Wall Street tentée de ralentir la vitesse des échanges
information fournie par Reuters 04/04/2017 à 16:00
par John McCrank NEW YORK, 4 avril (Reuters) - Après avoir cherché pendant des années à accélérer les échanges, notamment par le biais des transactions à haute fréquence, les Bourses américaines, Wall Street en tête, souhaitent désormais ralentir la cadence. Le New York Stock Exchange ICE.N , le Chicago Stock Exchange et le Nasdaq NDAQ.O attendent le verdict que doit délivrer dans les prochaines semaines le régulateur financier américain sur une technique baptisée "speed bump" (ralentisseur) qui permet un délai d'exécution dans les transactions. Si la Securities and Exchange Commission (SEC) autorise les opérateurs à opter pour les "speeds bumps", les marchés boursiers pourraient vivre une petite révolution sous la forme d'un retour en arrière. Généralisé sur les marchés financiers depuis le milieu des années 2000, le trading haute fréquence permet de passer des ordres en quelques microsecondes grâce à des algorithmes informatiques. Cette technologie a été pointée du doigt lors du "flash crash" du 6 mai 2010 à Wall Street, qui a vu l'indice Dow Jones .DJI perdre 9,2% en l'espace de 10 minutes, ce qui ne s'était jamais produit. Le trading haute fréquence a été vivement dénoncé dans un livre à succès, "Flash Boys: A Wall Street Revolt", de Michael Lewis, qui accuse les traders professionnels de se servir de cette technologie pour "doubler" à leur avantage les investisseurs traditionnels. Le livre prône notamment le recours aux "speed bumps". IEX, PIONNIER DU "SPEED BUMP" La SEC a donné son feu vert à un premier "speed bump" l'an dernier, autorisant un nouvel opérateur de marché, IEX, à lancer une plate-forme observant un délai de 350 millièmes de seconde avant l'exécution de tous les ordres d'achat ou de vente. D'abord hostiles à cette évolution, les grands opérateurs ont vite compris qu'il leur fallait repenser leur stratégie et que ces "speed bumps" pouvaient permettre de faire revenir sur les marchés des investisseurs découragés par l'usage généralisé du trading haute fréquence. "En approuvant la plate-forme d'échanges d'IEX, la SEC a ouvert le marché à un potentiel d'innovation autour de la structure des échanges, ce qui n'existait pas vraiment depuis près de 10 ans", explique la directrice générale du Nasdaq, Adena Friedman. Si la plupart des grands opérateurs américains veulent simplement s'inspirer du "speed bump" proposé par IEX, le Nasdaq propose pour sa part un nouveau type d'ordres qui permettrait aux investisseurs traditionnels de dévoiler leurs intentions aux professionnels pendant un bref délai avant d'avoir la priorité pour leur exécution. Les opérateurs attendent maintenant que la SEC dise ce qu'elle autorise et sous quelles conditions. "Quand vous avez quelque chose qui s'applique à certains et pas à d'autres, c'est discriminatoire, d'une certaine façon", a expliqué une personne proche des débats, qui a demandé à ne pas être nommée. "La question est de savoir comment l'on peut justifier une telle discrimination". (Patrick Vignal pour le service français, édité par Blandine Hénault)