Retraites: Bayrou cherche un chemin, le PS dépose une motion de censure information fournie par AFP 24/06/2025 à 22:24
Le Premier ministre François Bayrou qui a rencontré mardi les partenaires sociaux pour tenter de surmonter l'échec du conclave sur les retraites est désormais visé par une motion de censure des députés PS.
"Vous avez pris des engagements" qui "n'ont pas été tenus", a lancé le président du groupe PS à l'Assemblée, Boris Vallaud, dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale.
Les socialistes reprochent à M. Bayrou de ne pas s'engager à présenter un texte qui permettrait de débattre de l'âge de départ à 64 ans.
"Le but du travail que je me suis fixé c'est qu'(...) on trouve ce chemin" vers "un texte qui pourrait être examiné par la représentation nationale", a répondu François Bayrou.
Juste avant ce face-à-face dans l'hémicycle, il a reçu à Matignon les trois syndicats participant au conclave (CDFT, CFTC et CFE-CGC), puis le président du Medef, Patrick Martin, et enfin le patron de la CPME, Amir Reza-Tofighi.
Le Premier ministre a décidé de lancer ces rendez-vous après l'échec lundi soir du conclave, qui est aussi un revers pour la méthode de dialogue social qu'il prônait.
"Je ne peux pas accepter sans réagir qu'on se satisfasse d'échouer si près du but", a-t-il expliqué mardi matin.
- Liste de désaccords -
Il a reçu le soutien du président Emmanuel Macron, qui depuis Oslo a "encouragé ardemment" les partenaires sociaux "à savoir aller au-delà des désaccords qui persistent et à trouver ensemble une solution qui soit bonne pour le pays".
Selon les déclarations des partenaires sociaux à leur sortie de Matignon, le Premier ministre leur a notamment demandé pendant le rendez-vous de lui adresser leurs points de blocage dans leurs discussions.
"L'idée est qu'il n'y ait pas de nouvelle séance de négociation, charge au Premier ministre de prendre acte et de décider d'ici la fin de la semaine ce qu'il fait de ce qui est aujourd'hui sur la table", a déclaré Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, à la sortie.
Du côté du Medef, son président Patrick Martin s'est dit "tout à fait d'accord pour transmettre" au Premier ministre la liste des désaccords qui demeurent, "dans l'esprit d'aboutir" à un accord, mais "sans que cela se traduise par une augmentation des cotisations des salariés ou des entreprises".
FO et la CGT, qui étaient sorties très rapidement des discussions, n'ont pas été invitées à Matignon mardi, malgré la demande de la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet.
Les partenaires sociaux n'ont pas réussi à trouver lundi soir un accord permettant d'aménager la réforme Borne pour la rendre moins impopulaire, et remettre le système des retraites à l'équilibre en 2030, alors qu'un déficit de 6,6 milliards d'euros est aujourd'hui prévu pour cette échéance.
Les partenaires sociaux, proches d'un consensus sur les mesures en faveur des femmes ayant eu des enfants, s'opposent sur la prise en compte de la pénibilité.
Le Medef refuse la proposition de la CFDT, soutenue par les deux autres syndicats, d'un système à points qui permette de comptabiliser les heures de travail pénible d'un point de vue physique (port de charge, postures physiques, vibrations mécaniques) et d'obtenir une possibilité de départ anticipé.
- Sous-indexation -
Il propose à la place d'avancer d'un an ou deux selon les cas les départs en retraite des personnes en invalidité ou reconnues inaptes au travail.
Le patron de la CPME, Amir Reza-Tofighi, a exhorté mardi soir à trouver un accord sur cette question: "il faut vraiment que ce soit autour de la pénibilité qu'on puisse trouver" une "voie de passage", a-t-il déclaré, après sa rencontre avec François Bayrou.
Les partenaires sociaux se déchirent également sur le financement des mesures qui seraient adoptées. Ils sont d'accord pour que les retraités assument une très large part du coût du retour à l'équilibre, via une sous-indexation des retraites.
Mais les syndicats reprochent au Medef de refuser toute participation des entreprises à ce retour à l'équilibre, en s'opposant par exemple à toute augmentation de cotisations sociales, qu'elles soient patronales ou salariales.
Et les deux parties sont en désaccord sur l'ampleur du resserrement à apporter au dispositif des carrières longues, le Medef souhaitant un très gros tour de vis aux dépens des salariés, quand les syndicats n'acceptent qu'une refonte plus limitée.
Le conclave était le fruit d'un compromis noué avec les socialistes pour éviter une censure du gouvernement lors du vote du budget 2025. Et le Premier ministre s'était engagé à en présenter les conclusions devant le Parlement.
La possibilité de revenir sur le départ à la retraite à 64 ans avait été vite balayée. Cette mesure phare, et impopulaire, de la réforme Borne de 2023 sera donc toujours en vigueur pour les salariés nés à partir du 1er janvier 1968.
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, patron des Républicains, a estimé mardi que "la plus grande réussite" du conclave serait que l'on confie la gestion des retraites aux partenaires sociaux.
Avant les socialistes, La France insoumise avait très vite appelé lundi soir les autres groupes de gauche à se joindre à une motion de censure contre le gouvernement.
Mais en l'absence des voix du Rassemblement national qui a prévenu qu'il ne s'y associerait pas, le gouvernement semble assuré de se maintenir. Avant d'affronter les débats budgétaires encore plus périlleux, cet été et à l'automne.