
Un téléphone portable miniature à Paris, le 20 mai 2025, alors que les autorités françaises ont lancé une vaste opération dans 66 prisons pour réprimer l'utilisation de tels appareils ( AFP / Leo VIGNAL )
Près d'une centaine de téléphones portables miniatures et vendus comme indétectables ont été saisis en prison en France depuis mardi, dans le cadre d'une enquête portant notamment sur la filière de distribution de ces produits de la société Oportik.
Un total de 164 téléphones ont été saisis en détention, dont 88 téléphones miniatures, a annoncé jeudi dans un communiqué la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau.
"367 perquisitions ont été réalisées en détention, 200 personnes détenues ont été entendues dont 17 sous le régime de la garde à vue, environ 500 téléphones destinés à la vente et plus de 70.000 euros en espèces ont été saisis dans un local de stockage, ainsi que 14.000 euros sur un compte bancaire", a-t-elle listé.
Une "action de phishing" a aussi été déclenchée sur "l'ensemble des téléphones en circulation".
L'opération, dite "Prison break", lancée mardi dans 66 établissements pénitentiaires en France pour saisir ces téléphones de la taille de briquets, a également visé des "personnes soupçonnées de revendre" ces "produits de la société Oportik".
Deux personnes ont été mises en examen par un juge d'instruction parisien jeudi pour administration de plateforme permettant des transactions illicites, en bande organisée, selon le parquet de Paris, qui a demandé leur placement en détention provisoire.
Les investigations sur "cette filière de distribution" en prison de téléphones de "conception chinoise" se poursuivent désormais sous la direction d'un juge d'instruction. L'un des objectifs de l'enquête est notamment de démanteler cette filière d'approvisionnement.
Pour ce qui est des "receleurs d'objets interdits" - les utilisateurs des téléphones portables - le parquet de Paris s'est dessaisi au profit de 55 parquets localement compétents.
- Utilisés "majoritairement" pour des infractions -
Selon un bilan provisoire, il y a eu 26 classements sans suite, 21 convocations en audience, 28 comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), 11 poursuites d'enquête, entre autres.

La procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, lors d'une conférence de presse, le 3 mai 2025 à Paris ( AFP / Ian LANGSDON )
Au tribunal de Paris, une personne devait être jugée jeudi en comparution immédiate pour recel, pour avoir détenu ce type de téléphone au sein de la prison parisienne de La Santé. L'audience a été renvoyée au 30 juin.
Cette enquête a été ouverte en octobre 2024 par la section de lutte contre la cybercriminalité du parquet de Paris.
Selon le communiqué, elle est "née du constat commun que des infractions étaient commanditées au moyen de téléphones depuis la détention" et d'une information de la gendarmerie montrant que des téléphones miniatures étaient distribués en prison.
"Prison Break" s'appuie également sur "une enquête débutée par la Brigade de lutte contre la cybercriminalité (BL2C) sous la direction du parquet de Bobigny, portant sur un fournisseur de ce type de téléphones au sein des établissements pénitentiaires de la région parisienne".
"Des écoutes ont permis de confirmer que ces téléphones étaient très majoritairement utilisés pour la commission d'infractions", a assuré jeudi Mme Beccuau.
Dans un premier communiqué mardi, elle soulignait l'existence d'une chaîne commerciale, avec une société chinoise et des revendeurs, et une vente les présentant comme "indétectables aux portiques d'entrée dans les lieux de détention" grâce à un paramétrage "spécifique" de l'outil.
Ils étaient "mis en circulation par une société chinoise et revendus en France par le fournisseur Oportik", dont le nom de domaine a été saisi mardi.
"Ce réseau opérait également dans les prisons européennes et bien au-delà des frontières de l'Europe", a affirmé sur LinkedIn Johanna Brousse, cheffe de la section de lutte contre la cybercriminalité.
L'utilisation des téléphones par des détenus alimente fréquemment le débat public: il est interdit d'en posséder pour un prisonnier, mais rien qu'en 2023, 53.000 appareils et accessoires ont été saisis, selon l'administration pénitentiaire. Et en 2024, plus de 40.000 selon les chiffres donnés par le ministère de la Justice en janvier.
Ces téléphones peuvent être introduits par des proches au parloir, par des drones, des projections de colis par-dessus les enceintes des établissements pénitentiaires... Ou bien par des complices en détention, aboutissant, quand ces personnes sont identifiées, à des procédures pour corruption contre des agents pénitentiaires.
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