
Les maires n'ont jamais autant démissionné qu'au cours du mandat actuel, quatre fois plus qu'entre 2008 et 2014, et leur décision de jeter l'éponge s'explique avant tout par des conflits au sein de leur conseil municipal, révèle une étude publiée jeudi ( AFP / Denis CHARLET )
Les maires n'ont jamais autant démissionné qu'au cours du mandat actuel, quatre fois plus qu'entre 2008 et 2014, et leur décision de jeter l'éponge s'explique avant tout par des conflits au sein de leur conseil municipal, révèle une étude publiée jeudi.
"Avec plus de 3.000 changements de maires depuis l'élection municipale de 2020, les démissions volontaires, au nombre de 2.189, ont atteint un niveau historique", constate le chercheur au Cevipof et professeur à Sciences Po Martial Foucault dans l'enquête "Les démissions de maires: enquête sur un phénomène sans précédent".
"Entre septembre 2020 et mars 2025, ce sont en moyenne 40 démissions par mois enregistrées, soit plus d'une démission par jour" touchant 6% des maires élus en 2020, relève l'étude, réalisée pour l'Association des maires de France (AMF).
Une montée en flèche que le politologue compare à la "grande démission" aux États-Unis, ce phénomène de départs massifs de salariés observé dans les entreprises après la crise du Covid.
Élément nouveau dans le débat, ces démissions sont surtout causées par des tensions politiques au sein des conseils municipaux (31%), loin devant les passations de pouvoir anticipées (13,7%), les problèmes de santé (13,1%), le cumul des mandats (8,5%), la fatigue (5,1%), ainsi que les raisons personnelles (3,9%) ou professionnelles (3,4%).
Les agressions jouent un rôle extrêmement mineur, malgré leur forte exposition médiatique.
Ce choix de démissionner résulte donc principalement de "différends, disputes, conflits ou autres désaccords au sein du conseil municipal, tantôt avec des élus de l'opposition, tantôt, et c'est le cas le plus fréquent, au sein de la majorité".
Les tensions débouchent en général "sur des démissions de conseillers municipaux de l'opposition et/ou de la majorité", ce qui nécessite "l'organisation d'élections anticipées à l'issue desquelles le maire est mis en minorité et démissionne, ou choisit de siéger comme conseiller municipal d'opposition".
Lorsque le conseil municipal perd le tiers ou plus de ses membres, de nouvelles élections doivent en effet être organisées dans un délai de trois mois.
- "Crise de préparation" -
"Ce n'est pas une crise des vocations mais une vraie crise de préparation à la fonction. Même si les personnes qui deviennent maires le sont après avoir été conseillers municipaux ou adjoints, la fonction de maire correspond à un autre rôle pour lequel ces derniers ne sont pas tous prêts", commente Martial Foucault auprès de l'AFP.

Les démissions de maires sont surtout causées par des tensions politiques au sein des conseils municipaux (31%), loin devant les passations de pouvoir anticipées (13,7%), les problèmes de santé (13,1%), le cumul des mandats (8,5%), la fatigue (5,1%), ainsi que les raisons personnelles (3,9%) ou professionnelles (3,4%) ( AFP / Ludovic MARIN )
Parmi les éléments d'explication avancés, le politologue rappelle le contexte dans lequel l'élection municipale de 2020 s'est déroulée, en pleine crise du Covid.
"Pendant de longs mois, les équipes n'ont pas pu se retrouver en présentiel (...) Cela a nécessairement interrompu une dynamique collective", analyse-t-il.
La remise en question de décisions prises par le maire revient aussi souvent dans les cas identifiés, les autres élus lui reprochant "une gestion trop solitaire des grands dossiers", ce qui produit "des effets de désengagement ou de contestation".
Si les communes de moins de 500 habitants, plus nombreuses, sont les plus touchées (42%), les communes de 1.000 à 3.500 habitants enregistrent une vague de démissions "sans précédent", avec un quart des maires démissionnaires.
Les communes de plus de 10.000 habitants sont en revanche les plus exposées proportionnellement, au regard de leur plus faible nombre, de sorte que "plus la taille de la commune augmente, plus le risque de démission a progressé au cours de ce mandat".
Plus de la moitié des démissionnaires (53%) sont des maires nouvellement élus. Les démissions touchent autant les hommes que les femmes, mais "davantage les retraités âgés de 65 à 74 ans, les professions intellectuelles et les cadres supérieurs".
Certains départements sont également plus concernés comme l'Isère, la Haute-Garonne, la Charente, l'Essonne, le Nord ou encore le Tarn-et-Garonne, sans qu'un facteur explicatif commun n'ait été repéré.
L'enquête a été réalisée à partir des données du répertoire national des élus (RNE) publiées entre 2020 et 2025 par le ministère de l'Intérieur, d'articles de la presse quotidienne régionale et d'interviews des principaux acteurs concernés comme des associations départementales de maires.
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