Conflit Ukraine-Russie : point sur la situation et ses implications sur les marchés
information fournie par Amundi 18/03/2022 à 09:48

Point sur le conflit russo-ukrainien

Volatilité des marchés et des matières premières, croissance et inflation, action des banques centrales… Que retenir des implications la crise russo-ukrainienne avec Amundi ?

Alors que la guerre en Ukraine sévit depuis maintenant trois semaines, Kiev est toujours encerclée et visée par les bombardements de l'armée russe. Les pourparlers entre l'Ukraine et la Russie en vue d'un cessez-le feu se poursuivent. Le président des Etats-Unis Joe Biden a annoncé une assistance sécuritaire supplémentaire à l'Ukraine de 800 millions de dollars pour l'aider à faire face à l'invasion russe. L'Union européenne a adopté, quant à elle, un quatrième train de sanctions contre la Russie, visant surtout les oligarques du pays. Symbole des conséquences liées aux mesures de rétorsion imposées depuis le début de l'invasion en Ukraine, la Russie n'a pas, ce mercredi, remboursé 117 millions de dollars qu'elle devait à des créanciers internationaux. La Russie a été officiellement exclue du Conseil de l'Europe, institution garante de l'Etat de droit sur le continent. Trois millions de personnes ont, à ce jour, fui l'Ukraine depuis le début du conflit.

Quelles perspectives pour les marchés ?

Les marchés financiers restent particulièrement vulnérables et la volatilité demeure élevée. Depuis le début de l'année, les différentes places boursières affichent des replis très nets, notamment en Europe mais aussi, dans une moindre mesure, aux Etats-Unis : Eurostoxx 50 : -14,1% ; CAC 40 : -12,5% ; S&P 500 : -10,6% ; Nikkei 225 : -12,6% et MSCI marchés émergents : -10,5% (performances au 17 mars 2022). L'aversion au risque reste marquée dans un contexte de très forte incertitude liée à l'issue du conflit. La volatilité sur le marché chinois s'est notamment avérée très significative puisqu'après avoir récemment subi des pressions vendeuses par crainte que le secteur technologique ne soit pénalisé par des sanctions américaines en cas de soutien de la Chine à la Russie, les marchés d'actions chinois connaissent aujourd'hui une reprise importante suite à la promesse du vice-Premier ministre chinois d'adopter des politiques de soutien aux marchés financiers et à la croissance économique.

La demande pour les actifs refuges reste forte, bien qu'en repli cette semaine. Le cours de l'or s'est inscrit en retrait ces derniers jours après avoir approché des sommets historiques. Le pétrole a suivi la même tendance puisqu'après avoir bondi à 130 dollars le baril, son cours est revenu en dessous de 100 dollars. Les prix des matières premières restent globalement très élevés et alimentent les inquiétudes quant aux perspectives de croissance économique et d'inflation.

L'issue du conflit demeure encore très incertaine. Des négociations sont en cours entre la Russie et l'Ukraine et les premiers signes d'une véritable discussion semblent se dessiner. L'Empire du Milieu devrait jouer un rôle crucial : les dirigeants chinois paraissent vouloir jouer le rôle de médiateur avec la Russie et ont déjà activé des pourparlers avec les États-Unis pour promouvoir une solution diplomatique au conflit. La Chine est un allié géopolitiquement stratégique de la Russie, mais a en même temps intérêt à ce que la crise n'ait pas de répercussions négatives sur l'économie mondiale, à commencer par l'Europe, partenaire commercial plus important que la Russie pour le pays. De plus, nous pensons que les autorités chinoises ne veulent pas courir le risque de représailles américaines en termes de sanctions. Il existe donc un potentiel de désescalade de la crise, même si sa visibilité reste très incertaine. La Chine vise à devenir un partenaire fiable pour l'Occident, en particulier l'Europe, et à renforcer son influence sur la zone asiatique en faisant de plus en plus du renminbi une devise internationale.

Quels impacts sur les perspectives économiques ?

