Crise du logement : transformer les bureaux en habitations, une solution qui paraît évidente mais qui reste difficile à mettre en œuvre information fournie par Boursorama avec Media Services 15/05/2025 à 11:51
Seuls "15% à 20% des immeubles de bureaux vides seraient transformables en logements", selon un étude, ce genre de projet étant confrontés à des problèmes de rentabilité ou de normes.
Un coût plus élevé que le neuf, une architecture inadaptée ou encore des lourdeurs administratives... Les transformations des immeubles de bureaux en habitations, qui semblent la solution évidente à la crise du logement, se heurtent pourtant à des obstacles qui les rendent en réalité très complexes et difficilement rentables. Des freins que le gouvernement compte faire tomber.
Quartier d'immeubles de bureaux de Rueil 2000, en région parisienne : des façades poussiéreuses, des halls fantomatiques, la végétation qui commence à se frayer un chemin au milieu des marches d'accès aux portes tournantes immobiles. À deux pas, l'entreprise immobilière Novaxia, spécialisée dans le recyclage urbain, a démoli un immeuble des années 1990, vacant depuis au moins deux ans. Vétuste et très énergivore, le bâtiment était "inlouable" et trop complexe à transformer sans démolition, selon Joseph de Loÿe, qui supervise sa reconstruction en résidence hôtelière.
La ville de Rueil-Malmaison connaît une vacance de ses immeubles de bureaux qui dépasse les 20%, bien au-dessus des 10,5% de bureaux vides en Ile-de-France, calculés par le groupement Immostat. Dans le même temps, une annonce de logement à louer dans les Hauts-de-Seine attire en moyenne 25 candidats, selon l'agence immobilière numérique Manda, et la tension locative est tout aussi forte ailleurs en région parisienne.
C'est ce constat "d'une vacance croissante des bureaux et d'une demande de logements toujours plus forte" qui a amené la ministre chargée du Logement Valérie Létard à lancer en mars un plan de transformation des bureaux vacants, qui pourraient représenter "des dizaines de milliers de logements potentiels".
À Lyon, Icade, filiale immobilière de la Caisse des dépôts et des consignations, a commencé à transformer une tour de 15 étages, où se trouvait l'ancien siège du groupe nucléaire Areva-Framatome, en 100 appartements, dont 45% de logements sociaux. "La tour se prêtait à un changement d'usage", explique à l' AFP Eric Gibeaux, directeur régional de la promotion résidentielle à Lyon : une dimension pas trop large, centrée autour d'un noyau porteur qui permet de facilement casser tous les autres murs et recréer des appartements, un prix au m2 élevé dans le quartier de la gare Part-Dieu pour compenser les coûts de travaux et une municipalité facilitatrice.
30% plus cher
"La réhabilitation coûte 30% plus cher que de construire un bâtiment neuf . Il y a beaucoup de contraintes à prendre en compte et c'est compliqué de trouver un équilibre économique sur ce type de bâtiment", déplore-t-il. Réhabiliter du bâti existant a néanmoins l'avantage d'économiser du béton et donc de réduire considérablement les émissions de carbone, ce qui en fait l'option à privilégier pour recycler les immeubles vides.
"Impossible cependant de muter tous les bureaux vides en logement", prévient Eric Gibeaux, notamment lorsque le bâtiment est trop profond, ce qui priverait certaines pièces de fenêtre ou de lumière suffisante. Selon une étude de l'Observatoire régional de l'immobilier d'entreprise en Île-de-France (ORIE), qui s'est basée sur la rentabilité économique et la différence de prix au m2 entre le bureau, souvent plus cher, et le logement, seuls "15% à 20% des immeubles de bureaux vides seraient transformables en logements" , rappelle Joachim Azan, à la tête de Novaxia et président de l'ORIE.
"La transformation de bureaux en logements peine à prendre de l'ampleur et il faut accélérer", avait souligné en mars Nadia Bouyer, directrice générale d'Action Logement, chargée par le gouvernement d'un groupe de travail, avec Xavier Lépine, président de l'Institut de l'épargne immobilière et foncière (IEIF), sur le financement de la transformation de bureaux en logements.
Parmi les pistes pour trouver un équilibre économique : travailler sur les règles qui allongent les délais de réalisation des opérations, sur les financements, sur les prix des actifs et sur la fiscalité. Deux textes législatifs sont aussi sur la table : une proposition de loi sur la simplification des règles d'urbanisme qui sera étudiée jeudi et une autre spécifique à la transformation de bureaux en logements qui sera discutée en commission mixte paritaire le 23 mai.