Litige diplomatico-commercial: Séoul et Tokyo font monter les enchères

information fournie par Reuters 09/07/2019 à 21:36
    TOKYO/SEOUL, 9 juillet (Reuters) - Le Japon et la Corée du
Sud ont fait monter les enchères mardi dans leur contentieux
actuel diplomatique et commercial, qui menace de perturber
l'approvisionnement mondial en téléphones portables et en
semi-conducteurs, Séoul dénonçant les informations japonaises
voulant qu'il ait livré un produit chimique "sensible" à la
Corée du Nord.
    A l'origine de ces tensions diplomatiques entre Séoul et
Tokyo se trouvent les indemnisations réclamées par la Corée du
Sud pour ses ressortissants qui avaient été contraints à
travailler pour des entreprises nippones durant la Seconde
Guerre mondiale.
    La situation s'est détériorée la semaine dernière quand
Tokyo a déclaré qu'il allait renforcer les restrictions sur les
exportations de trois composants essentiels à l'électronique
grand public, parce que, à ses yeux, la confiance avec la Corée
du Sud avait été rompue du fait des dissensions sur la question
du travail forcé durant la guerre.
    Les restrictions sur les exportations de matériaux vers la
Corée du Sud pourraient nuire aux géants technologiques comme
Samsung Electronics  005930.KS  et SK Hynix  000660.KS , qui
fournissent des semi-conducteurs à de grands groupes
technologiques comme Apple  AAPL.O  et Huawei  HWT.UL .
    Ces mesures soulignent la mainmise du Japon sur un maillon
crucial de la chaîne mondiale d'approvisionnement, argument de
pression qu'utilise le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, à
une dizaine de jours des élections du 21 juillet à la chambre
des Conseillers (chambre haute du parlement japonais).
    Le ministre sud-coréen de l'Industrie, Sung Yun-mo, a
instamment demandé mardi au Japon d'"en finir tout de suite avec
ses affirmations sans fondement" - réaction, semble-t-il, à des
informations parues la semaine dernière dans la presse
japonaise.
    Celle-ci a cité un haut responsable du PLD (Parti
libéral-démocrate) de Shinzo Abe d'après lequel du fluorure
d'hydrogène exporté du Japon vers la Corée du Sud avait au bout
du compte été expédié en Corée du Nord.
    
    VERS DES CONTRE-MESURES SUD-CORÉENNES ?
    Le fluorure d'hydrogène, produit chimique figurant sur une
liste de produits dont l'exportation hors du Japon est soumise à
des restrictions, peut servir à fabriquer des armes chimiques. 
    Le contentieux bilatéral actuel découle du mécontentement de
Tokyo face à l'absence de mesures prises par Séoul contre une
décision de la justice sud-coréenne ordonnant au groupe japonais
Nippon Steel  5401.T  d'indemniser des travailleurs forcés du
temps de la guerre.
    Le Japon estime que la question du travail forcé a été
complètement réglée en 1965 lors du rétablissement de relations
diplomatiques entre Séoul et Tokyo.
    "Malheureusement, des élections approchent", a déploré un
observateur au fait de la politique gouvernementale japonaise.
"Le PLD fera n'importe quoi pour renforcer sa base électorale".
    Mardi, d'ailleurs, le Japon a évoqué la possibilité de
prendre de nouvelles mesures de rétorsion contre Séoul.
    "Le fait que le Japon mettra ou non en oeuvre des mesures
supplémentaires dépendra de l'attitude de la Corée du Sud", a
déclaré le ministre nippon de l'Industrie, Hiroshige Seko, lors
d'une conférence de presse.
    Le Japon "n'envisage pas du tout" de mettre fin à ses
restrictions à l'exportation, qui ne violent en rien les règles
de l'OMC (Organisation mondiale du commerce)", a-t-il estimé.
    La Corée du Sud a soulevé la question de ces restrictions
mardi lors d'une réunion des pays membres de l'OMC et compte
aussi le faire auprès de responsables américains à Washington,
ont indiqué des officiels sud-coréens.
    Le président sud-coréen, Moon Jae-in, a déclaré que son pays
n'excluait pas de prendre des contre-mesures, en raison des
torts causés à ses entreprises. Il doit rencontrer mercredi des
cadres des grands conglomérats du pays.

 (Takaya Yamaguchi et Hyunjoo Jin; Eric Faye pour le service
français)