Ouverture des débats sur la fin de vie dans l'hémicycle de l'Assemblée
information fournie par AFP 12/05/2025 à 20:07

La question de la fin de vie fait son retour dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, avec en perspective la création d'un "droit à l'aide à mourir" que l'exécutif veut "très encadré" ( AFP / JULIEN DE ROSA )

La question de la fin de vie, comprenant notamment la création d'un "droit à l'aide à mourir", a fait son retour dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale lundi, de nombreux députés formulant le vœux de débats dignes et apaisés, permettant d'aboutir à un texte d'équilibre sur un sujet intime.

La présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a promis en ouvrant les débats de veiller à ce qu'ils restent "les plus respectueux possibles".

Les députés débattront deux semaines durant, week-end compris si besoin, de deux propositions de loi, portant l'une sur les soins palliatifs, et l'autre sur l'aide à mourir. Un vote solennel pour chacune est prévu le 27 mai.

"Oui, il y a encore pire que la mort, quand la vie n'est devenue qu'une inexorable agonie", a déclaré le rapporteur du deuxième texte Olivier Falorni (groupe MoDem), défendant la nécessité d'une aide à mourir comme "ultime recours".

Présageant de débats poignants, certains députés ont partagé leur expérience personnelle. "Comme beaucoup d'entre vous, j'ai connu dans ma propre famille la dégradation irréversible, le maintien en vie sans consentement, dans la douleur", a confié à la tribune la député insoumise Karen Erodi.

Consensuelle, la première proposition de loi prévoit notamment la création d'un "droit opposable" aux soins palliatifs, alors que selon un rapport de la Cour des comptes de juillet 2023, seule la moitié des besoins était pourvue.

Plus clivante, la seconde a été approuvée par 28 députés contre 15 en commission. En séance, tous les groupes devraient laisser une liberté de vote à leurs membres.

Les élus devront d'abord examiner plus de 3.000 amendements, dont beaucoup venus de l'UDR, le groupe d'Eric Ciotti allié du RN. Si LFI a dénoncé une tentative d'"obstruction" de l'extrême droite, Mme Braun-Pivet a réfuté le terme, jugeant que l'ordre de grandeur était le même lors des débats en 2024.

- "Moindre mal" -

Après s'être engagé en 2022 à confier une réflexion sur le sujet à une convention citoyenne, Emmanuel Macron avait dévoilé en mars 2024 les grandes lignes d'un projet de loi, dont l'examen avait cependant été interrompu par la dissolution.

Soumis à une forte pression des députés, le Premier ministre François Bayrou a remis l'ouvrage sur le métier, en scindant le projet de loi en deux, de manière à laisser la liberté aux députés de voter pour un texte mais pas pour l'autre.

Lundi dernier, Emmanuel Macron a réaffirmé son engagement en faveur de cette évolution sociétale, estimant que le débat ne pouvait "être réduit" à pour ou contre la vie, mais devait poser la question du "moindre mal".

Le Premier ministre François Bayrou quitte le Palais de l'Elysée, à Paris, le 7 mai 2025 ( AFP / Ludovic MARIN )

Le gouvernement est cependant divisé sur la question, et le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (LR) en est un farouche opposant.

Si elle transcende les clivages politiques, la création d'une aide à mourir, autre nom du suicide assisté et de l'euthanasie, est combattue par une large partie de la droite et de l'extrême droite.

"L'Etat peut-il être mêlé à la mort d'un tiers, y compris par la simple autorisation d'un dispositif ? Personnellement je ne le crois pas. L'impossibilité de donner la mort c'est une principe absolu", a déclaré le député LR Philippe Juvin, médecin de profession, s'inquiétant que le texte "ouvre l'euthanasie à des personnes qui ont potentiellement plusieurs années à vivre".

"Cette loi autorisera le recours au droit à mourir sans perdre ce caractère d'exception et sans l'encourager", a au contraire estimé la députée socialiste Océane Godard.

- "Cadre clair" -

La ministre de la Santé Catherine Vautrin a appelé dans l'hémicycle à définir, pour l'aide à mourir, "un cadre clair avec des principes non négociables et des lignes à ne pas franchir".

"C'est là l'honneur du Parlement que de s'emparer des sujets les plus graves, les plus bouleversants et de trouver le point d'équilibre", a-t-elle ajouté.

La question des critères ouvrant l'accès à ce nouveau droit sera particulièrement débattue, ainsi que celles des "garde-fous" encadrant la procédure, de la collégialité de la décision d'autorisation, ou encore de la priorité donnée ou non à l'auto-administration de la substance létale.

La ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et de la Famille, Catherine Vautrin à la sortie de l'Elysée, le 19 mars 2025 à Paris ( AFP / Ludovic MARIN )

Le texte de M. Falorni prévoit désormais que le patient soit "atteint d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale".

La Haute Autorité de Santé a défini mardi dans un avis la "phase avancée" comme "l'entrée dans un processus irréversible marqué par l'aggravation de l'état de santé qui affecte la qualité de vie". Une définition que le gouvernement entend reprendre dans un amendement.