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Une copropriété peut-elle s’opposer à l’installation d’un dark store?
information fournie par Le Figaro 09/04/2022 à 07:00

Ces magasins «fantômes» se multiplient en France au pied des immeubles. Sont-ils légaux? Quel est le pouvoir des copropriétés pour les contrer?

Ils se sont installés dans des locaux commerciaux mais ne sont pas des commerces. Les «dark stores» inquiètent les mairies et irritent les riverains. Ces zones de stockage à l’allure de supérette installées en pied d’immeuble et fermées au public sont en réalité des entrepôts où sont préparées les commandes. Elles fragilisent les commerces traditionnels et génèrent des nuisances parfois invivables. Surtout, sont-ils légaux?

Le Figaro a sollicité Bruno Lehnisch, cadre juridique qui tient, avec Me Jean-Philippe Mariani, avocat, un blog consacré au droit de la copropriété, pour élucider la question. « Ces dark stores sont illégaux à double titre puisqu’ils ont changé de destination (qui constitue son âme, son identité ou encore son ADN) sans l’accord ni de la mairie ni de la copropriété », décrypte Bruno Lehnisch. Et à supposer que ces entrepôts de l’e-commerce aient l’autorisation de la mairie? Les copropriétaires peuvent-ils s’opposer à leur installation? Avant d’installer leur commerce - qui n’en est donc pas un en réalité - au rez-de-chaussée d’un immeuble, les gérants doivent s’assurer qu’ils en ont le droit et que c’est conforme au règlement de copropriété.

Trois cas de figure se présentent. Le premier, « rarissime » selon les blogueurs: la clause d’habitation bourgeoise exclusive. Dit autrement, seuls les appartements sont autorisés. Sont donc exclus les commerces - et les entrepôts - ainsi que les locaux où s’exerce une activité à titre libéral (médecin, avocat, notaire...). Le second cas, « très fréquent »: la clause d’habitation bourgeoise ordinaire. Les professions libérales sont autorisées mais pas les commerces ni les entrepôts.

Enfin, le dernier scénario: la clause autorise l’activité commerciale. A priori ce cas paraît simplissime. Mais pas tant que cela. Car là où le bât blesse, c’est que certaines clauses sont précises, d’autres moins, sur la destination de l’immeuble. Le règlement doit ainsi non seulement indiquer s’il est à usage d’habitation ou mixte et si les professions libérales sont autorisées. Mais également renseigner sur le caractère de l’immeuble (aspect extérieur, standing...) et sa situation géographique (quartier, environnement...). En juin 2016, la Cour d’appel de Lyon a estimé que l’installation d’une supérette dans une copropriété était interdite dès lors qu’une clause du règlement prévoyait l’interdiction de stocker des matières périssables. « L’assemblée générale a exactement considéré qu’une supérette était une activité alimentaire nécessitant de surcroît un stockage de matières périssables (fruits, légumes, produits laitiers...)», a jugé la cour.

Nuisances sonores, olfactives et visuelles

En revanche, il arrive que le règlement se limite à autoriser en rez-de-chaussée une activité commerciale mais sans plus de précision. Dans ce cas, il n’est pas possible d’interdire a priori tel ou tel commerce, comme le précise la loi ( article 9 de la loi du 10 juillet 1965 ). C’est ainsi que la Cour d’appel de Paris a autorisé qu’une activité de restaurant puisse s’installer au pied d’un immeuble. Et c’est dans cette brèche que les dark stores peuvent s’engouffrer? A priori non. « Si un règlement de copropriété autorise un commerce ou une boutique sans plus de précision, cette catégorie ne couvre pas les entrepôts. Le changement de destination ne serait donc pas régulier sans modification du règlement », analyse Bruno Lehnisch.

Et quand bien même les dark stores ne seraient pas interdits par le règlement de copropriété, le syndic et les copropriétaires pourraient obtenir la fermeture du commerce pour trouble anormal de voisinage. Car non seulement ils doivent demander l’autorisation de l’assemblée générale « si (leur) activité génère des travaux affectant les parties communes ou l’harmonie de l’immeuble ( article 25 de la loi du 10 juillet 1965 )» mais ils ne doivent pas causer de troubles de voisinage aussi bien sonores, olfactifs ou visuels. Et dans ce domaine aussi, les dark stores suscitent de vives critiques. « Les dark stores génèrent des nuisances difficilement contestables: enlaidissement de la vitrine, flux ininterrompus de scooters, odeurs nauséabondes, vives discussions tard dans la nuit... », fait remarquer Bruno Lehnisch.

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