Marchés actions : une consolidation est inéluctable selon CPR AM information fournie par Boursorama 20/03/2019 à 15:35
Le premier trimestre n'est pas terminé et pourtant la performance du CAC 40 atteint déjà près de 15% en 2019. Ce début d'année en fanfare pour la Bourse peut-il perdurer ? Pour CPR AM, rien n'est moins sûr, d'autant plus que les risques qui ont fait plonger les indices boursiers l'an dernier n'ont pas disparu.
Après avoir touché un point bas à 4.606 points en tout début d'année, l'indice phare de la Bourse de Paris a repris plus de 800 points en ligne droite. Pour CPR AM, qui présentait ses perspectives à l'occasion d'un petit déjeuner investisseurs, ce ne sont pas les fondamentaux économiques qui ont alimenté le rebond des indices boursiers. D'abord parce que «le nombre d'économies en contraction ou en ralentissement a nettement augmenté récemment», tout comme «le commerce mondial qui a nettement ralenti et s'est même contracté en 2018, en raison du ralentissement de la Chine et des tensions commerciales», explique Laetitia Baldeschi, responsable des études et de la stratégie de la société de gestion.
Effet rattrapage après le pessimisme exacerbé en fin d'année
Aux Etats-Unis, «la crainte d'une erreur de politique monétaire, le shutdown et le spectre d'une guerre commerciale ont conduit à un pessimisme excessif de la part des investisseurs, mais globalement les enquêtes d'activité tout comme les indicateurs avancés restent bien orientés et n'indiquent pas de récession imminente», explique le stratégiste Bastien Drut. Pour CPR AM, le rebond des marchés actions mondiaux est donc davantage lié à un effet rattrapage qu'à une amélioration des fondamentaux qui se traduirait dans les perspectives bénéficiaires des entreprises.
A quoi carburent les marchés ?
Selon CPR, «les espoirs d'un accord commercial entre la Chine et les Etats-Unis explique en partie le rally auquel nous assistons, mais ce sont surtout les banques centrales qui ont porté le rebond des actifs risqués depuis le début de l'année», poursuit Bastien Drut. «Face à la dégradation des perspectives économiques, la Fed a mis en pause son cycle de hausse de taux et s'apprête par ailleurs à arrêter sa politique de réduction de bilan», explique le stratégiste, ce qui a alimenté le rebond des marchés américains.
La volte-face de la Fed a conduit les investisseurs à modifier de manière substantielle leurs anticipations de resserrement monétaire pour cette année. Et de fait, de trois hausses de taux anticipées en fin d'année, le marché n'en «price» plus aucune pour l'année en cours.
Autre facteur de soutien aux marchés américains, les rachats d'actions qui dépassent d'ores et déjà les 300 milliards de dollars sur le seul premier trimestre de 2019, à comparer à une année déjà record où les entreprises avaient racheté pour 900 milliards de leurs propres actions. Concrètement, cela se traduit par un gain de 11,6% pour le Dow Jones depuis le 1er janvier, performance qui atteint 16,9% pour le Nasdaq Composite et 13,4% pour le S&P 500.
La BCE soutient le mouvement
Selon CPR AM, «le changement de cap de la Fed a entrainé une forte détente des conditions financières au niveau mondial, qui s'est manifesté par une baisse des taux longs, le resserrement des spreads et la hausse du cours des actions».
A l'instar de la Fed, la Banque centrale européenne (BCE) a pris acte du ralentissement économique du Vieux Continent et repoussé en conséquence sa première hausse de taux à 2020 au plus tôt.
Il faut dire qu'entre la récession en Italie, la 8e économie mondiale, et la croissance flageolante de l'Allemagne, locomotive de la zone euro, les perspectives économiques de la zone euro ne sont guère réjouissantes. Avec 1,1% de croissance anticipée cette année par la BCE, l'économie européenne devrait en effet signer sa plus faible croissance depuis cinq ans minée par une succession de risques conjoncturels (guerre commerciale, faiblesse du secteur auto) et politiques (Brexit, Italie, gilets jaunes).
Le rebond des marchés peut-il se poursuivre ?
Pour CPR AM, «le potentiel de hausse des actifs risqués est limité pour le moment». La société de gestion anticipe même une consolidation de ces actifs risqués dans les prochains mois et ce pour plusieurs raisons :
D'abord le fait que la dynamique bénéficiaire des marchés actions est négative, et ce, quelle que soit la région. «Les révisions de bénéfices ont fortement accéléré à la baisse depuis maintenant trois mois», constate Malik Haddouk, directeur de la gestion diversifiée. Alors que le marché anticipait encore en septembre une croissance des bénéfices de l‘ordre de 10% pour le S&P 500, le consensus ne table plus que sur 4% de hausse cette année, et 6% pour le MSCI Europe.
Or pour que le rebond des marchés se poursuive, il faudrait une hausse des prévisions de bénéfices, ce qui est peu probable compte tenu du contexte macroéconomique. De plus, «le rebond des marchés actions sans révision à la hausse des perspectives des bénéfices a ramené les marchés actions sur les niveaux de valorisation d'octobre 2018. Ils sont donc revenus autour de leur moyenne historiques (PER de 16,5 pour le S&P500 et de 13,4 pour le MSCI Europe).
Autre motif de prudence : les risques qui existaient en fin 2018 et qui ont entrainé la correction boursière n'ont pas disparu, au contraire. En Europe, «le risque politique prédomine avec d'une part la question budgétaire en Italie, ravivée par la récession technique et d'autre part les conséquences du Brexit sur l'économie britannique», rappelle Laetitia Baldeschi.
Par ailleurs, le risque d'un essoufflement de la croissance américaine ne peut être occulté, en témoigne la nette progression des probabilités de récession à un an des économies développées, selon les dernières enquêtes.
Parmi les autres facteurs qui pourraient faire déparer les marchés, CPR cite un échec du dialogue entre le Chine et les Etats-Unis, ou encore le risque d'un no-deal concernant le Brexit. D'autre part, «le risque de voir l'Union européenne être soumise à de nouvelles taxes par les Etats-Unis fait peser une épée de Damoclès sur l'industrie européenne». Dernier risque pointé par CPR AM et qui est peu anticipé jusqu'à présent : «Une poursuite contre toute attente de la hausse des taux par la Fed fin 2019 en raison d'une inflation qui remonte au-dessus de 2% et d'une croissance qui reste au-dessus de son potentiel.»
Dans ce contexte incertain, » la volatilité devrait faire son retour à la lumière des corrections boursières que nous anticipons au cours des prochains mois, prédit Malik Haddouk, directeur de la gestion diversifiée. Le rebond des marchés actions s'est accompagné par une baisse de la volatilité de l'ensemble des actifs financiers mais les risques persistent et devraient engendrer de nouveaux épisodes de stress. C'est la raison pour laquelle nous maintenons des positions de couverture sur la poche actions en étant acheteur de volatilité. » Un pari qui pourrait s'avérer payant en cas de nouveau coup de semonce sur les indices boursiers.
FL(redaction@boursorama.fr)