* Des conditions trop favorables à Enedis
* Une amélioration nécessaire de l'information des
consommateurs
* Déploiement conforme aux prévisions, 8 mls de compteurs
fin 2017
PARIS, 7 février (Reuters) - Enedis, filiale d'EDF EDF.PA ,
a bénéficié de conditions de rémunération trop généreuses pour
le déploiement des nouveaux compteurs d'électricité intelligents
"Linky", estime la Cour des comptes, qui appelle donc à les
revoir.
Dans son rapport annuel publié mercredi, la Cour évoque "un
dispositif coûteux pour le consommateur mais avantageux pour
Enedis", du fait des modalités définies par la Commission de
régulation de l'énergie (CRE) pour la filiale de l'électricien
français chargée de la distribution d'électricité et de la
gestion du réseau.
A raison de 130 euros par compteur, installation comprise,
le coût total du déploiement de 39 millions de compteurs
communicants d'ici à 2024 (avec une étape intermédiaire à 90% de
couverture, soit 35 millions d'appareils, fin 2021) représente
un coût de près de 5,7 milliards d'euros en euros courants.
Alors que le gouvernement avait promis au moment du
lancement de ce projet, en 2011, que le déploiement des Linky
serait gratuit pour les consommateurs, la Cour des comptes
observe que le différé tarifaire "se traduit par un surcoût pour
les usagers de 506 millions d'euros en euros courants et de 464
millions en euros constants sur la période 2014-2031".
Ce mécanisme de "différé tarifaire" correspond à une avance
faite faite par Enedis, remboursée par les consommateurs à
partir de 2021, puisque leur facture d'électricité n'augmentera
qu'à partir de la fin du déploiement, et non dès le début de
l'opération en 2014.
La Cour note également que le système de bonus-malus prévu
est trop favorable à Enedis, notamment parce que les pénalités,
qui ne s'appliqueront qu'en cas de dérives importantes, sont
plafonnées.
IMPACT LIMITÉ DES REFUS DE POSE
Même si "les objectifs de délais et de coûts, tels qu'ils
avaient été définis en 2014, devraient être atteints", la Cour
recommande à la CRE de faire évoluer le dispositif de différé
tarifaire pour en réduire le coût pour les consommateurs et de
revoir "la régulation incitative pour réduire la rémunération
maximale dont pourrait bénéficier Enedis".
Au-delà de ces aspects financiers, la Cour des comptes
déplore un "pilotage insuffisant par les pouvoirs publics".
"L'analyse bénéfices-coût au niveau de la distribution ne
peut à elle seule justifier économiquement le projet et, en
l'état actuel des travaux, le système n'apportera pas les
bénéfices annoncés en ce qui concerne la maîtrise de la demande
d'énergie", souligne la Cour.
"Les moyens mis en place pour permettre à l'usager de
connaître sa consommation détaillée, préalable à tout action de
maîtrise de la demande d'énergie, sont insatisfaisants",
déplore-t-elle.
Il incombe donc à l'Etat de faire en sorte d'améliorer
l'exploitation des fonctionnalités des compteurs et de mieux les
faire connaître aux usagers.
Une telle initiative est d'autant plus nécessaire que les
craintes des usagers - qu'elles soient d'ordre sanitaire sur
l'exposition aux champs électromagnétiques ou relèvent de la
protection des données individuelles - ont alimenté l'opposition
au projet.
Les refus individuels de pose ou des arrêtés municipaux
interdisant le déploiement de Linky, souvent médiatisés, n'ont
cependant eu qu'un "impact limité" sur le déploiement, note la
Cour.
Dans sa réponse à la Cour, le président de la CRE "regrette
que les incitations financières jugées trop élevées pour Enedis
ne soient pas mises en regard de la réussite technique et
opérationnelle du projet", avec huit millions de compteurs Linky
posés à fin 2017, soit un déploiement conforme au calendrier et
aux coûts prévus.
(Myriam Rivet, édité par Yves Clarisse)