Des dizaines de Palestiniens ont été tués jeudi lors d'une distribution d'aide alimentaire près de la ville de Gaza, dans le nord de l'enclave côtière, les autorités sanitaires du territoire accusant les forces israéliennes d'avoir ouvert le feu sur la population. Le ministère de la Santé de Gaza a annoncé un bilan de 104 morts et 280 blessés, contesté par Israël. Un porte-parole du gouvernement israélien, Avi Hyman, a déclaré que des camions d'aide avaient été submergés et que leurs conducteurs, des civils gazaouis, avaient foncé dans la foule."C'est à l'évidence une tragédie dont nous n'avons pas encore tous les détails", a-t-il dit à la presse. Un officier de l'armée israélienne a par la suite évoqué deux incidents distincts au passage du convoi d'aide, qui longeait la principale route côtière du territoire pour relier le sud au nord de l'enclave. Au cours d'un premier incident, a-t-il dit, les camions ont été entourés par des centaines de personnes et dans la panique, plusieurs dizaines d'entre elles ont été blessées ou tuées, écrasées ou renversées par les poids lourds. Une fois les camions partis, un deuxième incident s'est produit lorsque des forces israéliennes ont ouvert le feu sur un groupe de personnes s'approchant d'elles "qui présentaient une menace", a dit le porte-parole de l'armée. Il a également dit ne pas croire au bilan avancé par le ministère de la Santé de Gaza. "Nous n'avons pas de chiffres mais c'était une réponse limitée", a-t-il assuré. Achraf al Qidra, porte-parole du ministère de la Santé de Gaza, a rejeté cette version israélienne des événements et déclaré que le bilan pourrait encore s'alourdir. L'AUTORITÉ PALESTINIENNE DÉNONCE UN "MASSACRE" Le bureau du président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a condamné "un massacre mené par l'armée d'occupation d'Israël contre des personnes qui attendaient les camions d'aide au carrefour de Nabulsi", à l'ouest de la ville de Gaza. Le Hamas a averti dans un communiqué que l'incident de jeudi pourrait mettre à mal les négociations sur un nouvel accord sur une libération des otages en échange d'un cessez-le-feu avec Israël, négociations qui ne doivent pas se dérouler "au prix du sang versé par notre peuple" selon le mouvement islamiste. Interrogé à ce sujet, le président américain Joe Biden a déclaré que les négociations seraient désormais plus compliquées et qu'un cessez-le-feu n'aurait sans doute pas lieu d'ici lundi, comme il l'avait précédemment avancé, tout en disant garder espoir d'une prochaine trêve humanitaire. La Maison blanche a dit examiner les circonstances de ce "grave incident" qui illustre selon elle l'importance d'accroître et maintenir le flux d'aide humanitaire à Gaza. Achraf al Qidra a déclaré que les équipes médicales de l'hôpital Al-Shifa n'avaient pu faire face à l'afflux de blessés et à la gravité des blessures. Le responsable de l'hôpital Kamal Adwan à Gaza, Hussam Abou Safieya, a précisé avoir pris en charge dix corps et des dizaines de blessés. "On ne connaît pas le nombre de personnes admises dans les autres hôpitaux", a-t-il déclaré à Reuters. Une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, apparemment filmée à un rond-point, montre des camions chargés de nombreux cadavres et blessés. DES LIVRAISONS RARES ET CHAOTIQUES En près de cinq mois de bombardements israéliens dans la bande de Gaza, une grande partie du territoire palestinien a été transformée en champ de ruines. La majorité de ses habitants, chassés de leurs domiciles par les combats, ne survivent que grâce à l'aide humanitaire mais les livraisons sont rares et chaotiques. La directrice de la communication de l'UNRWA, l'agence de l'Onu chargée de l'aide aux réfugiés palestiniens, a dit constater une baisse de 50% du nombre moyen de camions entrant dans l'enclave palestinienne ces derniers temps. Mercredi, Israël a déclaré que l'Onu était responsable de la distribution d'une aide livrée par un convoi dans la nuit de mardi à mercredi, ce qu'a démenti le bureau des affaires humanitaires de l'Onu. Des responsables de l'UNRWA ont également indiqué que l'acheminement de l'aide était rendu difficile par le refus de policiers municipaux de Gaza d'assurer la sécurité des convois, après avoir été pris pour cible dans des raids israéliens. "Même après près de cinq mois d'hostilités brutales, Gaza a toujours la capacité de nous choquer", a réagi le coordinateur humanitaire de l'Onu Martin Griffiths sur la plate-forme X, se disant "horrifié" par l'incident. D'après le bilan quotidien diffusé par le ministère de la Santé de l'enclave palestinienne, au moins 30.035 personnes ont été tuées et 70.457 autres blessées dans la bande de Gaza depuis le début de l'offensive militaire israélienne déclenchée par l'attaque du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre dernier, qui a fait quelque 1.200 morts et donné lieu à l'enlèvement de plus de 250 otages, dont plus d'une centaine ont été relâchés à la faveur d'une trêve d'une semaine en novembre. (Nidal Al-Mughrabi au Caire, Dan Williams et Maayan Lubell à Jérusalem; version française Zhifan Liu et Jean-Stéphane Brosse, édité par Sophie Louet)
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