Un accord de paix avec l'Ukraine est loin d'être acquis, concèdent des conseillers de Trump information fournie par Reuters 15/01/2025 à 11:17
par Gram Slattery
En dépit des promesses de campagne de Donald Trump, qui retrouvera lundi la Maison blanche, les conseillers du président-élu américain admettent désormais que la guerre en Ukraine durera encore plusieurs mois, voire davantage.
Durant sa campagne, l'homme d'affaires assurait qu'il mettrait fin "dès le premier jour" au conflit qui oppose Kyiv à Moscou. Deux de ses conseillers admettent aujourd'hui qu'il s'agissait là de rodomontades de campagne dont il s'est toujours montré friand et que Donald Trump n'avait sans doute pas apprécié la situation dans sa globalité.
Ces assertions font écho aux remarques de l'émissaire désigné par Donald Trump pour la Russie et l'Ukraine, le général de corps d'armée à la retraite Keith Kellogg, qui déclarait la semaine dernière à Fox News qu'il aimerait avoir une "solution" à la guerre dans les 100 jours, bien au-delà du calendrier initial du président-élu.
Pour John Herbst, ancien ambassadeur des États-Unis en Ukraine, qui travaille désormais au sein du groupe de réflexion Atlantic Council à Washington, la centaine de jours avancée par Keith Kellogg est elle-même bien trop optimiste.
"Pour que cela fonctionne, Trump doit persuader (le président russe Vladimir) Poutine que son intransigeance est nuisible", a expliqué John Herbst.
Donald Trump répétait pourtant à longueur de meetings qu'un accord entre la Russie et l'Ukraine était possible au premier jour de son mandat, voire avant.
Fin octobre, toutefois, alors que la campagne électorale touchait à sa fin, il a opéré un léger glissement sémantique s'engageant alors à mettre fin "très rapidement" à la guerre.
Depuis le 5 novembre et sa victoire face à la vice-présidente Kamala Harris, Donald Trump ne promet plus que de "résoudre le conflit", jetant aux orties l'ébauche de calendrier qu'il avait esquissée tout en admettant qu'il serait plus simple d'obtenir un cessez-le-feu à Gaza qu'en Ukraine.
"Je pense que la situation entre la Russie et l'Ukraine va se détériorer", a-t-il observé, en répondant à une question sur le conflit dans la bande de Gaza. "Je pense que c'est plus difficile."
De Moscou arrivent parallèlement des signaux contradictoires sur l'hypothèse d'un accord de paix. On y salue l'idée de pourparlers directs avec Donald Trump tout en écartant les pistes avancées par les conseillers du président-élu, jugées irréalistes.
"AUCUN INTÉRÊT"
Quant au Kremlin, il n'a jamais commenté le calendrier actualisé de l'équipe Trump. Les représentants de la future administration Trump et de l'ambassade d'Ukraine à Washington n'ont pas répondu aux demandes de commentaires formulées par Reuters.
Le pouvoir russe est d'ailleurs d'autant moins pressé de s'asseoir à la table des négociations que son armée progresse inexorablement en territoire ukrainien. De nombreux analystes soulignent d'ailleurs que Vladimir Poutine a davantage intérêt à amplifier les gains territoriaux malgré leur coût humain et matériel élevé qu'à accélérer l'organisation de pourparlers.
John Herbst a sur ce point souligné les propos récemment tenus par Vassili Nebenzia, l'ambassadeur de la Russie à l'Onu, selon lequel les plans de paix évoqués par les conseillers de Donald Trump ne présentaient "aucun intérêt".
Si les contours exacts d'un plan de Donald Trump pour la paix restent flous, ses conseillers s'accordent pour dire qu'il devra exclure toute adhésion de l'Ukraine à l'Otan à court ou moyen terme et instaurer un gel des lignes de front.
La plupart d'entre eux sont également favorables à ce que soit octroyée à l'Ukraine une garantie matérielle de sécurité, par exemple en créant une zone démilitarisée placée sous la surveillance de soldats européens.
Jusqu'à présent, les propositions de Donald Trump et de ses conseillers pour l'Ukraine se sont heurtées au désintérêt poli du Kremlin, rappelant au président-élu qu'il aura bien du mal à mettre ses promesses de paix à exécution.
(Reportage Gram Slattery; avec Jonathan Landay à Washington et Tom Balmforth à Kyiv, version française Nicolas Delame)