
(Crédits: Unsplash - Joshua J. Cotten)
Le site de Bièvres, en Essonne, cœur de la production de la maison fondée en 1932, fait l'objet d'un arrêté préfectoral de fermeture, après la découverte de graves manquements à l'hygiène.
À Bièvres, la célèbre manufacture de la maison Poilâne a dû arrêter net sa production. L'entreprise familiale, emblème de la boulangerie artisanale française, est sous le coup d'un arrêté préfectoral de fermeture, pris à la suite d'une «inspection inopinée menée par la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) mercredi 28 mai» . Ce contrôle sanitaire a mis en évidence des non-conformités «graves [...] en matière d'hygiène et de sécurité alimentaire» , obligeant la préfecture à ordonner la cessation immédiate de l'activité.
Lors de leur inspection, les quatre agents de la DDPP ont constaté la présence généralisée de déjections et d'urine de rongeurs, de rongeurs morts, d'insectes volants et rampants ainsi que de leurs larves. Ils ont également relevé une saleté générale des équipements et des locaux, des conditions de stockage dégradées, ainsi que des denrées alimentaires partiellement grignotées.
Nettoyage d'urgence et production relocalisée
Contactée, la direction de Poilâne affirme avoir «pris le sujet très au sérieux» . «Nous travaillons en coordination avec les services de la préfecture et les mesures nécessaires ont été prises le jour même» , indique l'entreprise. Un nettoyage complet des ateliers a été lancé sans délai, avec l'intervention d'une société spécialisée dès le lundi 2 juin. Ces opérations sont toujours en cours et «doivent d'étendre sur plusieurs jours» .
Dans l'attente du rapport complet des services de l'État, la direction cherche à déterminer «les actions nécessaires à court et moyen terme» pour permettre une reprise dans les règles. En parallèle, l'entreprise tente de maintenir partiellement son activité. «Nos boulangers sont à pied d'œuvre pour augmenter la production de pain depuis nos boulangeries situées rue de Grenelle et rue du Cherche-Midi» , à Paris, précise Poilâne. Toutefois, elle reconnaît ne pas pouvoir satisfaire «l'ensemble des demandes» de ses clients.
La manufacture de Bièvres, qui emploie à elle seule une part importante des 114 salariés de l'entreprise, alimente habituellement trois des cinq boulangeries parisiennes de la marque, ainsi que plusieurs enseignes de la grande distribution comme Monoprix et Auchan. Cette fermeture intervient dans un contexte économique délicat. Confrontée à une baisse du chiffre d'affaires, Poilâne avait été placée en procédure de sauvegarde d'octobre 2022 à février 2024. Cette période a permis, selon la direction, de mettre en œuvre un «plan d'action» , incluant le lancement de nouvelles offres, la réorganisation des équipes, et la suppression de trois postes en 2024.
Un protocole renforcé en 2023
Concernant les conditions de production, Poilâne défend ses pratiques. Elle rappelle que «chaque équipe de boulangers procède au nettoyage de son atelier deux à trois fois par jour, en fonction du rythme de production» . Par ailleurs, des «contrôles PH hebdomadaires» sont menés pour chaque four et chaque boulanger – au nombre d'une vingtaine au sein du site –, et la qualité des pains est vérifiée à chaque fournée. Ce protocole a été renforcé en 2023 avec l'actualisation de la documentation de nettoyage et l'intensification des interventions de prestataires spécialisés.
Face aux alertes relayées ces derniers mois par certains membres du CSE , la direction assure que «le dialogue social est une priorité dans une entreprise familiale comme la nôtre» . « Les informations remontées par les élus du personnel font systématiquement l'objet d'un point en CSE » , indique Poilâne, précisant que les solutions sont mises en place «en fonction des contraintes techniques et financières» . L'entreprise indique que sa priorité reste «la poursuite son activité» et le «partage de son savoir-faire d'artisan boulanger» . Elle espère pouvoir relancer la production dès que les autorités valideront la remise en conformité de son principal site.