Surpopulation carcérale: un rapport commandé par la Chancellerie demande une "réduction de peine exceptionnelle" générale information fournie par AFP 10/05/2025 à 16:36
Une "urgence" qui s'apparente à celle d'une crise sanitaire: face à la surpopulation carcérale hors de contrôle, une mission d'urgence commandée par le ministère de la Justice recommande une "réduction de peine exceptionnelle" générale pour "tous" les détenus, sauf exceptions.
Le rapport, consulté samedi par l'AFP, avait été commandé par l'ex-ministre de la Justice Didier Migaud en novembre à des professionnels du secteur (magistrats, directeur de prison, avocate). Il a été rendu au moins de mars à son successeur, Gérald Darmanin.
"La surpopulation doit désormais être appréhendée pour ce qu'elle représente effectivement: un état d'urgence", écrivent les auteurs, alors que les chiffres battent chaque mois de nouveaux records (82.921 détenus au 1er avril pour 62.358 places, soit une densité carcérale globale de 133%).
Ils proposent que le législateur détermine "en urgence" une "réduction de peine exceptionnelle" s'appliquant à tous les détenus condamnés et purgeant une peine d'emprisonnement en détention, "sous réserve des exclusions à déterminer par le Parlement".
Ils recommandent de s'inspirer de la mesure prise pendant le confinement contre le Covid du printemps 2020, qui avait permis de repasser pour la première fois en 20 ans sous la barre des 100% d'occupation dans les prisons.
"Dans un souci d'acceptabilité", il faudra notamment fixer un quantum de peine au delà duquel le mécanisme ne s'appliquerait pas (pendant le Covid, les condamnés pour violences conjugales, crimes, terrorisme n'y avaient pas le droit), ainsi que le quantum de la réduction de peine (deux mois à l'époque).
Pour éviter que les effets s'estompent, comme cela avait été le cas après la pandémie, il faudra que ce mécanisme puisse être "reproduit" dès que le seuil de 100% du taux d'occupation national est à nouveau dépassé, estiment-ils.
L'entourage de Gérald Darmanin a fait savoir samedi après-midi à l'AFP que le garde des Sceaux n'était "pas du tout favorable" à cette proposition.
Un tel mécanisme de régulation est pourtant réclamé par une majorité des acteurs concernés depuis des années.
"La très grande réserve des représentants politiques" à s'en saisir s'explique selon les auteurs par le fait que "la justice française continue d'être très largement considérée comme laxiste par l'opinion publique".
Et ce, en dépit du fait les chiffes montrent que la réponse pénale "n'a jamais été aussi forte, que la durée des peines d'emprisonnement s'allonge", soulignent-ils.
La mission était composée du premier président de la cour d'appel de Versailles, Jean-François Beynel, de la procureure générale de la cour d'appel de Besançon, Marie-Christine Tarrare, du président du tribunal de Bobigny, Peimane Ghaleh-Marzban, de la procureure de Nîmes, Cécile Gensac, du directeur de la prison parisienne de la Santé, Bruno Clément-Petremann, et de l'avocate Clotilde Lepetit.