Le Royaume-Uni esquisse ses futurs standards de durabilité pour les fonds information fournie par Agefi Asset Management 04/11/2022 à 10:15
(NEWSManagers.com) - Des fonds durables oui, mais du durable made in Britain. Le régulateur britannique des marchés financiers Financial Conduct Authority (FCA) a lancé, en milieu de semaine dernière, une consultation publique sur ses futures règles et labels de durabilité pour les fonds d’investissement locaux (Sustainable Disclosure Requirements
ou SDR). Celle-ci va se poursuivre jusqu’au 25 janvier 2023 et des
règles affinées à partir des réponses reçues seront proposées d’ici la
fin du premier semestre 2023. L’objectif premier de cette future
réglementation est de protéger l’investisseur particulier contre les risques d’écoblanchiment (greenwashing)
dans les fonds dits durables au Royaume-Uni. Elle ne sera pas effective
avant le 30 juin 2024 et son déploiement sera échelonné jusqu’en 2026.
Les fonds étrangers ne sont pas inclus dans le scope de la consultation
mais la FCA mènera des consultations annexes pour déterminer comment
leur appliquer la future réglementation.
La FCA est consciente qu’elle va introduire une
dose de complexité supplémentaire dans l’écosystème réglementaire
existant en la matière, déjà ambigu pour les gestionnaires d’actifs
comme pour les régulateurs. Elle dit veiller à maintenir une cohérence entre ses futures règles et celles déjà en vigueur en Europe – Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR) dont le niveau 2 entrera en vigueur le 1er janvier 2023 – et celles à venir du régulateur américain Securities and Exchange Commission.
Cependant, le contenu de la consultation montre clairement que les
critères de durabilité des fonds britanniques se rapprocheront davantage
des critères américains qu’européens.
Et pour cause, à la différence de SFDR, le régime
envisagé ne demande ni la publication d’informations sur les principales
incidences négatives (principal adverse impact) des fonds, ni leur
alignement sur la future taxonomie verte britannique, ni de proportion
précise d’investissements durables. Comme pour sa version locale de la réglementation européenne Priips dans laquelle les scénarios de performance des fonds ont disparu des
prospectus, le Royaume-Uni se déleste d’éléments européens qu’elle juge
trop restrictifs. La FCA indique qu’elle mettra à jour ses critères de
publication d’information en adéquation avec les développements des
standards de l’International Sustainability Standards Board.
« Si notre régime est compatible avec les
régimes européen et américain, notre point de départ diffère. Notre
logique derrière la catégorisation des produits est d’aider les
consommateurs à identifier les produits d’investissement durables et à
s’y retrouver dans le marché. Ainsi, nos critères sont conçus pour
placer la barre très haut pour les produits qui revendiquent la
durabilité, ce qui est important pour aider à lutter contre
l'écoblanchiment dans un contexte de problème de confiance. Le point de
départ des régimes européen et américain, en revanche, a été de
catégoriser les produits principalement pour déterminer les exigences de
divulgation », souligne la FCA, qui est aussi prête à prendre en
considération les réglementations qui se développeront dans d’autres
marchés si ceux-ci deviennent importants pour le marché britannique.
Sous-entendu les émergents, en particulier la Chine.
Trois catégories
Ce SFDR à l’anglaise se base sur cinq principes :
un objectif de durabilité, la politique et stratégie d’investissement,
les performances de métriques clés (émissions de gaz à effet de serre
entre autres métriques), les ressources mises en œuvre et la gouvernance
ainsi que la politique d’engagement actionnarial de l’investisseur (stewardship).
Trois catégories de labellisation durables sont
possibles pour les fonds. Aux fonds Article 8 et 9 de SFDR pourront
bientôt s’opposer les fonds sustainable focus, sustainable improvers et sustainable impact. La première catégorie – sustainable focus
– englobera les fonds dont au moins 70% des encours sont jugés alignés
sur un standard crédible en matière de durabilité en matière
d’environnement et/ou de social tout comme les fonds mettant en avant un
thème environnemental ou social spécifique (économie circulaire par
exemple).
Les fonds labellisés sustainable improvers
devront investir dans des actifs qui ont le potentiel de devenir plus
durables sur le plan social ou environnemental sur la durée. Quant aux
fonds sustainable impact, ils devront être en mesure
d’atteindre un résultat pré-défini, positif et mesurable dans le monde
réel sur l’aspect environnemental et/ou social.
La catégorisation promet d’être aussi chaotique que celle de SFDR
puisqu’il incombera à chaque gérant de classifier lui-même ses produits
durables et de s’assurer que la classification est appropriée. « L’unité
d’autorisation des fonds examinera et pourra contester la
catégorisation de tout nouveau fonds soumis pour autorisation.
Toutefois, il ne s'agira pas d'une approbation du label », prévient la FCA.
Un coût d’adaptation moyen estimé à 604.000 livres pour les gérants
D’autres règles sur la documentation
précontractuelle et marketing ainsi que sur le reporting annuel des
fonds durables sont dévoilées dans la consultation. Qu’ils aient des
fonds labellisés ou non, les gestionnaires devront publier un rapport
sur la façon dont leurs entités gèrent les risques et opportunités liés à
la durabilité. La FCA envisage la date du 30 juin 2025 pour les
premiers rapports des sociétés gérant 50 milliards de livres d’encours
ou plus et celle du 30 juin 2026 pour ceux des gestionnaires dont les
encours sont inférieurs à 50 milliards mais supérieurs à 5 milliards de
livres. La FCA propose en outre de restreindre l'utilisation de termes
liés à la durabilité dans la dénomination et la commercialisation des
produits proposés aux investisseurs de détail qui n’utiliseraient pas de
label d'investissement durable.
Le régulateur estime le montant de cette future
régulation pour les gérants d’actifs, conseillers et plateformes de
distribution de fonds locaux se divise entre 146,7 millions de livres
(169 millions d’euros) de coûts ponctuels et 26,7 millions de livres (31
millions d’euros) de coûts continus. Pour un gestionnaire d’actifs
britannique, la facture moyenne s’élèverait à 604.000 livres en guise de
coût d’adaptation et à 239.600 livres en termes de frais continus
annuels.