
L'une des boucheries fermées temporairement à Saint-Quentin, dans l'Aisne, le 23 juin 2025. ( AFP / FRANCOIS NASCIMBENI )
Un climat pesant s'est abattu sur Saint-Quentin (Aisne), dont la population se dit "choquée" après une série d'intoxications alimentaires d'enfants à la bactérie Escherichia coli, à l'origine encore incertaine, une semaine après le décès d'une petite fille.
"Je suis choquée, c'est chaud", souffle Mylaine Guillard, 23 ans, croisée lundi par l'AFP dans le centre-ville de Saint-Quentin avec sa fille de quatre ans. Ici, "tout le monde en parle, tout le monde a peur", ajoute-t-elle.
Dix-neuf enfants désormais, dont une majorité dans l'agglomération de Saint-Quentin, ont contracté la bactérie E. coli depuis le 12 juin. Parmi eux, Elise, une fillette de 12 ans, est décédée le 16 juin.
Soupçonnant une infection alimentaire liée à de la viande, les autorités ont ordonné la fermeture préventive de quatre boucheries halal et de deux rayons boucherie de supermarchés de l'agglomération.
Des prélèvements y ont été effectués, et les résultats de leurs analyses sont attendus d'ici la fin de cette semaine, a dit la préfecture lundi soir.
Si sa fille mange peu de viande à la maison, Mylaine Guillard a "peur de la cantine", confie-t-elle: "J'ai un stress par rapport à ça, je lui ai demandé de ne pas manger la viande de la cantine".
Noé, son garçon de trois ans à ses côtés, se gare devant le supermarché où il a l'habitude de faire ses courses, dont le rayon boucherie a été fermé.
"Avec tout ça, on n'ose plus trop acheter de la viande (...) ça fait drôlement peur", assure-t-il. Depuis qu'il a eu vent des contaminations, "il n'y a plus de viande, plus du tout" à la maison, sourit-il.
"L'idée, ce n'est pas du tout d'entraîner la psychose", a pourtant insisté dimanche Yannick Neuder, ministre de la Santé, lors d'un déplacement à l'hôpital de Saint-Quentin. Il a assuré qu'il était toujours possible de "manger de la viande. Ce n'est pas le sujet".
- "Rester attentif" -
"Il y a une chape de plomb, quand même, sur la ville", constate Frédérique Macarez, maire (LR) de Saint-Quentin. Les habitants qui l'interpellent dans la rue lui font part de leur "tristesse" et de leur "inquiétude", souligne-t-elle.

L'hôpital de Saint-Quentin, dans l'Aisne, le 23 juin 2025. ( AFP / FRANCOIS NASCIMBENI )
Le nombre de cas a augmenté au fil des jours la semaine dernière, et "il faut rester attentif" cette semaine en raison de la période d'incubation, prévient Mme Macarez.
Si seuls des enfants ont été contaminés jusque-là, l'élue rappelle que la bactérie peut toucher, plus largement, "les personnes vulnérables", y compris "des personnes âgées".
"On ne peut pas non plus arrêter de manger tout d'un coup (...). A part faire attention, on ne peut rien faire de plus", soupire Lidzye, 20 ans, dont le bébé de trois mois somnole dans sa poussette.
Les mots de cette auxiliaire de vie se teintent d'un reproche envers les boucheries fermées préventivement, dont l'une où elle avait ses habitudes: "On fait confiance aux fournisseurs et aux bouchers parce qu'ils sont censés faire attention à l'hygiène (...), on achète un peu aveuglément".
Devant les dix mètres de long du rayon boucherie entièrement vidé, Marc Legrand, le responsable de l'Intermarché de Gauchy, près de Saint-Quentin, est encore sous le choc.
"Nous, apparemment, nous sommes concernés pour deux cas", alors que 12.300 clients sont passés en caisse avec des produits du rayon boucherie depuis le 1er juin, souligne-t-il.
Depuis l'annonce dimanche de la fermeture du rayon, il voit passer tous types de clients, "des personnes très compréhensives qui vont patienter" jusqu'aux résultats d'analyses, et "d'autres un peu plus agressives, qui demandent absolument à être remboursées".
"Il faut tout simplement attendre la suite des analyses (...), puis en ce qui nous concerne, nous mettre en situation d'assumer", conclut M. Legrand. "Le sujet, c'est d'aider et de trouver d'où vient cette bactérie".
En parallèle de l'enquête sanitaire, une enquête préliminaire contre X a été ouverte jeudi dernier "des chefs d'homicide involontaire, blessures involontaires, mise en danger de la vie d'autrui et tromperie sur la marchandise présentant un danger pour la vie humaine", a annoncé lundi le parquet de Saint-Quentin.
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