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L'assassinat d'Al-Arouri, une entrave potentielle aux efforts de paix
information fournie par Reuters 03/01/2024 à 20:16

par Nidal al-Mughrabi, Maya Gebeily et Parisa Hafezi

LE CAIRE/BEYROUTH/DUBAI, 3 janvier (Reuters) - L 'assassinat mardi au Liban d'un haut responsable du Hamas, Saleh al-Arouri, pourrait inciter les dirigeants en exil du groupe palestinien à rester davantage dans l'ombre, nuisant ainsi aux efforts de médiation pour négocier un cessez-le-feu avec Israël et la libération d'otages supplémentaires.

Israël n'a ni confirmé ni infirmé être à l'origine de la mort du numéro deux du bureau politique du Hamas, qui figurait parmi les premiers noms de sa liste des individus les plus recherchés depuis l'attaque du 7 octobre.

Le patron de l'agence israélienne de sécurité intérieure (Shin Bet) avait toutefois promis de traquer les membres du Hamas au Liban, en Turquie et au Qatar, même si cela prenait des années, selon un enregistrement diffusé en décembre par la télévision israélienne Kan.

David Barnea, qui dirige le Mossad - le service du renseignement extérieur -, a lui exprimé mercredi sa volonté de "régler les comptes" avec le Hamas, prévenant les mères arabes dont les fils "ont pris part, directement ou indirectement, au massacre du 7 octobre, que leur sang nous est acquis".

Le meurtre de Saleh al-Arouri "pourrait inciter le Hamas à durcir sa position pour montrer qu'il ne cède pas aux pressions ou aux menaces d'assassinats supplémentaires", a commenté Achraf Abouelhoul, rédacteur en chef du journal égyptien Al Ahram et expert en affaires palestiniennes.

Grandes pourraient être les conséquences, à la fois pour les quelque 2,3 millions de Palestiniens vivant depuis près de trois mois dans une bande de Gaza pilonnée par les bombardements israéliens et pour les dizaines d'otages toujours détenus dans l'enclave palestinienne depuis l'attaque d'octobre du Hamas.

AROURI ÉTAIT "AU COEUR" DES POURPARLERS DIPLOMATIQUES

Saleh al-Arouri, qui vivait à l'étranger comme d'autres cadres du Hamas, faisait partie des négociateurs palestiniens participant à des discussions chapeautées par le Qatar destinées à parvenir à un cessez-le-feu avec Israël et à la libération des otages. La médiation de Doha avait permis d'aboutir fin novembre à une pause d'une semaine dans les combats à Gaza.

Des analystes ont déclaré que ces pourparlers pourraient désormais être rendus davantage compliqués par les préoccupations sécuritaires, d'autant que, selon un représentant du Hamas, Saleh al-Arouri était "au coeur" des négociations en vue d'un cessez-le-feu.

Ces dernières années, les groupes palestiniens opérant au Liban où le Hezbollah, soutien du Hamas dans le conflit actuel, est un puissant acteur, s'étaient habitués à des mesures de sécurité, a déclaré Mohanad Hage Ali, directeur adjoint du Centre Malcolm H. Kerr Carnegie pour le Moyen-Orient, basé à Beyrouth.

Le Hamas va devoir se montrer beaucoup plus prudent désormais, a-t-il souligné, alors que le groupe disposait au Liban d'une certaine stabilité et d'une "forme de dissuasion", représentée par le Hezbollah, aligné lui aussi sur l'Iran. Tout cela a "volé en éclats" depuis le 7 octobre, "le conflit au Sud-Liban et l'évolution des choses", a-t-il ajouté.

Saleh al-Arouri, 57 ans, est le plus haut représentant du Hamas tué depuis qu'Israël a promis d'"éradiquer" le groupe palestinien en réponse à l'attaque d'octobre qui a fait 1.200 morts dans le sud de l'Etat hébreu. Il est aussi le premier dirigeant politique du Hamas assassiné hors des territoires palestiniens ces trois derniers mois.

La perte de ce dirigeant pourrait inciter le Hamas à adopter une ligne plus dure à l'égard d'Israël, ont dit des experts, sans être en mesure de déterminer pour l'heure quelle pourrait être la nouvelle position du groupe palestinien.

