Ukraine Airlines-USA et Canada jugent crédible un tir accidentel iranien
information fournie par Reuters 09/01/2020 à 21:37

    * Donald Trump dit avoir des "soupçons"
    * Les Etats-Unis penchent pour un tir de missiles sol-air
    * "Scientifiquement impossible", rétorque-t-on à Téhéran

 (Actualisé avec Justin Trudeau)
    DUBAI/KIEV/WASHINGTON, 9 janvier (Reuters) - L'avion de
ligne ukrainien qui s'est écrasé mercredi près de Téhéran, tuant
les 176 personnes à son bord, a probablement été abattu par un
ou plusieurs missiles iraniens, ont déclaré jeudi des
responsables américains et le Premier ministre canadien.
    L'Iran récuse cette thèse. 
    Les Américains disent se fonder sur des images satellite
montrant des taches de chaleur caractéristiques de deux missiles
sol-air qui auraient été tirés deux minutes après le décollage
du Boeing 737 d'Ukraine Airlines de l'aéroport Imam-Khomeini.
    Une explosion a retenti peu après à proximité de l'appareil,
précisent les responsables américains.
    Lors d'une conférence de presse à Ottawa, le chef du
gouvernement canadien, Justin Trudeau, a repris à son compte la
piste d'un tir de missile sol-air, "une possibilité très claire"
selon lui, sur la foi "d'informations de sources multiples"
provenant des alliés du Canada et de ses propres services de
renseignement.
    Selon Justin Trudeau, ce tir, s'il a bien eu lieu, a pu être
effectué de façon "involontaire".
    Le Canada, qui comptait plusieurs ressortissants dans
l'avion accidenté, demande désormais une enquête internationale
"complète" et "approfondie". 
    Donald Trump, qui s'est exprimé devant des journalistes à la
Maison blanche, a également semblé donner du crédit à cette
hypothèse, tout en restant évasif.
    "Quelqu'un a pu commettre une erreur", a-t-il déclaré,
ajoutant qu'il nourrissait des "soupçons".
    L'accident s'est produit quelques heures seulement après des
tirs de missiles de l'armée iranienne sur des bases militaires
abritant des soldats américains en Irak, des frappes menées en
représailles à l'assassinat ciblé, la semaine dernière, du
général Qassem Soleimani, l'un des personnages les plus
influents de la République islamique. 
    Selon deux sources américaines, Washington penche pour
l'hypothèse d'un tir ayant atteint le Boeing par erreur.
    A Téhéran, le responsable de l'aviation civile, Ali
Abedzadeh, a balayé ce scénario, jugeant "scientifiquement
impossible qu'un missile ait touché l'avion ukrainien", selon
des propos rapportés par l'agence de presse semi-officielle
Isna.  
    L'appareil était déjà en flammes avant de s'écraser, selon
un rapport préliminaire communiqué jeudi par l'aviation civile
iranienne, qui cite des témoins au sol et dans un autre avion
ayant survolé la zone à une haute altitude.
    L'avion, vieux de trois ans et dont le dernier contrôle
technique datait de lundi, s'est écrasé six minutes après son
décollage, près de la localité de Sabashahr, au sud-ouest de
Téhéran.
    Il a rencontré un problème technique peu après son envol de
l'aéroport international de Téhéran et a commencé à se diriger
vers un aéroport proche avant de s'écraser, selon le rapport de
l'aviation civile, qui ne précise pas la nature de l'avarie.
    
    KIEV EXAMINE QUATRE SCÉNARIOS
    Il n'y a eu aucune communication radio de la part du pilote
et l'avion a disparu des écrans radars à 8.000 pieds d'altitude
(un peu moins de 2.500 mètres).
    L'appareil transportait 146 Iraniens, 10 Afghans, 11
Ukrainiens, cinq Canadiens et quatre Suédois, selon le rapport
iranien, qui souligne cependant qu'un certain nombre d'entre eux
avaient probablement une double nationalité.
    D'après les autorités ukrainiennes, il y avait à bord 82
Iraniens, 63 Canadiens et 11 Ukrainiens.
    La liaison Téhéran-Toronto via Kiev est régulièrement
empruntée par les Canadiens d'origine iranienne se rendant en
Iran en l'absence de vols directs.
    A Kiev, le président ukrainien Volodimir Zelenski a déclaré
que le gouvernement envisageait plusieurs causes plausibles
expliquant l'accident de l'appareil. Dans une allocution
télévisée, il a invité ses compatriotes à ne pas céder aux
spéculations, théories du complot ou conclusions hâtives.
    Oleksiy Danilov, secrétaire du Conseil ukrainien de sécurité
nationale et de défense, a écrit sur Facebook que l'Ukraine
examinait quatre principales théories : tir de missile,
collision, explosion d'un moteur ou acte de terrorisme.
    Il a ajouté que les enquêteurs ukrainiens arrivés mercredi
soir en Iran souhaitaient fouiller le site de l'accident afin de
chercher d'éventuels débris d'un missile russe dont les médias
sociaux iraniens ont évoqué l'existence. 
    Une image non authentifiée circulant sur internet montre les
débris d'un missile sol-air de fabrication russe Tor-M1, du type
de ceux utilisés par l'armée iranienne. 
    Volodimir Zelenski a décrété ce jeudi jour de deuil national
et a annoncé qu'il comptait s'entretenir par téléphone avec son
homologue iranien Hassan Rohani afin de renforcer la coopération
entre Kiev et Téhéran dans l'enquête. 
    Les enquêteurs vont étudier le contenu des "boîtes noires"
de l'appareil, dont ils disposent mais qui sont toutefois
endommagées, est-il précisé dans le document.
    Les premiers éléments d'enquête ont été transmis à l'Ukraine
ainsi qu'aux Etats-Unis, à la Suède et au Canada.

 (Alexander Cornwell à Dubaï, Pavel Polityuk à Kiev, David
Ljunggren à Ottawa, Mark Hosenball, David Shepardson, Jonathan
Landay et Phil Stewart à Washington, version française Jean
Terzian, Bertrand Boucey, Marine Pennetier et Simon Carraud)