La question du versement des dividendes
information fournie par Boursorama avec LabSense 17/05/2020 à 18:00

En ce début d’année 2020, les actionnaires des grandes entreprises européennes se frottaient les mains. Les résultats 2019 qui étaient publiés faisaient en effet, apparaitre des résultats records… L’Europe s’apprêtait à distribuer 359 milliards d’euros de dividendes aux actionnaires de ses entreprises les plus performantes. Mais ça, c’était… juste avant ! Avant l’arrivée du virus qui a déclenché son cortège de crises : sanitaire, boursière ; et mis à l’arrêt des pans entiers de l’économie. Dans ce contexte, se pose forcement la question du versement de ces dividendes record…

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Du point de vue juridique

La loi sur les sociétés commerciales autorise le versement, sous forme de dividendes du bénéfice distribuable, dès lors que l’exercice de l’année précédente a été clôturé et que l’assemblée générale des associés ou des actionnaires a voté cette distribution. L’entreprise dispose alors de 9 mois, après la clôture de l’exercice, pour payer ces dividendes. Or, les conséquences de la pandémie ont commencé à se faire sentir en Europe au premier trimestre 2020. Et si de grosses difficultés se font d’ores et déjà sentir - et que de plus grosses encore sont à venir - les résultats positifs qu’ont enregistré les entreprises en 2019 ne sont pas remis en cause. D’un point de vue juridique, rien ne s’oppose donc, pour elles, à la distribution des dividendes, après le vote ad ’hoc.

Du point de vue financier

Face à l’ampleur de la crise, et à ses conséquences économiques, qui ont été aussi rapides que sévères, la plupart des entreprises se trouvent dans un contexte d’incertitude inédit. De (très) lourdes pertes enregistrées en quelques semaines, des valeurs boursières qui s’effondrent, une activité qui peine à reprendre… Pour beaucoup, c’est donc le principe de précaution qui prévaut. Les entreprises ont besoin d’assurer leurs arrières en termes de cash. C’est ainsi que BNP Paribas, Natixis, Engie, M6, Coface, Dassault Aviation... et bien d’autres encore ont décidé de ne pas rémunérer leurs actionnaires, afin de préserver leur trésorerie.

Du point de vue éthique

Parmi les entreprises en difficultés, nombreuses sont celles qui demandent de l’aide à l’Etat. Une aide massive de 300 milliards d’euros sous forme de prêts garantis, à ainsi été annoncée, et commence à être déployée…Mais pas sans condition ! Bercy a été clair :  pas de prêts garantis par l'Etat ni de report de charges sociales et fiscales possibles pour les entreprises distribuant un dividende. Cette injonction concerne essentiellement les grands groupes. Les PME aidées qui peuvent avoir un besoin vital de dividendes devraient répondre à des critères différents. Mises sous pression – et même si le sujet reste sensible - les grosses entreprises ont donc, les unes après les autres, reconsidéré leurs versements de dividendes. Par ailleurs, l’Afep, qui regroupe les 110 plus grandes entreprises françaises, a recommandé à celles qui ont mis en place le chômage partiel, de réduire de 20 % leurs dividendes et - provisoirement – de baisser la rémunération de leurs dirigeants. C’est en effet une question d’éthique : les entreprises, aidées ou non, auront besoin de montrer qu’elles ont fait preuve de prudence, de responsabilité et de solidarité. Et il sera difficile de concevoir, dans l’après crise, qu’une entreprise ayant versé de larges dividendes, procède à des licenciements … Deux ordonnances publiées récemment autorisent les entreprises à tenir leurs assemblées générales d’ici le 30 septembre, afin de statuer sur l’épineux problème du versement des dividendes.