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Lorsqu'un mariage in extremis bouleverse l'équilibre d'une succession, les tensions familiales s'exacerbent. La fille du défunt, se disant légataire universelle d'un testament mystérieusement disparu, affronte en justice la nouvelle épouse pour faire valoir ses droits sur l'héritage.
Les faits
Monsieur D est décédé après un mariage in extremis avec Madame J. Peu après, cette dernière est informée par le notaire chargé de la succession que le testament olographe de son défunt époux, déposé chez le notaire et enregistré au Fichier central des dispositions de dernières volontés le 7 décembre 2011, a été perdu dans des circonstances inexpliquées.
Madame Z, fille du défunt née d'un précédent mariage, soutient qu'elle est nommée légataire universelle dans ce testament disparu et engage alors une action en justice contre Madame J afin de faire valoir ses droits sur l'héritage.
Pour rappel, le légataire universel est une personne désignée par le défunt dans son testament pour hériter de l'intégralité de son patrimoine, après règlement des dettes et respect des droits des héritiers réservataires. Il succède donc à titre universel, c'est-à-dire qu'il reçoit tous les biens, droits et obligations du défunt. Toutefois, il doit respecter la réserve héréditaire des héritiers protégés par la loi et demander la délivrance du legs pour entrer en possession des biens.
La cour d'appel donne raison à la fille du défunt, considérant que les déclarations du notaire et des témoins suffisent à établir l'existence et le contenu du testament en sa faveur. La cour estime que, malgré la perte du testament, les preuves apportées par Madame Z sont suffisantes pour la reconnaître comme légataire universelle et écarte de facto les droits de l'épouse survivante, Madame J.
Contestant cette décision, Madame J forme un pourvoi en cassation. Elle soutient qu'en tant qu'épouse survivante non divorcée ni séparée de corps, elle a la qualité d'héritière réservataire et que, par conséquent, l'envoi en possession de madame Z ne peut être ordonné sans respecter les formalités spécifiques prévues par la loi.
La position de la Cour de cassation
La Cour de cassation donne raison à Madame J, rappelant les articles 1004, 1006 et 1007 du Code civil selon lesquels le légataire universel n'est saisi de plein droit des biens du défunt, sans formalités, que s'il n'existe pas d'héritier réservataire. Or, l'époux survivant fait partie des héritiers réservataires depuis la réforme des successions de 2001.
La haute juridiction reproche à la cour d'appel de ne pas avoir tenu compte de la qualité d'héritière réservataire de Madame J. En l'absence d'annulation du mariage, celle-ci conserve ses droits sur la succession.
Les héritiers réservataires bénéficient d'une part minimale de la succession, appelée réserve héréditaire, que le défunt ne peut leur enlever par testament. Les légataires universels doivent donc composer avec ces droits lors de la liquidation successorale.
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