
Les culottes menstruelles chamboulent le marché de l'hygiène féminine. Capture d'écran Instagram @rejeanneunderwear
Apparues il y a moins de cinq ans en France, elles aiguisent l'appétit des acteurs historiques.
Les culottes menstruelles, qui permettent aux femmes de se passer de protections périodiques jetables, s'installent de façon plus visible dans les armoires et dans les rayons. Selon les dernières données Nielsen, les ventes ont été multipliées par quatre entre décembre 2020 et décembre 2021 alors que celles de tampons ont reculé de 9,5% sur la même période. « Cela fait déjà plusieurs années que les ventes de tampon sont en recul après de nombreuses polémiques sur leur impact sur la santé (notamment en raison de la présence, dans certains produits, de composés chimiques aux effets cancérogènes ou de perturbateurs endocriniens, NDLR) », explique Madrigale Darpas, analyste chez Nielsen.
Des ventes majoritairement réalisées en ligne
Sur un marché hexagonal annuel de 385,7 millions d'euros de chiffre d'affaires en magasins, les culottes menstruelles ne représentent encore que 2,7% des ventes en valeur mais leur croissance fulgurante est le signe d'un marché qui change… y compris en termes de distribution puisque le panel Nielsen ne tient pas compte de commandes passées en ligne. Or, c'est précisément sur leur site Internet ou via les grandes plateformes de e-commerce que les marques spécialisées Réjeanne et Les Petites Culottées réalisent le plus clair de leurs ventes. « 80% de nos ventes sont réalisées en ligne », avancent respectivement Wye Morter et Schonnead Dégremont, fondatrices de ces deux marques concurrentes, toutes deux créées en 2018, qui présentent la particularité de faire confectionner leurs lingeries en France. « Nous avons vendu plus de 300.000 culottes depuis notre création. Et notre chiffre d'affaires a doublé en deux ans », soutient Wye Morter dont les culottes menstruelles se vendent à partir de 34 euros l'unité.
Quand les couches-culottes des bébés parisiens finissent en compost
Signe que ce marché naissant fait bouger les lignes, il intéresse les grands du textile contraints de suivre la tendance initiée par des PME innovantes. Ainsi, DIM, Athena et Etam proposent depuis peu une gamme dédiée. «
Après notre lancement, j'ai reçu très rapidement des propositions de partenariats et de rachat émanant de grandes marques
», assure ainsi Schonnead Dégremont qui a poliment décliné ces offres. «
La concurrence est stimulante. En plus, une petite entreprise comme la nôtre ne peut pas, à elle seule, transformer les mentalités
», philosophe-t-elle.
Si les industriels de la mode ont su se saisir d'un nouveau créneau, les professionnels de l'hygiène féminine, qui voient les ventes de tampons et de serviettes jetables s'éroder, ne sont pas en reste. Essity, qui commercialise notamment la marque Nana, vend désormais aussi ce nouveau type de lingerie menstruelle à la dimension textile.
L'impact du télétravail et du confinement
Selon les marques historiques du secteur, le télétravail et le confinement auraient eu un impact négatif sur leurs affaires car beaucoup de femmes auraient tendance à conserver plus longtemps une protection quand elles restent à domicile. Une raison suffisante pour expliquer la méforme du marché de l'hygiène féminine jetable ? « D'une certaine manière, les confinements et le télétravail ont permis de faire décoller le marché des culottes menstruelles car les femmes ont pu essayer nos produits avec davantage d'assurance que si elles avaient dû se rendre au bureau avec pour les tester », estime-t-on chez Réjeanne qui se positionne, sur le plan marketing, comme une marque de lingerie et non comme un produit d'hygiène.
« L'esthétisme est le premier facteur d'achat devant nos valeurs made in France et coton bio, puis l'environnement », répond-on en échos chez Les Petites Culottées qui, à l'instar de son concurrent, vend désormais également des maillots de bains compatibles avec les périodes de règles.