
L'établissement catholique Notre-Dame-de-Bétharram, dans les Pyrénées-Atlantique, le 18 mars 2025 ( AFP / Gaizka IROZ )
François Bayrou a contesté mercredi l'accusation de la commission d'enquête parlementaire sur les violences en milieu scolaire, qui lui a reproché un "défaut d'action" ayant permis aux agressions de "perdurer" au collège-lycée de Bétharram.
"C'est exactement le contraire", a réagi l'entourage du Premier ministre, qui s'est félicité que la commission ait "refusé de suivre" le corapporteur de La France insoumise Paul Vannier "qui souhaitait" le "mettre en cause", y compris devant la justice.
La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a fermé définitivement la porte à cette éventualité, jugeant mercredi soir "sans objet" la demande du député de poursuivre le Premier ministre pour "faux témoignage", étant donné que la présidente de la commission d'enquête avait déjà "rejeté" une telle requête.
Cette affaire touche très personnellement le chef du gouvernement. Son épouse a enseigné le catéchisme et plusieurs de ses enfants ont été scolarisés dans cet établissement catholique situé près de sa ville de Pau, visé par plus de 200 plaintes d'anciens élèves pour des violences physiques et sexuelles pendant des décennies.
François Bayrou était déjà à l'époque un homme politique influent dans sa région du Béarn. Il a présidé le département des Pyrénées-Atlantiques, en charge de la protection de l'enfance, de 1992 à 2001, et occupé les fonctions de ministre de l'Éducation nationale de 1993 à 1997.
"A défaut d'action" que François Bayrou avait "les moyens d'engager", alors qu'il était "informé" quand il était ministre de l'Education et président du conseil général, ces violences "ont perduré pendant des années", concluent les auteurs du rapport Paul Vannier et sa collègue Renaissance Violette Spillebout.
- "Un monde différent" -

Le Premier ministre François Bayrou le 14 mai 2025 devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale, à Paris ( AFP / ALAIN JOCARD )
L'entourage du Premier ministre a rappelé qu'à l'époque, il avait "organisé une inspection" qui avait "donné lieu à un rapport élogieux pour l'établissement" et qu'aucun successeur après lui à l'Education nationale "n'a organisé de contrôle de vérification ou d'inspection".
François Bayrou avait été entendu pendant plus de cinq heures le 14 mai par la commission, rejetant avec virulence les accusations de mensonge ou d'intervention dans les années 1990 auprès de la justice dans cette affaire.
Et il avait par la suite publié sur un site internet dédié l'ensemble des pièces produites lors de son audition.
La présidente de la commission d'enquête Fatiha Keloua-Hachi (PS) a estimé devant la presse que l'audition avait été "pénible" et que François Bayrou n'avait "pas" été "convaincant" mais qu'il n'avait "pas clairement menti à ce moment-là".
Selon elle, il vit "dans un monde qui est différent du nôtre (...), où on peut donner des claques aux enfants" dont il pense qu'elles sont "éducatives", et "détruire la réputation" d'une lanceuse d'alerte, en l'occurrence une ex-enseignante de Bétharram qui l'avait sollicité plusieurs fois à l'époque.
François Bayrou avait défendu un geste de "père de famille" quand il avait été interrogé sur sa gifle donnée à un jeune à Strasbourg en 2002.
Paul Vannier considère lui que le chef du gouvernement a "menti" aux députés "en niant toute information au sujet de ces violences", mensonge qui "pouvait viser à dissimuler" son "inaction" alors qu'il était "informé de faits de violences physiques dès 1996", date de la première plainte pour violence physique, "et de faits de violences sexuelles dès 1998", quand un ancien directeur de l'établissement, le père Silviet-Carricart, est mis en examen pour viol.
- Etat "défaillant" -
Toujours selon l'élu LFI, François Bayrou avait "connaissance" de ces violences puisqu'il avait commandé en 1996 un rapport de l'inspection de l'Education nationale "qui documente, par exemple, le châtiment du perron" et qu'il avait rendu visite au juge d'instruction Christian Mirande en 1998 "expressément pour l'interroger" sur la mise en examen du prêtre.
Mais le Premier ministre échappe à une saisine de la justice. Mme Keloua-Hachi a jugé insuffisamment fondée la demande de signalements de Paul Vannier, qui suspecte de "faux témoignages" trois personnes dont François Bayrou.
La commission d'enquête dénonce en outre le "soutien indéfectible" des notables de la région à l'établissement. Ainsi que des pouvoirs publics "terriblement défaillants".
Quand la fille aînée de François Bayrou, Hélène, avait révélé avoir été elle-même victime de violences physiques par un prêtre de son collège, elle avait dénoncé un "déni collectif".
L'affaire touche une autre corde sensible: la foi catholique du Premier ministre. Le père Carricart, dont le corps sera retrouvé à Rome, était un ami de la famille, selon le juge Mirande, ce que François Bayrou a démenti lors de son audition.
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