la piscine sacrée d’un roi, au sommet de la plus haute colline d’Antananarivo. Dédié à l’histoire de Madagascar, le «Colisée» du président Andry Rajoelina sème la discorde. Lorsque ce projet d’arène en béton largement inspirée de la Rome antique a été dévoilé il y a plus d’un an, personne n’y a vraiment prêté attention. Il s’agissait alors, en vue du 60e anniversaire de l’indépendance de l’ex-colonie française cette année, de bâtir une enceinte destinée à «accueillir un spectacle pour traiter l’histoire de notre pays de manière éducative, populaire et culturelle» , selon la ministre de la Culture, Lalatiana Rakotondrazafy.

Mais au fur et à mesure qu’il sortait de terre, ce bâtiment nommé «Masoandro» - soleil en malgache - a fait froncer de nombreux sourcils. Et à la veille des célébrations du 26 juin, il est devenu l’objet de toutes les critiques. À commencer par celles des descendants des souverains malgaches qui ont trôné sur le site historique du palais de la reine de Manjakamiadana, du XVIIe siècle jusqu’à l’annexion de la Grande île en 1896. «On pensait qu’il ne s’agirait que de simples décorations accessoires» , note Christian Raoelina, un des petits-fils du frère de la reine Ranavalona III. «Notre étonnement en voyant la hauteur de la construction n’en a été que plus grand , ajoute-t-il, on n’avait pas compris que ces travaux allaient apporter de grands changements dans le paysage du palais» .

Une menace pour le classement Unesco

L’association des Amis du patrimoine de Madagascar (APM) s’est elle aussi émue de la forme du «Colisée». « Il apparaît de façon évidente que, outre son incongruité, cette structure n’a rien à voir avec l’architecture initiale du site, ni avec l’histoire de Madagascar, encore moins avec sa culture» , s’est-elle indignée. La construction est d’autant plus malvenue, a ajouté l’APM, qu’elle menace le classement de la haute-ville d’Antananarivo au patrimoine mondial de l’Unesco.

Dans un courrier, l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) s’était émue en février de l’impact du projet sur «la valeur universelle exceptionnelle» de la capitale. L’opposition elle aussi a tiré à boulets rouges contre l’arène présidentielle, en dénonçant le «massacre» d’une «place sacrée» et d’un «symbole historique» du pays. Mis en cause de toutes parts, le président Rajoelina a riposté en accusant les détracteurs de son arène - il réfute le terme de «Colisée» - d’être «de mauvaise foi» .

Un emplacement «sacré»

«L’appel d’offres a été lancé des mois d’août à septembre l’année dernière et est paru dans les journaux les plus lus du pays (...) pendant toute une semaine» , a-t-il lancé fin mai à la télévision à tous les «surpris». «Les descendants des monarques à Madagascar n’ont plus aucun pouvoir» , lui a rétorqué aussi sec Christian Raoelina, «mais en tant qu’héritiers propriétaires des tombeaux royaux, nous méritions d’être consultés» . D’autant plus, insiste-t-il, que le «Colisée» a été érigé «dans un emplacement sacré» .

«Le rôle de l’Etat est de sauvegarder, de réhabiliter, d’entretenir le patrimoine du passé, mais non pas de le défigurer ou de le piétiner par de nouvelles constructions» , a renchéri l’artiste plasticien Jean Andrianaivo Ravelona. Président de l’Académie malgache, le Pr Raymond Ranjeva a proposé une concertation nationale sur le sujet. «On doit admettre que cette construction, en l’état actuel des choses, divise la nation» , a-t-il regretté.

«Est-ce qu’on veut restaurer nos fiertés nationales oui ou non?» , a plaidé Andry Rajoelina, dont l’arène doit permettre d’offrir à tous les visiteurs du palais royal des spectacles retraçant l’histoire et le quotidien des anciens souverains de la Grande île. Son projet - d’un coût estimé à 1,4 million d’euros «financé par le seul budget de l’État» , insiste le gouvernement - doit drainer 300.000 à 500 000 visiteurs vers le palais de la reine de Manjakamiadana, a-t-il assuré.

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