Peut-on perdre un héritage simplement en tardant à faire valoir ses droits successoraux ? information fournie par Mingzi 03/04/2025 à 08:16
Peut-on perdre l'héritage d'un parent simplement en tardant à faire valoir ses droits successoraux ? C'est le sort qu'ont connu ces héritiers, dont les terrains ont été légalement repris par une commune.
Les faits
L'affaire remonte à 1986. Cette année-là, Madame J décède, laissant derrière elle quatre enfants, dont Madame O. À son décès, elle possédait trois parcelles de terrain. Mais pendant plus de 30 ans, aucun héritier ne réclame officiellement les biens.
En 2016, la commune décide alors d'utiliser une procédure prévue par le code général de la propriété des personnes publiques : elle constate que ces parcelles sont des « biens sans maître », c'est-à-dire des biens qui, après un certain temps, peuvent être incorporés au patrimoine d'une collectivité si personne ne les revendique. L'appropriation est formalisée par un arrêté du maire en mai 2016.
Quelques années plus tard, les ayants droit de Madame O (décédée entre-temps), tentent de récupérer les biens en assignant la commune en justice. Pour eux, leur mère, héritière directe, s'était manifestée de manière suffisante avant l'expiration du délai de 30 ans, ce qui aurait dû empêcher la commune de s'approprier les parcelles. Mais la cour d'appel leur donne tort en 2023. Ils se pourvoient alors en cassation.
La décision de la Cour de cassation
La Cour de cassation confirme la décision de la cour d'appel : le pourvoi est donc rejeté. La décision s'appuie sur une règle simple, mais stricte : un bien faisant partie d'une succession ouverte depuis plus de 30 ans, sans qu'aucun héritier ne s'en soit occupé, est réputé n'avoir pas de maître. Et dans ce cas, il peut être intégré au domaine privé d'une commune.
La Cour de cassation précise qu'il faut que l'héritier manifeste sa volonté d'en réclamer la transmission successorale dans les 30 ans suivant le décès. Cela ne signifie pas forcément qu'il doive formellement accepter l'héritage, mais il doit au moins poser un acte clair montrant son intention d'hériter. Or, dans cette affaire, les juges ont estimé que Madame O n'avait pas suffisamment démontré une acceptation — même tacite — de la succession dans le délai requis. Dès lors, l'appropriation par la commune est jugée parfaitement légale.