L'exploitant du BHV lâché par la Banque des territoires après le scandale Shein information fournie par AFP 08/10/2025 à 15:44
Dans la tourmente depuis son alliance avec Shein et désormais lâchée par la Banque des territoires, l'exploitant du BHV dénonce des "pressions politiques" et assure pouvoir mener à bien le rachat des murs du grand magasin parisien.
Depuis le 4 juin, la Société des grands magasins (SGM) et la Banque des territoires, entité de la Caisse des dépôts (CDC), étaient en négociations pour "la création d'une foncière commune pour le rachat des murs" de l'emblématique Bazar de l'Hôtel de Ville, qui sont détenus par les Galeries Lafayette et évalués à 300 millions d'euros selon le magazine Challenges.
En 2023, la Société des grands magasins (SGM), avait déjà racheté le fonds de commerce du BHV aux Galeries Lafayette.
Mais l'annonce le 1er octobre par la plateforme asiatique Shein et la SGM d'une alliance pour l'ouverture progressive de six magasins physiques, dont l'un au sein du BHV Marais, en plein cœur du Paris touristique, a remis en cause les négociations immobilières.
"La Banque des territoires a pris connaissance de ce partenariat par voie de presse, sans aucune information préalable, entraînant en conséquence une rupture de confiance entre les deux parties", a regretté l'entité publique dans un communiqué transmis mercredi à l'AFP et annonçant "la fin des négociations avec la SGM".
Shein est une "entreprise dont le modèle ne correspond pas aux valeurs et à la doctrine d'action de la Banque des territoires", insiste cette dernière.
En novembre, la marque de mode ultra-éphémère Shein doit s'installer de manière pérenne au sixième étage de l'établissement ouvert en 1856 au cœur de Paris et dans cinq magasins des Galeries Lafayette en province.
Jusqu'à présent, elle ne vendait ses produits qu'en ligne ou via des boutiques éphémères.
Shein n'a pas souhaité réagir au communiqué de la Banque des territoires.
- "Le rachat se fera" -
Cette annonce par un acteur accusé par ses détracteurs de tuer le prêt-à-porter français a aussitôt suscité une levée de boucliers parmi les commerçants et certains responsables politiques.
"La CDC est un partenaire qui a subi de fortes pressions à la suite de l'annonce du partenariat" et "a cédé aux pressions politiques. Ils en tireront les conséquences", a affirmé la SGM dans une déclaration transmise à l'AFP.
La SGM assure également ne pas être inquiète pour le projet immobilier.
"Le projet de rachat des murs se fera, SGM ayant d'autres partenaires qui ont confirmé leur engagement et qui soutiennent la démarche de dynamisation et de modernisation de l'offre au BHV", indique la foncière, sans souhaiter communiquer à ce stade de nom.
Au-delà de ce scandale, le BHV fait face à d'importantes difficultés et se voit abandonné par de nombreuses marques à cause d'impayés. Le Slip français est par exemple absent du BHV depuis quinze jours, après dix ans de collaboration.
Farrow & Ball (peinture et papier peint), Swarovski (bijoux) ou encore American Vintage (vêtements) ont également quitté le navire, selon les syndicats.
A propos de ce litige, la SGM a précédemment assuré à l'AFP que les retards de paiement, de plusieurs millions d'euros, étaient transitoires et imputables à la mise en place d'un nouveau système de comptabilité automatisé.
L'annonce du partenariat avec Shein a accru les départs. Plusieurs marques françaises (AIME, Culture Vintage, Talm...) ont décidé de quitter le grand magasin.
"A une semaine du démarrage de notre pop‑up au BHV Marais, nous avons pris la décision de tout annuler", a expliqué mardi sur LinkedIn Chloë Laigre, fondatrice d'Infuse Me, marque de création de cocktails.
"Cette collaboration aurait été une vraie fierté pour Infuse Me. Mais nos valeurs ne sont pas en accord avec l'arrivée" de Shein, a-t-elle affirmé dans son message.
Fondée en 2012 en Chine et basée à Singapour, Shein se démarque par ses prix extrêmement bas, la profusion des références et son marketing agressif. En 2022, l'entreprise a réalisé 23 milliards de dollars (20 milliards d'euros) de chiffre d'affaires.
L'enseigne est régulièrement accusée de pollution environnementale et de conditions de travail indignes.
Ses principaux marchés se trouvent en Europe et aux États-Unis. Elle ne vend pas en Chine où ses 10.000 fournisseurs fabriquent ses produits.