Le conflit aura un impact sur la croissance et l'inflation, notamment en raison de la hausse des prix de l'énergie et de l'alimentation. Nous avons revu à la baisse nos prévisions de croissance mondiale et relevé nos anticipations d'inflation pour 2022.
Bien qu'il soit encore difficile d'anticiper l'impact de la crise sur les fondamentaux macroéconomiques, nous pensons que l'inflation dans la zone euro restera élevée tout au long de l'année, en particulier pour l'énergie et l'alimentation, ce qui pèse à la fois sur la demande et la production. Ce contexte est cohérent avec un risque de récession temporaire, dans la fourchette basse de nos prévisions. Au total, nous avons abaissé nos perspectives sur la croissance mondiale de 0,5% (la ramenant dans une fourchette de 3,3-3,7%) sur 2022, avec des différences selon les zones : impact plus important sur l'Europe, compte tenu de sa proximité avec l'épicentre de la crise, et moindre aux États-Unis. Nous n'excluons pas la possibilité d'une récession de courte durée, ce qui est reflété dans la partie basse de nos prévisions. Dans les pays émergents, la croissance devrait s'établir dans une fourchette de 3,6 à 4,1% avec une forte disparité entre les différentes zones.

L'inflation mondiale a été révisée à la hausse sur les marchés émergents et développés (d'environ 0,5% sur 2022). Il existe toutefois de nombreuses divergences entre les pays, en fonction à la fois de leur niveau d'indépendance énergétique et de leur vulnérabilité aux effets de contagion des sanctions.

La situation actuelle met les banques centrales face à un dilemme entre la lutte contre l'inflation et le risque d'un fort ralentissement de l'économie. En Europe, la Banque centrale européenne (BCE) n'a pas changé ses plans pour lutter contre l'inflation malgré les préoccupations liées à la guerre et à l'incertitude économique qu'elle entraîne. De son côté, la Réserve fédérale (Fed, Banque centrale des Etats-Unis) a décidé, mercredi 16 mars, de remonter ses taux directeurs d'un quart de point. L'argent à court terme sera désormais prêté aux banques à un taux compris entre 0,25% et 0,5%. Elle prévoit de le porter entre 1,75% et 2% d'ici la fin de l'année, adoptant un ton volontairement offensif face à l'inflation. Les nouvelles prévisions de la Fed suggèrent qu'elle pourrait de nouveau relever ses taux lors de chacune des six réunions prévues d'ici fin décembre et que le taux des « fed funds » pourrait atteindre 2,8% d'ici fin 2023, un niveau supérieur à celui de 2,4% à partir duquel la banque centrale estime qu'il freinerait la croissance.

Un important soutien à la croissance mondiale devrait venir de la Chine. Les autorités chinoises ont confirmé que la stabilisation de la croissance était pour elles une priorité. L'assouplissement des politiques monétaires est déjà en cours, marquant une nette différence avec l'attitude des banques centrales des autres économies. L'objectif de croissance envisagé par le gouvernement pour 2022 est de 5,5% : le redémarrage de l'économie, après le relatif ralentissement de 2021, se fera progressivement et les pressions inflationnistes resteront contenues. Des risques émergent ces jours-ci, avec la résurgence de cas de Covid-19 dans le pays, les investisseurs s'inquiétant des conséquences des mesures de restriction prises notamment à Shenzhen, où sont implantées de nombreuses entreprises technologiques, sur les chaînes d'approvisionnement mondiales et, par là même, sur la croissance du pays au premier et au deuxième trimestres. Cependant, la politique monétaire devrait soutenir l'activité, mais sans excès car les autorités veulent éviter les bulles de crédit. Nous nous attendons à des politiques plus accommodantes dans le secteur crucial de l'immobilier et à moins de changement de réglementation contrairement à ce qui a été observé en 2021.

Notre opinion positive sur les matières premières se confirme et la guerre en Ukraine accentue la pression sur celles-ci en raison des craintes de rupture d'approvisionnement. Le prix du pétrole sera dépendant des décisions de l'Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) et des tensions géopolitiques en Europe de l'Est et au Moyen-Orient, étant donné le risque de pénurie de pétrole russe. L'Iran peut éventuellement atténuer ce déficit, mais sa production ne sera pas suffisante pour réellement changer la donne à court terme.

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