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Face à la flambée des loyers et à la crise du logement, la Ville de Paris s'attaque au « coliving », ce nouveau modèle d'habitat partagé prisé des investisseurs. Accusé de contourner l'encadrement des loyers, il séduit pourtant de nombreux jeunes actifs. Faut-il y voir une solution moderne ou une dérive du marché immobilier ?
Un concept à double visage
Le « coliving » — contraction de « cohabitation » et « living » — promet de réinventer la vie collective. Dans ces immeubles aménagés, chaque locataire dispose d'une chambre privée, tout en partageant des espaces communs (salon, cuisine, terrasse) et des services comme le ménage, la connexion internet ou même le petit déjeuner. Sur le papier, le concept semble séduisant : il répond au besoin de flexibilité d'une génération mobile, en quête de liens sociaux et de logements tout compris.
Mais pour la Ville de Paris, cette promesse d'habitat communautaire cache une autre réalité : une forme industrialisée et hautement rentable de la colocation, qui détourne l'esprit initial de solidarité. Derrière les façades modernes, des loyers souvent compris entre 900 et 1.200 euros pour 10 à 12 m², bien au-delà des plafonds légaux, et des opérateurs privés plus proches de l'hôtellerie que du logement résidentiel.
Un modèle jugé spéculatif
Selon les élus communistes à l'origine de la proposition, le développement du coliving accentue la pression sur le parc résidentiel. Certains opérateurs rachèteraient des immeubles entiers, parfois en poussant les anciens locataires à partir, pour les transformer en « résidences partagées » plus lucratives. La municipalité y voit une menace pour la mixité sociale et la disparition progressive des logements familiaux accessibles.
Le Conseil de Paris a donc adopté une délibération symbolique : la capitale « refuse » désormais le coliving sur son territoire et appelle l'État à encadrer, voire interdire, ce type de projet. Si cette position n'a pas de valeur contraignante, elle envoie un signal fort aux promoteurs immobiliers.
Les défenseurs du coliving plaident l'innovation
Les partisans du coliving dénoncent une réaction excessive. Selon eux, cette formule reste marginale et offre une solution concrète à des milliers de jeunes et de salariés en mobilité, confrontés à un marché locatif saturé. Certains experts estiment que le phénomène, encore limité à Paris (4 % de l'offre nationale), se développe surtout en petite couronne, où les rendements sont plus attractifs. Pour eux, il s'agit d'une évolution naturelle du logement urbain, répondant à de nouveaux modes de vie.
Entre encadrement et adaptation
Le débat met en lumière un vide juridique : ces résidences hybrides oscillent entre logement et activité commerciale, échappant ainsi à certaines règles, notamment à l'encadrement des loyers. Pour la Ville, il est urgent de clarifier ce statut afin d'éviter les abus. Une cellule de contrôle sera créée pour évaluer les colivings existants et proposer des mesures adaptées.
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