* Les troupes israéliennes se retirent après deux jours d'opération * Les rues de Jénine sont dévastées * Les dirigeants de l'Autorité Palestinienne hués au cours de funérailles par Ali Sawafta JENINE, Cisjordanie, 5 juillet (Reuters) - Des rassemblements de militants palestiniens et d'habitants en colère se sont déroulés à Jénine mercredi, la foule accusant les hauts responsables de l'Autorité palestinienne de faiblesse après l'une des plus importantes opérations militaires israéliennes en Cisjordanie occupée depuis des années. L'opération de deux jours au coeur du camp de réfugiés de Jénine, qui visait à détruire des infrastructures et des armes utilisées par des mouvements palestiniens selon l'armée israélienne, a laissé les rues du camp dévastée et déclenché la colère du monde arabe. Au moins 12 Palestiniens, pour la plupart des militants armés, ont été tués et une centaine d'autres blessés au cours de l'opération de l'armée israélienne qui a débuté par des frappes de drones tard dans la nuit avant le déploiement sur le terrain de plus d'un millier de soldats israéliens. Un soldat de l'armée israélienne a été tué au cours de l'opération. "Nous sommes restés à l'intérieur de notre maison, mais ils ont coupé l'électricité puis l'eau", raconte Mohammad Mansour, un habitant du camp. Des bulldozers blindés ont détruit certaines rues, coupant les câbles électriques et les canalisations d'eau, pour exposer des mines enterrées en bord de route. "Nous avons fini par manquer de pain et de provisions, nous avions faim, je n'ai jamais vécu de telles journées". Lors des funérailles de dix personnes décédées au cours de l'opération, trois hauts responsables de l'Autorité palestinienne, dont les pouvoirs sont limités en Cisjordanie, ont été contraints de quitter les lieux après avoir été confrontés à une foule de milliers de personnes qui scandaient "Sortez ! Sortez !" Après le retrait des forces israéliennes mardi soir, les dirigeants du Jihad islamique soutenu par l'Iran et d'autres factions armées ont revendiqué la victoire et les habitants qui rentraient chez eux semblaient d'humeur revendicative. "Ils n'ont pas obtenu ce qu'ils voulaient, Dieu merci. Les jeunes vont bien, les familles vont bien et le camp va bien", a dit à Reuters Mutasem Estatia, père de six enfants, qui déclare avoir passé deux nuits à l'écart, dont une en détention. "Il y a 12 martyrs et nous sommes fiers d'eux, mais nous nous attendions à plus de dégâts au vu de l'ampleur du raid." Les forces israéliennes ont arrêté 150 militants présumés, saisi des caches d'armes, y compris sous une mosquée, déterré des mines en bordure de route et détruit un centre de commandement, a déclaré l'armée, qui précise que tous les Palestiniens tués étaient des combattants armés. Le Jihad islamique a annoncé que sept de ses membres avaient été tués, et le Hamas un combattant. Alors que les troupes se retiraient, Israël a fait état d'une volée de roquettes en provenance de la bande de Gaza, un autre territoire palestinien dirigé par le Hamas. Les roquettes ont été abattues et l'armée de l'air israélienne a frappé des cibles à Gaza appartenant au Hamas sans faire de victimes. Autre indication du regain de tensions, un Palestinien a lancé mardi une attaque à la voiture bélier à Tel-Aviv, blessant huit personnes avant d'être abattu. Le Hamas l'a revendiqué comme un de ses membres. Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a prévenu mardi que l'opération de Jénine ne serait probablement pas "la seule" et a déclaré qu'elle marquerait "le début d'incursions régulières et d'un contrôle continu sur le territoire". Le porte-parole des Brigades Al-Quds, bras armé du Jihad islamique, a déclaré que "chaque ruelle et chaque rue se transformeront bientôt en champs de bataille et d'affrontements". FAIBLESSE DE L'AUTORITÉ PALESTINIENNE L'ampleur de l'opération israélienne, l'une des plus importantes depuis 20 ans, a mis en évidence la puissance croissante des groupes militants à Jénine, où Israël estime que près de la moitié de la population est affiliée au Jihad islamique ou au Hamas. Elle a également mis en évidence la faiblesse de l'Autorité palestinienne, créée il y a une trentaine d'années après les accords de paix d'Oslo, et qui n'a pas été en mesure de s'imposer face à Israël ou aux groupes militants à Jénine ou à Naplouse, la ville voisine. Ces deux villes sont des centres historiques de la résistance palestinienne, mais leur importance s'est accrue avec la vague de violence qui a déferlé sur la Cisjordanie au cours des deux dernières années. À Jénine, des images circulant sur les réseaux sociaux montrent des centaines de personnes rassemblées devant les bureaux lourdement gardés du gouverneur de l'Autorité palestinienne aux premières heures de la matinée mercredi, jetant des pierres sur les murs de 5 mètres de haut. Israël a violemment critiqué l'Autorité palestinienne et son président Mahmoud Abbas, âgé de 87 ans, en les accusant de ne pas avoir réussi à maîtriser les groupes militants. Les responsables de l'Autorité palestinienne affirment quant à eux qu'Israël a rendu impossible tout contrôle en sapant délibérément leur autorité. Des sondages montrent que près de 80% des Palestiniens souhaitent la démission de Mahmoud Abbas, mais en l'absence de successeur désigné et faute de processus électoral depuis près de 20 ans, il est difficile d'imaginer qui pourrait être son remplaçant. (Reportage Ali Sawafta, Nidal al-Mughrabi, rédaction James Mackenzie, version française Corentin Chappron, édité par Blandine Hénault)
La colère gronde en Cisjordanie après le raid d'Israël sur Jénine
information fournie par Reuters 05/07/2023 à 16:27

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