
Le chantier de l'A69 entre Toulouse et Castres, près de Puylaurens, dans le Tarn, le 28 février 2025 ( AFP / Ed JONES )
Le rapporteur public recommande à la cour d'appel administrative de Toulouse d'ordonner la reprise du chantier de l'A69, au grand dam des opposants à ce projet d'autoroute Castres-Toulouse qui avaient obtenu fin février la suspension des travaux.
Ce magistrat dont les avis sont généralement suivis, estime notamment que maintenir le chantier à l'arrêt, comme l'a ordonné le 27 février le tribunal administratif de Toulouse, "risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables", a fait savoir à l'AFP une avocate des opposants, Julie Rover.
Mercredi, la cour administrative examine un recours déposé par l’État visant à relancer les travaux, dans une nouvelle manche du bras de fer entre pro et anti-A69, moins d'une semaine après un vote du Sénat favorable à ce projet contesté. La cour doit rendre sa décision d'ici la fin du mois.
Le rapporteur public considère qu'il y a une "raison impérative d'intérêt public majeur" (RIIPM) justifiant une reprise rapide des travaux, sans attendre une décision sur le fond du dossier, qui n'interviendra pas avant la fin de l'année, a précisé à l'AFP Jean Olivier, des Amis de la Terre, une des associations ayant demandé et obtenu l'arrêt des travaux.
"On attend des trois juges qu'ils fassent preuve de discernement et ne suivent pas cet avis du rapporteur public, qui pour nous n'est pas entendable au regard du droit de l'environnement", a-t-il encore dit.
C'est la première fois qu'un chantier autoroutier de cette envergure est stoppé par la justice.
Depuis ce revers majeur, les partisans de l'A69, dont le gouvernement, le constructeur Atosca ou les principaux élus du département du Tarn, tentent d'obtenir la reprise des travaux devant la justice administrative ou en faisant voter au Parlement une "loi de validation" très critiquée par les militants écologistes.
- "incongru" -
Le 24 mars, le ministère des Transports a ainsi annoncé avoir fait appel de ce jugement et "dans le même temps, demandé le sursis à exécution de cette décision afin de permettre la reprise rapide des travaux sur le chantier".

Vue aérienne du chantier de construction de l'autoroute A69 Toulouse-Castres, près de Verfeil, le 14 mars 2025 en Haute-Garonne ( AFP / Ed JONES )
Selon le code de justice administrative, le sursis à exécution (c'est-à-dire la suspension des effets du jugement) peut être obtenu si les éléments présentés pour invalider le jugement sont suffisamment "sérieux" ou si ce jugement "risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables".
Le tribunal administratif de Toulouse a motivé l'annulation de l'autorisation de construire cette portion d'autoroute de 53 km entre Toulouse et Castres par l'absence de "Raison impérative d'intérêt public majeur" (RIIPM), une notion introduite en 1992 par une directive européenne. Seule la reconnaissance d'une RIIPM peut permettre d'obtenir une dérogation pour porter atteinte aux "157 spécimens d'espèces animales protégées" affectées par l'A69.
Les partisans de l'autoroute rappellent que sa construction a été déclarée d'utilité publique en 2018. Le député macroniste du Tarn Jean Terlier a ainsi jugé "incongru" qu'un tribunal administratif prenne une décision allant "à l'encontre d'une déclaration d'utilité publique (DUP) validée par le Conseil d’État".
Ils soulignent aussi que les travaux sont très avancés. Le ministre des Transports, Philippe Tabarot, a ainsi parlé d'une situation "ubuesque", avec "un chantier avancé aux deux tiers qui est arrêté du jour au lendemain".
Ces raisons ont amené des élus tarnais à présenter au vote des parlementaires un texte atypique pour obtenir la reprise du chantier sans attendre l'examen du dossier sur le fond par la justice administrative.
Cette proposition de loi, dont la conformité à la Constitution est questionnée par les opposants, a été adoptée en première lecture au Sénat à une large majorité le 15 mai. Transmise à l'Assemblée nationale, elle y sera examinée le 2 juin.
Pour les opposants, cette démarche équivaut à "mettre à la poubelle une décision juridique et donc à mettre de côté de contre-pouvoir qu'est le tribunal administratif".
En revanche, pour le député centriste du Tarn Philippe Bonnecarrère, "il s'agit de deux actions indépendantes et complémentaires, respectueuses l'une de l'autre", a-t-il assuré à l'AFP.
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