
Jenita Aguilar, mère d'un enfant disparu dans le typhon Haiyan en 2014, qui avait pu rencontrer le pape François lors de sa visite en 2015, ici prise le 22 avril 2025 à Tacloban ( AFP / Jam STA ROSA )
En janvier 2015, quatorze mois après la tempête la plus meurtrière de l’histoire des Philippines, le pape François se tient sur une scène balayée par la pluie et délivre un message d’espoir à la ville dévastée de Tacloban. Au lendemain de sa mort, les habitants s'en souviennent.
Alors âgé de 78 ans, le pape avait insisté pour effectuer ce voyage au centre des Philippines malgré l’arrivée d’une tempête.
"Il n’était pas obligé de faire cela. Il n’avait pas à venir ici par mauvais temps. Il aurait pu attendre encore trois ou quatre jours", a déclaré Alfred Romualdez à l'AFP, mardi au lendemain du décès du pape.
Un peu plus d’un an auparavant, le super typhon Haiyan avait fait plus de 7 000 morts ou disparus après avoir frappé la province de Leyte (centre-est) et les régions environnantes.
La tempête et les vagues géantes avaient rasé les cotes de la région de Leyte, très pauvre et à majorité catholique.
"Les gens se posaient beaucoup de questions, et ces questions étaient importantes. Cela a affecté leur foi… ils étaient brisés", a expliqué Romualdez.
"Nous avons perdu 500 enfants, alors les gens commençaient à se poser des questions… Ces enfants étaient innocents. Pourquoi devaient-ils mourir ?"
- François "nous a donné de l'espoir" -
"Le pape nous a donné de l'espoir", a déclaré Jenita Aguilar, dont le fils de sept ans, Junko, faisait partie des centaines d’enfants disparus.
À 53 ans, elle se souvient encore du moment où les vents violents et les eaux de crue de Haiyan avaient arraché son fils des bras de son oncle, alors que la famille s’accrochait au toit d’un magasin.
Ils ont passé deux jours à marcher dans les villages de Tacloban à la recherche du corps de son enfant.
Parfois, elle l’imagine encore vivant en sécurité dans la maison de quelqu’un d’autre.

Le chapelet remis par le pape François lors de sa visite aux Philippines, à Jenita Aguilar, mère d'un enfant disparu dans le typhon en 2014, ici pris le 22 avril 2025 à Tacloban ( AFP / Jam STA ROSA )
"Je demandais à Dieu pourquoi cela devait arriver. Est-ce que j'étais une mauvaise catholique ?" a-t-elle confié à l’AFP en sanglotant. Accablée par la peine, Mme Aguilar s'était mise sur le passage de la papamobile.
À sa grande surprise, le pape lui avait saisi la main, lui accordant la bénédiction.
"C’était un signe que le Seigneur m’aimait encore", a-t-elle dit, serrant fermement un chapelet que le pape lui avait remis ce jour-là.
- "Quelque chose en lui" -
La voisine de Mme Aguilar, Gina Henoso, 50 ans, faisait partie des 200.000 personnes qui s’étaient rendues sous une pluie battante ce jour-là pour assister à la messe que le pape François avait célébrée à l’aéroport de Tacloban.
Vêtue d’un poncho de pluie jaune fin, identique à celui porté par le pape ce jour-là, elle avait marché deux heures depuis chez elle pour atteindre le lieu.
"Quand je l’ai vu, cela m’a rappelé que j’étais vraiment en vie", dit-elle, la voix brisée.
Au pire de la tempête, elle et ses sept enfants avaient dû se réfugier chez un voisin avant que les autorités les évacuent.
"J’ai encore des cauchemars de ce qui s’est passé…", a-t-elle déclaré à l’AFP.
La douleur s’est estompée pour elle ce jour-là sous la pluie, pendant cette messe.

Jenita Aguilar, mère d'un enfant disparu dans le typhon en 2014 qui a rencontré le pape lors de sa visite aux Philippines en 2015, montre ici une photo de sa visite en Irlande en 2018 pour assister à une messe du pape, photo prise à Tacloban le 22 avril 2025 ( AFP / Jam STA ROSA )
"La pluie était forte, mais quand tu le voyais dans sa papamobile, il y avait quelque chose en lui qui apaisait ton cœur."
"Comment pleurer quand tu n’as pas de toit au-dessus de ta tête, que tu as beaucoup de morts et que tu dois encore trouver de quoi te nourrir ?" a demandé le Père Chris Militante mardi.
Le prêtre, qui est directeur des médias de l’Archidiocèse de Palo, a déclaré à l’AFP qu’il craignait qu'après le passage du typhon, ses paroissiens perdent la foi en Dieu.
"Peut-être que vous avez beaucoup de questions. Peut-être que je ne connais pas les réponses. Mais je suis ici", avait déclaré le pape François devant la foule.
"Malgré la dévastation… Dieu était avec nous", a témoigné le Père Militante.
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