Karl Lagarfeld, égérie de la mode, est décédé ce mardi 19 février
* Une carrière d'une longévité exceptionnelle * Un dessinateur virtuose, homme de culture et d'humour * L'artisan du succès planétaire de Chanel par Pascale Denis PARIS, 19 février (Reuters) - Karl Lagerfeld, icône mondiale de la mode et emblématique directeur artistique de Chanel pendant 35 ans, s'est éteint mardi matin après avoir régné pendant plus de soixante ans sur le monde de la couture. Cheveux noués en catogan, chemise blanche à haut col, mitaines et lunettes noires, sa silhouette de marquis rock était devenue reconnaissable entre toutes après une carrière d'une longévité exceptionnelle. Celui de l'on surnommait le "Kaiser" ou "king Karl" était né à Hambourg en 1933 et avait fait ses débuts chez Balmain puis Patou et Chloé, avant de rejoindre la griffe italienne Fendi, en 1965, et enfin Chanel, en 1983. Grand collectionneur, passionné de photographie et de littérature, Karl Lagerfeld était un homme de culture, un bourreau de travail et un dessinateur virtuose qui aura consacré sa vie à la mode. Ce seront ses années passées chez Chanel qui resteront dans l'histoire et qui marqueront les esprits. Recruté par les frères Wertheimer - propriétaires de la marque aux deux "C" - comme option de la dernière chance pour relancer une maison en perte de vitesse face à la modernité d'un Saint Laurent, Karl Lagerfeld remplira sa mission au-delà de toutes les espérances. Imprégné de l'histoire de la griffe, le couturier parvint à moderniser l'allure Chanel tout en préservant tous ses grands emblèmes: le tailleur en tweed, les rangs de perles et les sacs en cuir matelassé. Il su rendre à Chanel son lustre tout en ayant aussi un sens aigu du marketing, maîtrisant l'art d'attirer les clientes en organisant, bien avant ses concurrents et l'ère des réseaux sociaux, de fastueux défilés à grand spectacle que nombre de ses concurrents lui copieront par la suite. THÉÂTRAL ET PUDIQUE A la fois théâtral et pudique, il s'était composé un personnage et aimait entretenir le flou sur sa vie privée, y compris sur sa date de naissance, distillant ça et là des histoires parfois contradictoires. Il dévorait la presse et les livres d'art, fuyait les mondanités, ne buvait pas d'alcool et accordait peu d'interviews. Dans les années 2000, il s'était astreint à un régime drastique qui lui avait fait perdre 40 kilos, pour pouvoir porter les costumes aux lignes étroites lancés par Hedi Slimane chez Dior. Volontiers provocateur, il avait l'humour vachard, le sens de la formule et revendiquait une liberté totale dans le travail. "Certains disent que j'ai porté préjudice au métier de couturier à cause de la cadence que j'ai imposée dans les collections (...) Eh bien ceux qui se plaignent n'ont qu'à rester chez eux, à gérer leurs petites affaires et à bricoler avec leur fin de mois difficiles", avait-il dit dans une interview en juillet 2018. Travailleur acharné, celui qui signait entre dix et vingt collections par an, se vantait aussi de savoir dessiner en trois dimensions, "ce que mes confrères ne savent pas faire". Il comptait parmi les rares créateurs à oeuvrer pour deux grandes griffes concurrentes, Chanel et Fendi. Il supervisait également les collections de mode dite "accessible" de la marque "Karl Lagerfeld", qui ne lui appartenait pas mais qui gérait aussi ses multiples contrats d'image. Karl Lagerfeld a ainsi prêté son nom et sa célèbre silhouette à des produits très éloignés du luxe - depuis les bouteilles de Coca-Cola Light qu'il adorait aux lunettes de la chaîne Optic 2000 en passant par des tenues de poupée Barbie - sans jamais ternir l'image de Chanel ou Fendi. Il avait aussi été le premier à lancer la mode des collaborations entre couturiers et enseignes de grande diffusion, signant en 2004 une collection pour H&M HMb.ST . Son anticonformiste et son goût pour la provocation l'avaient même poussé à mettre en scène sa chatte Choupette à qui il avait ouvert son propre compte Twitter. "Je suis un label vivant", disait-il, à la fois immodeste et lucide. "Mon nom est Labelfeld et pas Lagerfeld". Voir aussi : Disparition de Karl Lagerfeld, icône mondiale de la mode (Pascale Denis, édité par Jean-Michel Bélot)
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