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Un conseiller syndical qui abuse de ses fonctions, peut être durement condamné
information fournie par Le Figaro 07/02/2021 à 07:00

Un syndic de copropriété et la présidente d’un conseil syndical viennent d’être condamnés à verser solidairement 158.000 euros à des copropriétaires lésés par leurs agissements.

Si la règle générale veut que le conseil syndical, organe dépourvu de personnalité juridique, ne puisse pas être attaqué en justice, ce n’est pas forcément le cas de ses membres à titres individuel. Me Jean-Philippe Mariani, avocat, et Bruno Lehnisch, cadre juridique, qui alimentent très régulièrement un blog consacré au droit de la copropriété, ont ainsi repéré cette décision toute récente des juges de Nanterre (datée du 1er février).

Ces derniers ont condamné très sévèrement une présidente de conseil syndical et le syndic d’un immeuble de Boulogne-Billancourt à verser solidairement 158.000 euros (la moitié chacun) à un couple de copropriétaires en litige avec eux. La somme se répartit entre 145.000 euros en réparation de la perte de valeur du bien immobilier, 8000 euros de préjudice moral et 5000 euros de frais de justice.

Les juges ont estimé dans cette affaire que la présidente du conseil syndical avait manifestement agi dans l’intention de nuire à ses voisins et avait manipulé l’assemblée générale. En l’espèce, il s’agissait d’une histoire tristement courante de jalousie entre voisins et d’abus de pouvoir du conseil syndical pour régler cette affaire personnelle. La présidente du conseil syndical avait préparé une résolution permettant au syndic d’agir en justice pour ordonner la démolition d’une véranda installée au 11e étage de la copropriété, sur une terrasse. Celle-ci aurait été, selon elle, construite en toute illégalité. Or cette construction avait été autorisée à l’unanimité par la copropriété 20 ans plus tôt, à un moment où l’actuelle présidente du conseil syndical était déjà membre de cette instance et avait approuvé cette construction.

Quasi-immunité

Les juges n’ont pas été dupes, comme le relèvent dans leur jugement MM Mariani et Lehnisch: «L’oubli allégué par Madame Y de l’existence de cette autorisation, justifié selon cette dernière par l’écoulement d’un délai de plus de vingt ans apparaît pourtant comme étant sélectif, pour porter seulement sur l’autorisation, mais pas sur l’existence elle-même de la véranda.» Le syndic, de son côté, s’est montré coupable de gérer la procédure de démolition sans s’être assuré dans les archives de la copropriété que la construction de cette véranda avait été autorisée.

La juridiction des Hauts-de-Seine retient finalement que «la démarche fautive de la Présidente du Conseil syndical consistant à demander au syndic d’inscrire une résolution à l’ordre du jour de l’assemblée générale du 01/12/2013, portant habilitation de ce dernier à agir en justice pour remettre en cause un droit acquis de ces derniers, ne s’inscrit pas dans la mission habituelle d’un membre du conseil syndical, mais apparaît par sa gravité, détachable de sa mission habituelle, engageant pleinement sa responsabilité» (TJ de Nanterre, 1er févr. 2021, n° 17/06746).

La responsabilité d’un membre du conseil syndical ne peut en effet être engagée que s’il a outrepassé ses fonctions. La règle générale, pour ce précieux travail bénévole effectué très majoritairement dans l’intérêt collectif de la copropriété, consiste plutôt à garantir une quasi-immunité aux membres du conseil syndical. C’est ce que rappelle le ministère de la Justice, le 27 août 2020, en réponse à une question posée par le sénateur Yves Détraigne, précisant que cette quasi-immunité vaut pour « les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions »: à savoir assister le syndic de la copropriété, contrôler sa gestion et conseiller le syndicat sur toutes questions, pour lesquelles il est consulté ou dont il se saisit lui-même. Ainsi, une négligence dans le contrôle des comptes ou un conseil peu avisé, n’engage pas véritablement sa responsabilité.

Indemnisation des assurances

Il n’en est pas de même en revanche si les conseillers syndicaux agissent de mauvaise foi ou commettent une faute suffisamment grave (comme une collusion frauduleuse avec le syndic). Dans ces cas, il y a déjà eu des condamnations, plus légères, par le passé, comme ce conseiller syndical condamné par la Cour d’appel de Poitiers en 2007 (CA Poitiers, 3e ch. civ., 17 janv. 2007, n° 06/01197) à 3800 euros de dommages et intérêts pour des propos diffamatoires contre le gardien de la résidence. Ou encore cet autre président de conseil syndical condamné solidairement avec son syndic (CA Nancy, 17 nov. 2015, n° 15/02361) à 4000 euros de dommages et intérêts pour avoir poursuivi un «intérêt strictement personnel» .

Me Jean-Philippe Mariani et Bruno Lehnisch relèvent par ailleurs que les conseillers syndicaux condamnés ne peuvent probablement pas faire jouer l’assurance «responsabilité civile» de la copropriété pour régler les dommages et intérêts. En effet, les compagnies d’assurances excluent généralement les agissements détachables des missions légales du conseil syndical.

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