
Le président russe Vladimir Poutine s'adressant aux médias le 11 mai 2025 à Moscou ( POOL / Gavriil GRIGOROV )
Le président russe Vladimir Poutine a proposé dimanche des négociations "directes" et "sans condition préalable" entre la Russie et l'Ukraine dès jeudi à Istanbul, repoussant à de telles discussions toute possibilité d'instaurer le cessez-le-feu exigé par les alliés de Kiev.
Dans une rare démonstration d'unité occidentale, l'Ukraine et ses alliés européens, de concert avec les Etats-Unis, ont adressé samedi un ultimatum à Moscou pour accepter un cessez-le-feu "complet et inconditionnel" de 30 jours à partir de lundi, faute de quoi la Russie s'exposerait à de nouvelles "sanctions massives".
Sans évoquer directement cette proposition, le président russe a reproché aux Européens de traiter la Russie "de manière grossière et à l'aide d'ultimatums" et a estimé que toute possible trêve devrait s'inscrire dans des discussions "directes" avec Kiev.
"La Russie est prête à des négociations sans aucune condition préalable (....). Nous proposons de commencer dès jeudi prochain, le 15 mai, à Istanbul", a déclaré M. Poutine dans une déclaration à la presse, en présence de journalistes de l'AFP, tard dans la nuit au Kremlin. Il a précisé qu'il s'entretiendrait dans les heures qui viennent avec le président turc Recep Tayyip Erdogan.
Ce dernier, en contact régulier avec son homologue russe, a plusieurs fois proposé d'accueillir des pourparlers de paix. La Turquie, membre de l'Otan, avait joué un rôle de médiation en 2022 pour la conclusion d'un accord permettant l'exportation de céréales ukrainiennes par la mer Noire, dont la Russie avait par la suite claqué la porte.
Vladimir Poutine n'a "pas exclu" que l'idée d'un cessez-le-feu soit discutée lors de pourparlers avec Kiev mais il a souligné que ces discussions devraient porter sur "les causes profondes du conflit" - qu'il a qualifié de "guerre" bien que ce terme soit rejeté par les autorités russes - "dans une perspective historique".
Moscou avait justifié le lancement de son offensive à grande échelle en février 2022 par la volonté de "dénazifier" l'Ukraine, dont son armée occupe actuellement environ 20% du territoire, de s'opposer à son rapprochement avec les Occidentaux ainsi qu'au renforcement de l'Otan près de ses frontières.
- "Gagner du temps" -
Alors que les cartes ont été rebattues par le retour à la Maison Blanche de Donald Trump, qui a entamé un rapprochement avec Vladimir Poutine, Moscou a rejeté jusqu'à présent les appels au cessez-le-feu.
Le Kremlin s'est contenté de décréter unilatéralement une trêve de trois jours pour les commémorations des 80 ans de la victoire sur l'Allemagne nazie, qui s'est achevée dans la nuit de samedi à dimanche après avoir été marquée par des accusations de violations des deux côtés.

De gauche à droite: le président français Emmanuel Macron, le chancelier allemand Friedrich Merz, le président ukrainien Volodymyr Zelensky, le Premier ministre polonais Donald Tusk et le Premier ministre britannique Keir Starmer, le 10 mai 2025 à Kiev ( AFP / Genya SAVILOV )
"Potentiellement un grand jour pour la Russie et l'Ukraine !" a écrit Donald Trump dimanche matin sur son compte Truth Social, sans expliciter s'il faisait référence à la proposition de Vladimir Poutine.
"Pensez aux centaines de milliers de vies qui seront sauvées avec la fin, espérons-le, de ce +bain de sang+ sans fin. (...) Je continuerai à travailler avec les deux parties pour m'assurer que cela se produise", a-t-il ajouté, alors qu'il pousse depuis son investiture en février Volodymyr Zelensky à accepter de négocier avec Moscou.
Ce dernier avait assuré jeudi, après un appel avec Donald Trump, que son pays était "prêt" à mener "tous formats de négociations" avec Moscou, mais que la Russie devrait instaurer d'abord un cessez-le-feu.
Emmanuel Macron a qualifié la proposition russe de "premier mouvement (...) pas suffisant", relevant chez Vladimir Poutine "la volonté de gagner du temps".
"D'ailleurs je pense que c'est inacceptable pour les Ukrainiens parce qu’ils ne peuvent pas accepter des discussions parallèles alors qu’ils continuent à être bombardés", a insisté le président français, qui s'exprimait à sa descente de train dans la ville polonaise de Przemysl au retour d'un déplacement en Ukraine, où il était accompagné samedi des dirigeants allemand Friedrich Merz, britannique Keir Starmer et polonais Donald Tusk.
- Aide militaire -

Le président américain Donald Trump dans le Bureau ovale, à la Maison Blanche, le 8 mai 2025 à Washington ( AFP / Jim WATSON )
Lors de cette visite, selon le président français, une vingtaine de pays membres d'une "coalition des volontaires", qui ont échangé par visioconférence à Kiev avec les dirigeants autour de M. Zelensky, ont "décidé de soutenir un cessez-le-feu" de 30 jours, "avec une surveillance assurée principalement par les Etats-Unis d'Amérique" et à laquelle "tous les Européens contribueront".
Si la Russie refuse ce cessez-le-feu ou l'accepte mais le viole, il a été convenu que "des sanctions massives seraient préparées et coordonnées entre Européens et Américains", a-t-il précisé.
Volodymyr Zelensky et les quatre Européens ont téléphoné à Donald Trump pour l'informer des résultats de leurs entretiens.
Friedrich Merz a évoqué la poursuite d'une "aide massive" à Kiev faute de réaction du Kremlin et estimé que la guerre russe en Ukraine "vise à détruire l'ordre politique européen tout entier".
Sur le terrain, dans la nuit de samedi à dimanche, après l'expiration de la trêve décrétée par Moscou, des alertes aériennes ont retenti dans de nombreuses régions ukrainiennes, dont à Kiev.
L'ambassade américaine en Ukraine a mis en garde vendredi contre le risque d'une importante "attaque aérienne" russe ces prochains jours.
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