
Des enfants attendent dans un centre de distribution d'aide humanitaire à Nousseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 2 juin 2025 ( AFP / Eyad BABA )
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé lundi à une enquête indépendante sur des tirs ayant fait des dizaines de morts et blessés la veille près d'un centre d'aide humanitaire soutenu par les Etats-Unis et Israël dans le sud de la bande de Gaza.
Selon la Défense civile du territoire palestinien, des tirs israéliens ont fait au moins 31 morts et 176 blessés non loin de ce centre de distribution d'aide alimentaire dans le gouvernorat de Rafah.
En guerre depuis près de 20 mois à Gaza contre le mouvement islamiste palestinien Hamas après l'attaque du 7 octobre 2023 en Israël, l'armée israélienne a nié avoir "tiré sur des civils pendant qu'ils se trouvaient à proximité ou à l'intérieur" du centre de la Fondation humanitaire de Gaza (GHF).
Mais une source militaire israélienne a reconnu "des tirs de sommation (...) en direction de plusieurs suspects qui avançaient en direction de soldats" dimanche avant le lever du jour, à environ un kilomètre de ce centre.
Lundi, M. Guterres a demandé "l'ouverture immédiate d'une enquête indépendante sur ces événements et que les auteurs soient tenus pour responsables".
"Quelle honte!", a réagi le ministère israélien des Affaires étrangères sur son compte X, reprochant au secrétaire général de l'ONU de ne pas critiquer le Hamas.
La GHF, organisation au financement opaque, affirme avoir distribué six millions de repas depuis le début de ses opérations il y a une semaine, mais son déploiement a été marqué par des scènes chaotiques et des informations faisant état de victimes de tirs israéliens à proximité des centres de distribution.
Les Nations unies ont refusé de travailler avec cette organisation en raison de préoccupations concernant ses procédés et sa neutralité.
- "Peur et chaos" -

Un homme fouille les ruines d'une maison après un bombardement israélien à Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, le 2 juin 2025 ( AFP / Omar AL-QATTAA )
Des témoins ont déclaré à l'AFP qu'ils se rendaient au centre d'aide quand des drones et des chars équipés de mitrailleuses ont ouvert le feu sur la foule dimanche.
Il était "05H00 ou 05H30, avant le lever du jour" lorsque les tirs ont éclaté près du rond-point Al-Alam, où une foule s'était rassemblée avant de se rendre au centre GHF, situé à environ un kilomètre de là, a raconté un habitant de 33 ans.
"Bien sûr, c'est l'armée israélienne qui a tiré à balles réelles. Des milliers de personnes attendaient au rond-point Al-Alam (...) mais l'armée a tiré et tout le monde s'est enfui. La peur et le chaos régnaient. J'ai vu de mes propres yeux des martyrs et des blessés dans le secteur", a-t-il ajouté, demandant à conserver l'anonymat par peur de représailles israéliennes
Un autre témoin, Mohammed Abou Deqqa, 35 ans, a déclaré avoir entendu de premiers coups de feu "vers 05H00".

Des Palestiniens veillent les corps de leurs proches tués par une frappe israélienne, à Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, le 2 juin 2025 ( AFP / Omar AL-QATTAA )
"Au début, nous avons pensé qu'il s'agissait de tirs d'avertissement. Mais il n'a pas fallu longtemps pour que les tirs s'intensifient. J'ai commencé à voir des gens allongés au sol, couverts de sang", a-t-il dit: "Les tirs visaient les civils, les gens ont commencé à courir mais beaucoup n'ont pas pu s'échapper".
Des photos de l'AFP prises vers 05H40 montrent des civils en train d'entreposer des corps blessés sur des charrettes tirées par des ânes alors que le soleil vient à peine de se lever.
Le porte-parole de la Défense civile de Gaza, Mahmoud Bassal, a déclaré que des équipes de secours étaient arrivées vers 06H00 et avaient pris en charge des morts et des blessés. A cette heure-là, des civils et d'autres ambulanciers avaient déjà amené des morts et des blessés à l'hôpital Nasser de Khan Younès et à un hôpital de campagne de la Croix-Rouge.
- "Rumeurs" -

Des Palestiniens fouillent les décombres après un bombardement israélien à Nousseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 2 juin 2025 ( AFP / Eyad BABA )
"Le Hamas fait (...) tout son possible pour nous empêcher" de distribuer l'aide, a déclaré dimanche le général de brigade Effie Defrin, porte-parole de l'armée israélienne. "Je vous invite à ne pas croire toutes les rumeurs propagées par le Hamas. Nous enquêterons sur chacun de ces incidents et sur chacune de ces allégations", a-t-il ajouté.
Dans un message vidéo diffusé dimanche matin depuis l'hôpital Nasser, la chirurgienne britannique Victoria Rose a décrit une scène de "carnage absolu", déclarant que "toutes les salles étaient pleines et qu'il ne s'agissait que de blessures par balles".

Des Palestiniens emportent des corps après des tirs attribués par les secours à l'armée israélienne près d'un centre de distribution d'aide, à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 1er juin 2025 ( AFP / - )
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a déclaré que son hôpital de campagne à Rafah avait reçu 179 personnes, dont 21 ont été déclarées mortes à leur arrivée. Tous les blessés "ont déclaré qu'ils essayaient d'atteindre un site de distribution d'aide", a souligné le CICR, ajoutant que "la majorité d'entre eux souffraient de blessures par balle ou d'éclats d'obus".
Israël fait face à une pression internationale croissante pour mettre fin à la guerre dans la bande de Gaza, en proie à une situation humanitaire catastrophique.
Selon l'ONU, l'ensemble de la population du territoire est confrontée à un risque de famine. Récemment, les Nations unies ont rapporté des incidents au cours desquels l'aide humanitaire avait été pillée, notamment par des individus armés.

Nuage de fumée après un bombardement israélien à Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, le 1er juin 2025 ( AFP / BASHAR TALEB )
Par ailleurs, la Défense civile a annoncé la mort lundi de "14 personnes parmi lesquelles six enfants et trois femmes, en plus des 20 personnes qui se trouvent encore sous les décombres" après un bombardement israélien sur une habitation à Jabalia, dans le nord de Gaza.
Interrogée à ce sujet par l'AFP, l'armée a fait état de "frappes menées contre des cibles terroristes dans le nord de la bande de Gaza", sans autre précision.
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