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Cœur "brisé": la Birmanie pleure son patrimoine détruit par le séisme
information fournie par AFP 28/04/2025 à 08:40

Une statue de Bouddha au milieu des décombres le 12 avril 2025  dans la pagode de Lawkatharaphu à Inwa (banlieue de  Mandalay) , deux semaines après le tremblement de terre qui a secoué la Birmanie ( AFP / Sai Aung MAIN )

Une statue de Bouddha au milieu des décombres le 12 avril 2025 dans la pagode de Lawkatharaphu à Inwa (banlieue de Mandalay) , deux semaines après le tremblement de terre qui a secoué la Birmanie ( AFP / Sai Aung MAIN )

Quand un séisme meurtrier a frappé la Birmanie, des siècles de patrimoine religieux sont partis en poussière: des statues de Bouddha, des stupas, et la pagode blanche immaculée où venait prier Khin Sein, 83 ans.

Le 28 mars dernier, un tremblement de terre de magnitude 7,7 a détruit le temple Nagayon à Mandalay (centre), à l'instar d'autres sites historiques qui parsèment les rues de la dernière capitale royale birmane.

La secousse a décapité la sculpture du serpent sacré, symbole de protection dans la mythologie bouddhique.

"J'ai crié en priant pour que la pagode Nagayon me sauve lorsque le tremblement de terre a commencé", a déclaré Khin Sein. "Mais mon fils m'a dit que la pagode s'était déjà écroulée".

"Je ne pense pas qu'un maçon ou un architecte puisse la reconstruire à l'identique", concède-t-elle auprès de l'AFP, les larmes aux yeux, en arpentant le site où elle prie depuis plus d'un demi-siècle.

"Je veux retrouver l'original mais je sais que ce n'est pas possible", estime-t-elle.

Le tremblement de terre, d'une puissance inégalée en Birmanie depuis plusieurs décennies, a tué plus de 3.700 personnes, et laissé plus de deux millions d'autres dans un état de "besoin critique" selon les Nations unies, dans un pays déjà exsangue en raison du conflit civil ravivé par le coup d'Etat de février 2021.

Le glissement de la faille de Sagaing, qui traverse la Birmanie du nord au sud, a détruit plus de 3.000 monastères et couvents, ainsi qu'au moins 5.000 pagodes, selon la junte. Beaucoup de sites étant des constructions modernes, il est difficile de mesurer l'ampleur du patrimoine perdu dans les décombres.

- Cœur "brisé" -

Mandalay, capitale culturelle du pays, et les villes voisines de Sagaing et Inwa, toutes proches de l'épicentre, sont d'anciens lieux de pouvoir qui témoignent du prestige de la monarchie birmane.

Des visiteurs dans les allées du monastère   bouddhiste de Me Nu à Inwa dans la banlieue de Mandalay, le 12 avril 2025, deux semaines après le tremblement de terre  ( AFP / Sai Aung MAIN )

Des visiteurs dans les allées du monastère bouddhiste de Me Nu à Inwa dans la banlieue de Mandalay, le 12 avril 2025, deux semaines après le tremblement de terre ( AFP / Sai Aung MAIN )

Le dernier roi de Birmanie régnait depuis Mandalay, jusqu'à l'annexion par les Britanniques en 1885. Les crénelages de l'ancien palais royal sont tombés par endroits, de même que certains ornements.

A un kilomètre de là, un pont de l'époque coloniale s'est effondré dans le fleuve Irrawaddy.

Inwa, anciennement appelée Ava, a servi de capitale pendant presque 360 ans jusqu'à ce qu'un séisme en 1839 de magnitude 8,2 décide la cour à s'installer ailleurs.

Trois quarts des bâtiments historiques répertoriés au sein d'une "zone d'héritage culturel ancien" ont été endommagés par les secousses de 2025, ont constaté les autorités.

Thu Nanda est venu visiter ce qu'il reste du monastère en briques Me Nu, construit en 1818.

Des parties entières des ailes nord et ouest ont été dévastées, englouties sous une masse désordonnée de briques de couleur terre cuite.

"Les vieilles choses possèdent le plus de valeur", explique le moine âgé de 49 ans. "La perte de patrimoine historique nous brise le cœur".

"Même si nous pouvions le réparer, les gens ne pourront pas ressentir la même chose que si c'était l'original. On ne peut pas restaurer" le cachet ancien du site, poursuit-il.

- Bouddha indemne -

"Je pense que la perte de notre patrimoine ne va pas seulement affecter notre pays, mais aussi le monde entier", estime-t-il.

Les pluies attendues prochainement, marquant le début de la mousson, vont compliquer le travail de recherche de restes humains sous les décombres, qui demeurent la priorité des autorités. La reconstruction du patrimoine détruit reste encore à débattre.

Une statue de Bouddha à terre le 12 avril 2025 dans la pagode de Lawkatharaphu à Inwa, (banlieue de Mandalay), après le tremblement de terre de la fin mars qui a fait d'importants dégats et tué quelque 3700 personnes ( AFP / Sai Aung MAIN )

Une statue de Bouddha à terre le 12 avril 2025 dans la pagode de Lawkatharaphu à Inwa, (banlieue de Mandalay), après le tremblement de terre de la fin mars qui a fait d'importants dégats et tué quelque 3700 personnes ( AFP / Sai Aung MAIN )

Les Birmans sont habitués aux destructions de grande échelle, entre frappes aériennes et sièges d'espaces urbains, rythmant la guerre civile qui a tué des milliers de civils, et déplacé plus de 3,5 millions de personnes.

Pour autant, Thein Myint Ko assure "n'avoir jamais vu une telle tragédie en 65 ans de vie", en examinant ce qu'il reste de la pagode Lawka Tharaphu, vieille de trois siècles.

Des fissures lézardent la stupa dorée, alors que des travailleurs creusent dans les montagnes de débris. "Je suis dévasté", dit-il.

Pour autant, une statue monumentale de marbre de huit mètres représentant le Bouddha est en grande partie indemne: son halo d'or a été brisé et sa base craquelée, mais son expression sereine n'a pas été affectée.

"Personne n'a été blessé et l'image du Bouddha a survécu", remarque un homme qui nettoie les débris au pied de la statue. "Cette pagode est tellement bénie".

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