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L'inflation, un poids en plus pour les agriculteurs pauvres
information fournie par Boursorama avec AFP 20/11/2023 à 11:08

Acheter du beurre avec parcimonie, recourir aux dons alimentaires, chauffer son logement au minimum: Stéphanie, agricultrice, subit de plein fouet la hausse des prix qui pèse sur un budget familial déjà très serré et des revenus aléatoires.

( AFP / LOU BENOIST )

( AFP / LOU BENOIST )

Dans le milieu agricole, près d'un ménage sur cinq vit sous le seuil de pauvreté, mais rares sont les agriculteurs à pousser la porte des associations de lutte contre la précarité.

Stéphanie (elle a requis l'anonymat) en fait partie. Cette quadragénaire vit entre Rennes et Lamballe, sur l'exploitation de son conjoint, Jérôme. Il cultive des céréales sur sa petite ferme de 30 hectares, sans parvenir à se payer.

Stéphanie a un poulailler industriel et travaille "en intégration": une société lui fournit les poussins, lui facture les frais et lui rachète les poulets après 35 à 45 jours, à un prix non négocié.

Son activité, déjà touchée par la grippe aviaire, l'est maintenant par la concurrence ukrainienne. Depuis fin août, son poulailler est vide.

"Depuis deux ans on ne vit que sur l’allocation familiale et le soutien familial", faute de pouvoir se verser un salaire, dit-elle. Soit "1.030 euros à peu près par mois" pour le couple et cinq enfants. Ils sont éligibles au RSA, mais ne le perçoivent pas actuellement, explique Stéphanie.

- Don alimentaire -

Pour nourrir sa famille, elle se rend un mercredi sur deux à une antenne délocalisée du Secours populaire, à 10 minutes en voiture de chez elle, en alternance avec la Banque alimentaire.

Le Secours populaire de Dinan (Côtes-d'Armor) couvre 66 communes en zone rurale. "La difficulté qu'on rencontre, c'est d'aller au contact des gens", explique à l'AFP Dominique Léonard, son secrétaire général. D'où la création de cette antenne mobile, où les bénévoles apportent les colis alimentaires.

"C'est très compliqué humainement de frapper à la porte et de dire j’ai faim", mais encore plus pour les agriculteurs à "qui on dit qu’ils nourrissent la France", témoigne Dominique Léonard.

Stéphanie bénéficie de colis à "50 centimes par tête" avec du pain, des conserves, "parfois du poisson, des escalopes de poulet, des yaourts". "On ne prend pas tous les légumes car on a un jardin", précise-t-elle.

Elle complète au supermarché. "Tout a augmenté: le beurre, j'en prends le minimum. Des fois j'achetais des oeufs en magasin, je ne le fais plus", dit Stéphanie. Impossible d'avoir ses propres poules, pour éviter la propagation de maladies dans son élevage.

Pour la viande, elle privilégie la vente directe chez des voisins éleveurs.

La famille achète en gros, en témoignent les lots de dentifrices stockés dans la maison.

"Je suis quelqu’un qui a toujours fait très attention", dit l'agricultrice, qui en 2021 se dégageait un salaire mensuel d'environ 670 euros.

- Astuces pour Noël -

La voiture, indispensable en milieu rural, représente une lourde charge. Pour un plein de carburant hebdomadaire, "il y en a facilement pour 100 euros, tandis qu’avant j’en avais pour 70-75 euros", compte Stéphanie.

Quand elle tombe en panne, c'est la galère. Plusieurs voitures sont garées entre la maison et l'étable, certaines en double. L'une sert à se déplacer, l'autre pour les pièces détachées.

D'autres frais ont augmenté: l'école privée - plus proche que l'école publique - la cantine, la garderie, le chauffage, énumère Stéphanie. Pour allumer les radiateurs, "on attend vraiment qu’il fasse froid, on les met sur 2, avant c’était sur 2-3", précise-t-elle.

Pour les cadeaux de Noël, "on a des astuces", comme des voitures pour enfants acquises avec les points fidélité du supermarché, "sinon c'est de la récup'", indique Stéphanie, montrant une table de ping pong trônant dans une ancienne étable.

Ses enfants partent exceptionnellement en vacances, grâce à des aides. Les parents, eux, ne partent pas.

En cas de dépense exceptionnelle, il faut parfois recourir à l'emprunt, "des crédits revolving à 18, 19%", décrit Stéphanie.

Les agriculteurs en difficulté "se sont faits prendre par l’inflation, mais pas seulement", relate Dominique Léonard. "Les groupes de l’agro-alimentaire ne leur font pas de cadeaux", estime le bénévole.

Les agriculteurs en intégration "sont simplement les nourrisseurs (des animaux qu'ils élèvent), ils ne décident de rien", poursuit-il. "On en revient à des servages", juge le bénévole.

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