Vannier et Spillebout, improbable duo uni contre les violences à l'école information fournie par AFP 13/05/2025 à 14:45
Une députée Renaissance sévère envers LFI et un cadre insoumis contempteur de la macronie: Violette Spillebout et Paul Vannier incarnent un duo improbable de co-rapporteurs au sein de la commission d'enquête sur les violences dans les établissements scolaires qui auditionnera mercredi François Bayrou.
"Il dit que je vais prendre ma carte chez LFI, je lui dis que c'est lui qui vient vers le centre", raconte Violette Spillebout, un sourire en coin.
L'ex-socialiste (52 ans), proche de Gérald Darmanin, a accusé par le passé le mouvement de la gauche radicale de "bafouer les valeurs de notre République".
Paul Vannier (39 ans), lui, n'a pas de mots assez durs pour la macronie, coupable selon lui d'avoir "achevé sa mue en une droite conservatrice, ouverte aux idées lepénistes".
Si des binômes Renaissance-LFI ont déjà travaillé cordialement, un sujet aussi inflammable aurait pu faire des étincelles.
Mais tous deux font état d'une véritable entente, sur le terrain comme en audition, jusqu'à prévoir une future proposition de loi commune.
"Aussi sincèrement que moi elle veut empêcher un autre Bétharram", explique à l'AFP M. Vannier.
"Il y a une réelle confiance sans naïveté", juge Mme Spillebout. "Je savais qu'il était travailleur, et aussi hyper radical".
- "Omerta" -
Fils d'un père syndicaliste FO chez EDF, et d'une mère professeure de musique à l'école élémentaire, Paul Vannier se revendique sans ambages du "mélenchonisme".
Sur le fond d'abord, le professeur agrégé de géographie, entré en politique au Parti de gauche en 2008, a ensuite rejoint LFI et contribué au programme éducation.
Sur la stratégie aussi, le co-responsable du pôle élections dans le parti s'étant forgé une réputation de rude négociateur lors des créations de la Nupes en 2022 et du Nouveau Front populaire en 2024.
"Vannier est bon. Il faut se méfier de ce personnage très intelligent et qui connaît très bien son dossier", estime un cadre macroniste.
Sur la commission d'enquête "il est sérieux, appliqué, pugnace", reconnaît le député PS Emmanuel Grégoire.
D'ex-membres LFI sont plus acerbes, jugeant l'insoumis brutal, ou l'accusant d'avoir menacé de ne pas réinvestir des députés trop bavards dans la presse, ce que nie fermement M. Vannier. "Ca n'est jamais arrivé", martèle-t-il, arguant que les décisions d'investiture sont toujours prises collégialement.
Certains macronistes l'accusent de vouloir instrumentaliser la commission d'enquête pour "faire tomber François Bayrou". "Ceux qui se hasardent à ces propos participent à un climat d'omerta que j'assume de combattre", rétorque le député, soulignant que la commission ne se cantonne pas à Bétharram.
Elle est en revanche indéniablement une occasion pour LFI : "on montre qu'on est sérieux sur le fond", observe le coordinateur du mouvement Manuel Bompard, saluant un travail "en bonne intelligence", avec Violette Spillebout.
- "Milieu de profs" -
Ingénieure en santé publique, Violette Spillebout a travaillé plus de 15 ans à la mairie de Lille, auprès de Pierre Mauroy puis de Martine Aubry, qu'elle quitte sur de "profond désaccords" en 2013.
Passée par plusieurs postes de direction à la SNCF, elle poursuit sa carrière politique en macronie, notamment à l'Assemblée en 2022 puis 2024. Fille d'un professeur de l'Institut supérieur d'Agronomie de Lille et d'une professeure de français, elle a notamment travaillé sur le statut de l'élu, la presse ou l'éducation aux médias.
"J'ai été élevée dans un milieu de profs. Quand j'étais adolescente je disais toujours : +jamais je ne serai prof+, mais au final j'ai toujours été attirée par ces sujets", rembobine la députée, un temps pressenti au ministère de l'Education.
"C'est quelqu’un de carré, de solide", salue une ministre macroniste. "Elle parle beaucoup, elle est frustrée de n'avoir pas pu entrer au gouvernement", grince un cadre du camp gouvernemental.
L'élue explique s'être intéressée aux violences à l'école après une rencontre en circonscription.
"Un monsieur m'a confié qu'il était l'une des victimes du village de Riaumont (communauté catholique traditionaliste au coeur de plusieurs enquêtes) et qu'il avait réussi à s'enfuir. J'ai donc commencé à m'intéresser au sujet", explique-t-elle.
Et celle qui tentera à nouveau de prendre la mairie de Lille en 2026 de défendre les retours du terrain : "dans ma circonscription (la commission d'enquête) est l'une des premières choses dont les gens me parlent. Ils disent +bravo, vous avez réussi à mettre vos différences de côté pour un sujet aussi important+".