LE HEZBOLLAH "NE RESTERA PAS SILENCIEUX"

Pour sa part, le Hezbollah a dénoncé un "crime majeur et dangereux", prévenant qu'il ne resterait "pas silencieux", selon les propos de son chef, Hassan Nasrallah, lors d'une allocution télévisée.

Les échanges de tirs frontaliers entre l'armée israélienne et le Hezbollah sont quasi-quotidiens depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza - des tensions sans précédent depuis la guerre de 2006. La région de Beyrouth avait toutefois été épargnée jusque-là.

Selon des analystes, le Hezbollah se retrouve sous pression pour venger cette attaque ayant ciblé un allié, qui plus est dans la ville de Daniyeh, bastion du mouvement armé chiite au sud de Beyrouth.

Tsahal a dit mardi être préparée à "tout scénario" après la mort de Saleh al-Arouri.

Un cadre en exil du bureau politique du Hamas, Houssam Badran, a affiché un ton défiant en réaction à cet assassinat, s'adressant à "l'occupation criminelle" pour la prévenir que "la bataille est ouverte".

Cependant, un représentant du groupe palestinien, Sami Abou Zouhri, a indiqué que la position du Hamas n'avait pas changé - le groupe est ouvert à "toute discussion à condition qu'Israël cesse ses attaques" -, même si, a-t-il noté, la mort de Saleh al-Arouri "aura ses conséquences".

TÉHÉRAN "CHOQUÉ", AVERTISSEMENT D'ANKARA

A Téhéran, trois sources proches des "durs" du pouvoir clérical ont fait savoir que l'assassinat de mardi a alimenté chez les dirigeants iraniens la crainte qu'Israël tente d'élargir le conflit en poussant l'Iran à entrer en guerre.

L'assassinat de Saleh al-Arouri a "choqué tout le monde à Téhéran", a déclaré l'un des initiés. "Cela ne veut toutefois pas dire que Téhéran va s'impliquer directement dans le conflit, même si cela est apparemment le principal objectif du régime sioniste."

L'Iran soutient publiquement le Hamas de longue date, mais a nié toute implication dans l'attaque du 7 octobre.

Israël a affiché une volonté apparente d'éviter une escalade du conflit, via un conseiller du Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui a déclaré dans la foulée de l'annonce de l'assassinat de Saleh al-Arouri qu'il ne s'agissait pas d'une attaque contre le Liban ou le Hezbollah mais d'une "frappe chirurgicale" contre le Hamas.

S'exprimant dans un entretien à la chaîne américaine MSNBC, Mark Regev a insisté sur le fait qu'Israël n'avait pas revendiqué l'attaque de mardi près de Beyrouth.

Quoi qu'il en soit, l'assassinat de Saleh al-Arouri devrait inciter les autres dirigeants du Hamas à se montrer encore plus prudents dans leurs déplacements. Aucun cadre du groupe palestinien n'a été aperçu dans la bande de Gaza depuis l'attaque du 7 octobre; certains d'entre eux auraient trouvé refuge dans le réseau de tunnels souterrain de l'enclave.

Au Liban, certains représentants du Hamas sont régulièrement apparus sur la scène publique ces derniers mois pour effectuer des déclarations. Mais Saleh al-Arouri et les autres cadres du groupe impliqués davantage dans les affaires stratégiques ont évité les projecteurs.

Le chef du bureau politique du Hamas, Ismaïl Haniyeh, et son prédécesseur, Khaled Mechaal, devraient rester en Turquie et au Qatar, deux puissances régionales où ils partagent leur temps et qu'Israël veille à ne pas antagoniser.

Ankara, qui a régulièrement averti Israël de ne pas approcher les membres du Hamas se trouvant sur le territoire turc, a annoncé mardi - avant la mort de Saleh al-Arouri - avoir arrêté 34 personnes suspectées d'être liées au Mossad et de planifier des attaques contre des Palestiniens dans le pays.

(Reportage Nidal al-Mughrabi au Caire, Maya Gebeily à Beyrouth, Parisa Hafezi à Dubai, avec Huseyin Hayatsever et Ahmed Mohamed Hassan; version française Jean Terzian, édité par Tangi Salaün)

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