Cinq pays de l'Union européenne sont favorables à l'application de l'accord OCDE pour l'imposition minimum de 15 % sur les bénéfices des multinationales. La France et l'Allemagne seraient même prêtes à agir sans la Hongrie, qui bloque la directive européenne.

La France relance l'application de l'imposition des multinationales -iStock-PaulGrecaud
Un levier essentiel pour renforcer la justice fiscale
Les ministres des Finances des cinq premières économies européennes - Allemagne, Italie, Espagne, Pays-Bas et France - ont, à l'initiative de Bruno Le Maire, relancé le processus pour qu'une taxation minimale des multinationales s'applique au niveau mondial. Ces cinq puissances économiques, qui représentent 90 % du PIB de l'Europe, ont affirmé d'une même voix leur engagement pour la mise en œuvre rapide de cette imposition, dans le but de renforcer la justice fiscale et de lutter plus efficacement contre l'évasion fiscale. Ils estiment que le contexte économique fragile et l'inflation galopante justifient le fait que les grandes entreprises participent à l'effort général. La taxation s'appliquerait aux multinationales réalisant plus de 750 millions d'euros de chiffre d'affaires. Selon l'OCDE, le montant des recettes supplémentaires qui se dégageraient de cet impôt avoisinerait les 150 milliards d'euros. De plus, la mondialisation de la mesure, applicable à toutes les grandes entreprises, rendrait caduques certaines pratiques visant à détourner une part des profits dans des filiales implantées dans des paradis fiscaux.
Un blocage de l'accord par la Hongrie
Cet accord historique, conclu sous l'égide de l'OCDE, avait été approuvé en 2021 par 140 pays (dont la Hongrie) après cinq ans de débats. Il constitue le second pilier de l'accord OCDE, dont le premier, qui n'est pas encore finalisé, prévoyait l'imposition des géants du numérique sur le lieu où elles réalisent leurs bénéfices, afin de lutter contre l'évasion fiscale. Mais, pour que ce "pilier 2" puisse s'appliquer au niveau européen, un vote à l'unanimité des 27 pays membres est indispensable. Le blocage par la Pologne a fini par être levé, mais c'est la Hongrie qui a pris la relève. Après avoir donné son accord en avril 2021, elle a mis son veto en juin à cause de la guerre en Ukraine. Elle bloque donc, par son opposition, la transposition de cette mesure dans le droit européen. Le gouvernement hongrois est soupçonné d'exercer une forme de chantage pour obtenir un feu vert à son plan de relance, rejeté par Bruxelles pour cause de lutte insuffisante contre la corruption.
Les cinq pays décidés à contourner l'obstacle
Les cinq signataires semblent néanmoins déterminés à avancer sans la Hongrie. Si l'unanimité n'est pas atteinte dans les semaines qui viennent, ils affirment, dans un texte commun, être prêts à mettre en œuvre cette décision d'ici à 2023, par tous les moyens légaux possibles. Deux voies sont à l'étude. La première issue reposerait sur une coopération renforcée entre les cinq pays, qui viserait à emporter l'adhésion des 26 pays favorables à la taxation. Mais cette démarche prendra du temps, et comporte le risque d'être rejetée par les quelques pays hésitants, tels que l'Irlande, l'Estonie ou le Luxembourg. La seconde pourrait consister en une application nationale de l'accord OCDE par chaque pays. Cette solution, qui serait coordonnée, serait potentiellement plus rapide.
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