Nantissement d’une assurance vie : lorsque les intérêts ne permettent pas de rembourser le prêt

information fournie par Mingzi 13/02/2024 à 12:00

(Crédit photo : 123RF)è

Monsieur K souscrit un montage financier consistant à placer ses liquidités sur une assurance-vie et à financer ses besoins de trésorerie par un découvert bancaire nanti par le contrat. Lorsque le découvert dépasse la valeur de son assurance vie, il assigne son conseiller et sa banque en paiement de dommages et intérêts pour manquement à leur obligation d'information, de conseil et de mise en garde.

Les faits

Monsieur K accepte le montage financier proposé par son conseiller en gestion de patrimoine. Celui-ci consiste à placer les liquidités dont il dispose dans des contrats d'assurance-vie et à financer ses besoins de trésorerie par un découvert bancaire dont le remboursement est garanti par la délégation à sa banque de ces contrats. Il souscrit donc deux contrats d'assurance-vie sur lesquels il verse une certaine somme ainsi qu'un compte assorti d'une autorisation de découvert plafonnée à 60 % de la valeur de rachat des contrats d'assurance.

Puis Monsieur K effectue d'importants retraits sur le compte. La banque le met alors en demeure de régulariser le découvert du compte, dont le plafond était dépassé en raison de la diminution de la valeur de rachat des contrats d'assurance-vie.

Soutenant que son conseiller en gestion de patrimoine et la banque avaient manqué à leur obligation d'information, de conseil et de mise en garde, Monsieur K les assigne en paiement de dommages et intérêts. Il réclame la somme de 70.000 euros en réparation de la perte de chance causée par leur manquement.

Il assure que, mieux informé sur les intérêts que pouvait générer le découvert (qui pouvaient s'avérer supérieurs au rendement des contrats d'assurance-vie), il aurait renoncé à la souscription de ce compte ou aurait opté pour le système de rachats partiels initialement proposé qui lui aurait permis de dégager des revenus trimestriels nets de 9.147 euros par trimestre.

La Cour d'appel rejette sa demande, au motif que rien ne prouve que mieux informé et conseillé, il aurait choisi de manière certaine un autre placement. Il se pourvoit alors en cassation.

La réponse de la Cour de cassation

La Cour de cassation rappelle que le préjudice issu du manquement d'un conseiller à son obligation d'information se traduit pour le client par la perte de la chance d'échapper, par une décision plus judicieuse, au risque qui s'est finalement réalisé. Or, lorsqu'il est certain que, mieux informée, la victime aurait tout de même réalisé l'investissement qui s'est révélé défavorable, le préjudice n'est alors pas réparable.

La Cour d'appel a statué que rien ne permet de prouver que, mieux informé sur les intérêts que pouvait générer le découvert en compte, Monsieur K aurait renoncé à la souscription de ce compte ou aurait opté pour un système de rachats partiels. Il aurait nécessairement été confronté à un découvert bancaire pour satisfaire ses besoins de trésorerie excédant ce qu'auraient pu lui procurer ces rachats. Or, il ne démontre pas qu'il aurait pu satisfaire ces besoins en recourant à un autre montage financier.

La Cour de cassation en déduit que la perte de chance invoquée par monsieur K n'était pas certaine. Par ces motifs, la Cour rejette le pourvoi de Monsieur K.

Source : Cour de cassation - Pourvoi n° 21-24.706 - 8 novembre 2023