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USA-Dans les cendres fumantes d'Altadena, l'amertume et la crainte de l'oubli
information fournie par Reuters 10/01/2025 à 14:23

par Joe Brock

Altadena, un quartier populaire du comté de Los Angeles loin du clinquant hollywoodien, agonise entre les ruines fumantes de ses petites maisons, autrefois paisiblement alignées à l'ombre des monts San Gabriel, et les carcasses de voitures calcinées.

Le "Eaton fire", du nom du Eaton Canyon au nord de Los Angeles, a réduit la localité en cendres. Il est l'un des incendies les plus meurtriers et virulents à sévir en Californie depuis mardi.

Si les images de Malibu et de ses résidences de stars en flammes ont frappé les esprits dans le monde entier, le sort de cette communauté en majorité noire et "latino" focalise moins l'attention des médias.

La localité, qui abrite quelque 40.000 habitants, a également attiré une nouvelle population, de jeunes artistes et des ingénieurs du "Jet Propulsion Laboratory" de la Nasa tout proche, un centre de recherche spatiale situé à Arroyo Seco.

Altadena plaisait pour son organisation à taille humaine, ses montagnes, ses sites de randonnée et sa proximité avec la nature.

Quel avenir désormais pour la petite ville?

Nombre d'habitants ont déclaré à Reuters craindre d'être oubliés par le gouvernement fédéral et l'Etat, plus enclins à sauvegarder les quartiers cossus de Los Angeles et à satisfaire les personnalités affectées par ce feu historique. La question des indemnisations par les assurances se pose également pour ces foyers généralement modestes.

"Ils ne nous donneront pas la valeur réelle de notre maison ou alors il faudra vraiment se battre pour l'obtenir", témoigne Kay Young, 63 ans, les larmes aux yeux face à ce qui fut la maison familiale et n'est plus désormais qu'un amas de gravats fumants.

Inez Moore, 40 ans, dont la maison de famille a été détruite par les flammes, s'inquiète que ses voisins ne grossissent les rangs des laissés-pour-compte, qui n'ont ni les ressources ni l'expérience pour faire face aux lourdeurs bureaucratiques à affronter après un sinistre.

"Il y a des gens qui ne vont pas toucher ce qu'ils devraient toucher, et puis d'autres qui vont toucher plus qu'ils ne devraient", déplore ce professeur de l'université de Californie.

SOLIDARITE

Kay Young et Inez Moore, comme d'autres habitants d'Altadena, ont dit à Reuters n'avoir vu aucun camion de pompiers mercredi à l'aube, lorsque les flammes ont pris possession du quartier. L'amertume est profonde.

"Nous n'avons pas été aidés. Je ne sais pas où ils étaient tous", déclare Jocelyn Tavares, 32 ans, alors que sa soeur et sa fille fouillent dans les reliquats d'une vie - un vélo d'enfant littéralement fondu, une tasse intacte esseulée.

La direction des pompiers du comté de Los Angeles n'a pas répondu à une demande de commentaire de Reuters.

Le "Eaton Fire", qui a débuté mardi soir, a fait au moins cinq morts et avait englouti 13.690 hectares jeudi soir, dont toute la partie nord d'Altadena.

Avec le développement de la ville voisine de Pasadena dans les années 1960 et l'extension des autoroutes de l'agglomération de Los Angeles, la population d'origine, en majorité blanche, a abandonné le quartier pour laisser place à des familles afro-américaines attirées alors par des maisons encore bon marché.

Une maison avec trois chambres coûtait environ 50.000 dollars dans les années 1970, elle est estimée aujourd'hui à plus d'un million de dollars, selon des habitants.

Au tournant des années 1990, la population était à près de 40% composée de Noirs. Aujourd'hui, Altadena compte 18% de Noirs, 49% de Blancs et 27% d'Hispaniques ou de Latinos, selon le Bureau du recensement américain.

Des "historiques" du quartier craignent que l'incendie et ses conséquences durables sur les infrastructures ne conduisent à leur éviction, faute d'une indemnisation suffisante, et n'accentue la gentrification du lieu.

La solidarité joue à plein au sein de la communauté, où voisins et connaissances de longue date unissent leurs destins pour tenter de renaître du désastre.

"Un paquet d'entre nous sommes allés à l'école ensemble", se souvient Kay Young, montrant du doigt le squelette noirci de l'établissement.

Michael McCarthy, 68 ans, qui travaille à Los Angeles, raconte que sa maison a été sauvée par un voisin qui a risqué sa vie en arrosant le toit au jet d'eau, alors que tout le monde avait fui.

"Cette communauté va se reconstruire, j'en suis convaincu, tout le monde connaît tout le monde ici, tout le monde aime tout le monde", souligne le futur retraité.

"Mon nouveau job, ce sera de tout remettre en ordre et d'aider au mieux mes voisins."

(Reportage Joe Brock; avec la contribution de Mario Anzuoni et Jonathan Allen, version française Sophie Louet)

1 commentaire

  • 10 janvier 15:45

    ils ont voté pour le plus climato-sceptique....( on pourrait aussi écrire "septique..."), alors il vont devoir assumer, et payer car cela ne va pas s'améliorer !


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