Dette publique et contribution des "grosses entreprises" : le patron de la CMA CGM ouvre la porte à la piste de Barnier
information fournie par Boursorama avec Media Services 23/09/2024 à 17:57

Le nouveau Premier ministre a évoqué les réflexions en cours à propos de fiscalité des grandes entreprises françaises, qui pourraient être mises à contribution.

Rodolphe Saade, à Marseille, le 8 mai 2024 ( POOL / LUDOVIC MARIN )

"Si le gouvernement décidait d'une contribution exceptionnelle de solidarité des grosses entreprises, on serait là". A l'occasion d'une conférence de presse lundi 23 septembre, le PDG du transporteur maritime CMA CGM Rodolphe Saadé s'est dit ouvert à l'appel à "l'effort collectif" demandé par Michel Barnier.

Le nouveau Premier ministre a indiqué dimanche qu'il comptait demander "aux plus riches de prendre part à l'effort de solidarité", sans "alourdir encore l'impôt sur l'ensemble des Français". "Je ne vais pas alourdir encore l'impôt sur l'ensemble des Français qui payent déjà le plus d'impôts de tous les partenaires européens", a déclaré M. Barnier sur France 2 , "ni sur les gens les plus modestes, ni sur les gens qui travaillent, ni sur les classes moyennes". "Mais je ne vais pas exclure, dans l'effort national qu'il faudra faire, que les personnes les plus fortunées participent", a-t-il ajouté.

Les grosses entreprises devraient ainsi également être concernées: "Je ne veux pas aggraver la double dette écologique et financière, donc il faut faire un effort collectif pour maîtriser les dépenses, ça peut se faire notamment avec des prélèvements ciblés sur les personnes fortunées, ou certaines grosses entreprises", a-t-il ajouté. Comme on lui demandait s'il excluait une hausse de l'impôt sur les sociétés, il a répondu : "Je ne dis pas cela, mais je pense que les très grandes sociétés peuvent aussi contribuer à l'effort national de redressement".

Saadé défend le régime fiscal avantageux face à la concurrence asiatique et au risque de décrochage

Le PDG du transporteur maritime s'est par ailleurs inquiété d'une possible remise en cause de la fiscalité spécifique qui pèse sur le secteur du transport maritime, alors que le nouveau gouvernement français cherche des recettes pour combler le déficit public.

"Je sais qu'en France on est très créatifs quand il s'agit de fiscalité", a ironisé M. Saadé lors d'une conférence de presse concernant l'acquisition d'un opérateur portuaire brésilien. Interrogé sur l'éventualité de supprimer la taxe au tonnage, prélèvement spécifique aux entreprises du secteur, pour la remplacer par l'impôt sur les sociétés, régime fiscal bien plus défavorable, le patron franco-libanais a alerté sur le risque de décrochage par rapport aux concurrents. "La taxe au tonnage est un régime européen qui protège les compagnies européennes et qui leur donne la possibilité de continuer à se développer face à la concurrence asiatique", a-t-il assuré.

"Si la France décide d'arrêter le régime de la taxe au tonnage, ça nous met dans une situation de désavantage par rapport à nos concurrents européens et à nos partenaires asiatiques", a-t-il développé.

La taxe au tonnage permet aux compagnies maritimes de s'acquitter d'une taxe déterminée par le tonnage de l'ensemble des navires exploités ou utilisés par l'entreprise, plutôt que de l'impôt sur les sociétés (25% du bénéfice). Ce régime fiscal favorable, inventé en Grèce dans les années 1950, a peu à peu été adopté par la quasi-totalité des pays européens, mais aussi ailleurs dans le monde.

"Il faut que tout le monde soit logé à la même enseigne (...) La France ne peut pas changer le régime de la taxe au tonnage alors que le Danemark, la Suisse et l'Allemagne (pays d'implantation des concurrents européens de CMA CGM, NDLR) le maintiennent", a insisté Rodolphe Saadé.