Trump pourrait jouer sur le dollar ou les paiements après les droits de douane information fournie par Reuters 04/04/2025 à 12:10
Donald Trump pourrait miser sur des leviers dans le secteur financier pour contraindre ses partenaires commerciaux à se plier à ses exigences, après avoir dégainé les droits de douane mercredi, et ce malgré un coût potentiellement important pour les Etats-Unis, affirment plusieurs observateurs.
Une telle possibilité pourrait être envisagée si les droits de douane ne parvenaient pas à réduire le déficit commercial des Etats-Unis avec le reste du monde, comme attendu par de nombreux économistes.
"Je pourrais très bien imaginer que Donald Trump devienne frustré et qu'il essaie de mettre en œuvre des idées farfelues, même si la logique qui les sous-tend n'existe pas", souligne Barry Eichengreen, professeur d'économie et de sciences politiques à l'université de Californie, à Berkeley.
L'ACCORD DE MAR-A-LAGO
L'administration Trump mise notamment sur une dévalorisation du dollar pour rééquilibrer le commerce et pourrait pour cela pousser à un effort coordonné des banques centrales étrangères afin de réévaluer leurs propres monnaies.
Selon un document rédigé en novembre par le conseiller économique de Donald Trump Stephen Miran, cela pourrait se faire dans le cadre d'un accord à Mar-a-Lago, lieu de villégiature du président américain en Floride, en référence à l'accord du Plaza de 1985 qui plafonnait le dollar.
"Je pense que c'est un scénario vraiment improbable", relativise Maurice Obstfeld, chercheur à l'Institut Peterson d'économie internationale, en rappelant qu'il est peu probable que les banquiers centraux de la zone euro, du Japon et de la Grande-Bretagne acceptent un accord qui les obligerait à augmenter les taux d'intérêt et risquerait de provoquer une récession.
Freya Beamish, économiste en chef chez TS Lombard, fait valoir que la revalorisation du yuan irait également à l'encontre de la nécessaire relance économique en Chine.
DOLLAR ET PAIEMENT
Si aucun accord ne peut être trouvé, l'administration Trump pourrait être tentée d'utiliser des voies plus agressives, certains observateurs citant la fin de la possibilité pour les banques centrales étrangères d'emprunter des dollars auprès de la Réserve fédérale américaine (Fed) afin de garantir leurs propres monnaies.
"Il n'est plus inconcevable que dans une négociation plus importante, cela puisse servir de menace nucléaire", a déclaré Spyros Andreopoulos, fondateur de la société de conseil Thin Ice Macroeconomics.
Les États-Unis pourraient également jouer sur leurs géants du paiement, notamment les spécialistes des cartes de crédit Visa V.N et Mastercard MA.N .
Les deux sociétés américaines traitent les deux tiers des paiements par carte effectués dans la zone euro tandis que les paiements par téléphone mobile, dominés par des entreprises américaines telles qu'Apple et Google, représentent près d'un dixième des paiements.
Si Visa et Mastercard devaient être contraints de mettre fin à leurs services, comme ils l'ont fait en Russie peu après l'invasion de l'Ukraine, les Européens seraient contraints d'utiliser de l'argent liquide ou des virements bancaires.
La Banque centrale européenne a déclaré que cette situation exposait l'Europe au risque de "pression et de coercition économiques".
Le Japon et la Chine ont quant à eux développé, à des degrés divers, leurs propres moyens de paiement électronique.
(Rédigé par Franceso Canepa et John O'Donnell, avec Leika Kihara à Tokyo et Sinead Cruise ; version française Bertrand De Meyer, édité par Sophie Louet)