La femme qui a dénoncé Abaaoud s'estime oubliée par l'Etat

information fournie par Reuters 04/02/2016 à 12:08

LA FEMME QUI A DÉNONCÉ ABAAOUD ESTIME N’ÊTRE PAS ASSEZ AIDÉE ET PROTÉGÉE

PARIS (Reuters) - Répétition. Bien lire que Bernard Cazeneuve s'exprimait sur Europe 1.

La jeune femme qui a dénoncé Abdelhamid Abaaoud, le chef opérationnel présumé des attaques du 13 novembre, et a permis d'éviter de nouveaux attentats, affirme ne pas se sentir suffisamment aidée et protégée par l'Etat.

Ce "témoin protégé", qui s'est confié à la radio RMC, confirme le témoignage qu'elle avait fait aux enquêteurs sur sa rencontre avec le djihadiste et dont des extraits avaient été publiés fin novembre par Valeurs actuelles.

La jeune femme, qui était une amie de longue date d'Hasna Aït Boulahcen, la cousine d'Abdelhamid Abaaoud, morte comme le djihadiste lors de l'assaut de la police à Saint-Denis, raconte avoir été présente au moment de leur rencontre.

Rebaptisée "Sonia" par la radio, elle dit vivre très mal la précarité qu'impose sa situation, avec notamment de fréquents changements d'adresse et l'impossibilité de contacter ses proches, et réclame un dédommagement financier et moral.

"Moi ce que je leur demande, c'est de prendre en compte tous les désagréments qu'ils m'ont causé. Toutes les dépenses que j'ai effectuées. On nous a parlé de soutien psychologique, jusqu'à l'heure d'aujourd'hui, j'ai pas vu de psychologue", explique-t-elle.

Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a réfuté que l'Etat ait "oublié" celle qui a joué un rôle fondamental dans la traque d'Abdelhamid Abaaoud.

"J'estime que nous faisons ce qu'il faut dans un contexte extrêmement compliqué compte tenu du sujet et nous le faisons de façon extrêmement responsable", a-t-il dit sur Europe 1.

"Je pense que tous ceux qui diffusent des interviews et qui font du bruit sur ce sujet-là plutôt que de traiter discrètement cette question comme nous nous employons à le faire lui font prendre un risque", a-t-il ajouté.

90 DJIHADISTES AVEC ABAAOUD ?

"Sonia" avait téléphoné à la police après avoir entendu Abdelhamid Abaaoud se vanter d'avoir participé au commando qui a mitraillé des terrasses à Paris et annoncé son intention de commettre d'autres attentats, notamment à la Défense.

"Il est fier de lui, on dirait qu’il n’a peur de personne, que c’est un surhomme. Il raconte ça comme s’il racontait qu’il est parti faire les courses et qu’il avait trouvé un baril de lessive en promotion", raconte-t-elle.

Elle confirme que le coordinateur présumé des attentats a assuré être rentré en Europe au milieu de réfugiés syriens avec des dizaines de djihadistes irakiens, français, allemands et britanniques. "Il me dit qu’ils sont rentrés à 90, et qu’ils sont un peu partout en Ile-de-France", confirme-t-elle.

Dans son témoignage à la police, "Sonia" expliquait qu'Abdelhamid Abaaoud se serait vanté, le dimanche 15 novembre, d'être sur le sol français depuis "deux mois".

Moquant François Hollande, il aurait dit avoir profité du flux de réfugiés pour rejoindre l'Europe. Et d'ajouter : "La France, zéro."

Le djihadiste aurait aussi prévenu que d'autres attentats étaient en préparation "pour les fêtes", "qu'ils feraient pire dans les quartiers proches des juifs, et qu'ils feraient diversion dans les transports et les écoles".

(Gérard Bon, avec Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)