
Le président américain Donald Trump annonce des droits de douane réciproques à la Maison Blanche, à Washington, aux Etats-Unis, le 2 avril 2025 ( AFP / Brendan SMIALOWSKI )
Le président américain Donald Trump peut se réjouir d'une victoire juridique temporaire sur les droits de douane qu'il avait imposés ces derniers mois, tandis que les réactions sont mitigées vendredi sur les marchés financiers.
Le tribunal de commerce international des Etats-Unis (ITC) a estimé que M. Trump avait outrepassé ses pouvoirs en imposant des surtaxes non ciblées, alors qu'il s'agit d'une prérogative du Congrès.
Mais moins de 24 heures plus tard, une Cour d'appel a suspendu la décision de première instance, le temps de se prononcer sur le fond.
Saluant la dernière tournure des escarmouches juridiques au sujet de ses politiques commerciales, Trump a attaqué le tribunal de commerce de Manhattan, le qualifiant d'"horrible" et disant que son blocus devrait être "rapidement et résolument" inversé pour de bon.
Les bourses asiatiques ont chuté vendredi, à revers de la hausse sur les marchés mondiaux la veille, les querelles judiciaires sur les droits de douane ayant à nouveau attisé les incertitudes.
En Europe, Paris, Londres et Francfort étaient toutes dans le vert, alors que l'UE s'est dite "pleinement investie" pour parvenir à un accord avec les États-Unis.
Trouver une solution "reste une priorité absolue de l'UE. Nous restons en contact permanent" avec les Etats-Unis, a souligné sur X le commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic, qui a échangé par téléphone jeudi avec le secrétaire américain au Commerce, Howard Lutnick.
Selon une source européenne, de nouvelles discussions pourraient avoir lieu mardi ou mercredi, en marge d'une réunion ministérielle à Paris de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques, qui regroupe essentiellement des pays occidentaux).
A ce stade, l'exécutif européen n'a pas fait de commentaire sur les rebondissements judiciaires autour des taxes imposées par Donald Trump.
Concernant la Chine, Donald Trump l'a accusée vendredi sur son réseau social Truth de ne pas avoir respecté les conditions de l'accord de détente négocié il y a deux semaines.
le secrétaire américain au Trésor Scott Bessent avait estimé jeudi que les négociations commerciales bilatérales étaient "un peu dans l'impasse" et a suggéré que le président américain et son homologue chinois pourraient y prendre part.
Les deux puissances mondiales sont convenues en mai de suspendre pendant 90 jours les droits de douane qu'elles s'imposaient mutuellement, une désescalade surprise en pleine guerre commerciale obtenue au terme de pourparlers à Genève.
Interrogé vendredi sur les propos de M.Bessent, Lin Jian, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a indiqué lors d'un point de presse habituel que la Chine "a déjà clairement exprimé sa position sur les droits de douane à de nombreuses reprises".
A Washington, un autre tribunal avait estimé que les surtaxes visant le Canada, le Mexique et la Chine étaient "illégales" et ne pouvaient être collectées, assortissant sa décision d'un sursis le temps d'un éventuel appel.
La porte-parole de la Maison-Blanche, Karoline Leavitt, a déclaré aux journalistes que les juges avaient "fait un usage grossier de leur pouvoir judiciaire pour usurper l’autorité du président Trump".
Mme Leavitt a déclaré que la Cour suprême "doit mettre fin" à la contestation tarifaire, tout en soulignant que Trump avait d’autres moyens légaux pour imposer des prélèvements.
Kevin Hassett, directeur du National Economic Council, a déclaré à la télévision Fox Business que les "problèmes" provoqués par les décisions des "juges activistes" n’affecteraient pas les pourparlers avec les partenaires commerciaux, ajoutant que trois accords étaient sur le point d’être conclus.
Le conseiller commercial de Trump, Peter Navarro, a déclaré aux journalistes que l'administration avait reçu plus tôt "beaucoup d'appels téléphoniques de pays" qui ont dit qu'ils continueraient à "négocier de bonne foi", sans identifier ces pays.
Si la justice américaine a annulé les droits de douane généraux, ainsi que d’autres que Trump a imposés au Canada, au Mexique et à la Chine séparément en utilisant des pouvoirs d’urgence, elle a laissé intacts ceux de 25% sur les automobiles, l’acier et l’aluminium importés.
- "Pouvoir présidentiel" -
Conscient que son répit n'est que temporaire, le président américain a lancé un réquisitoire jeudi soir sur sa plateforme Truth Social et dit espérer que la Cour suprême revienne "rapidement et clairement" sur cette décision.
Selon ce jugement, s'est-il ému, "je devrais obtenir l'aval du Congrès pour ces droits de douane. En d'autres termes, des centaines de politiciens devraient siéger à Washington pendant des semaines, voire des mois pour décider ce que nous devons faire payer aux pays qui nous traitent injustement".
"Si elle était maintenue, cette décision détruirait complètement le pouvoir présidentiel - la présidence ne serait plus jamais la même!", a-t-il encore déploré.

Des cargos et conteneurs au port de Ningbo-Zhoushan à Ningbo, dans la province du Zhejiang, en Chine, le 28 mai 2025 ( AFP / Hector RETAMAL )
Donald Trump s'est aussi agacé de voir la décision de première instance accueillie avec soulagement en dehors des Etats-Unis.
Après la décision de l'ITC, la Chine avait pressé Washington d'"annuler totalement les droits de douane unilatéraux injustifiés", par la voix d'une porte-parole du ministère du Commerce.
Le Premier ministre canadien Mark Carney avait lui salué la suspension de ce qu'il considère être des droits de douane "illégaux et injustifiés".
Mais, avait-il ajouté, "nous estimons que notre relation commerciale avec les Etats-Unis est toujours profondément menacée" par les droits de douane non couverts par les récentes décisions de justice - sur l'acier et l'aluminium ainsi que le secteur automobile.
- "Inconstitutionnelle" -
Dans le détail, les juges de première instance considéraient que le président ne pouvait invoquer la loi d'urgence économique de 1977 (IEEPA) pour instituer par décret "une surtaxe illimitée sur les produits provenant de quasiment tous les pays", selon la décision que les journalistes de l'AFP ont pu consulter.
Pour ces magistrats, les décrets adoptés "outrepassent les pouvoirs accordés au président", ce texte lui permettant seulement "de prendre les sanctions économiques nécessaires en cas d'urgence pour combattre une menace +extraordinaire et inhabituelle+".
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