PARIS/LYON, 17 janvier (Reuters) - L'équipe du restaurant
Paul Bocuse, établissement à la renommée mondiale, s'est dite
"bouleversée" vendredi par la perte de sa troisième étoile au
Guide Michelin, détenue depuis 1965, une décision qui fait
l'effet d'une bombe dans le monde de la gastronomie.
Une porte-parole du Guide Michelin, guide gastronomique et
touristique lancé en 1900 qui récompense chaque année d'une à
trois étoiles les meilleures enseignes, a confirmé à Reuters que
l’auberge de Collonges-au-Mont-d’Or, près de Lyon, perdait sa
troisième étoile, distinction suprême, dans l'édition 2020 du
guide rouge à paraître le 27 janvier.
"La table demeure excellente mais elle n'est plus au niveau
de trois étoiles. Deux étoiles restent synonymes d'excellence",
a-t-elle expliqué.
Deux ans après le décès à 91 ans de son fondateur Paul
Bocuse, considéré comme le pape de la haute cuisine française,
les chefs de l'auberge aux coqs, qui rouvre le 24 janvier, ont
"travaillé et retravaillé les plats" tout "en conservant leur
ADN", précisait récemment Vincent Le Roux, directeur général du
restaurant dans Le Progrès.
"Bien que tardivement par rapport au calendrier d’impression
du Guide Michelin 2020, nous avons dévoilé notre nouvelle
expérience intitulée 'La Tradition en Mouvement' dès le mois
d’octobre 2019", plaide-t-il dans un communiqué diffusé
vendredi.
Une expérience, souligne Vincent Le Roux, "jugée
exceptionnelle par bon nombre de nos clients, d’experts
gastronomiques ou journalistes".
"Bien que bouleversés par le jugement des inspecteurs, il y
a une chose que nous souhaitons ne jamais perdre, c’est l’âme de
Monsieur Paul", poursuit le directeur, qui assure de sa
détermination à "faire vivre le Feu Sacré".
La direction du Guide Michelin, qui entend dépoussiérer son
héritage, n'en est pas à sa première polémique.
L'an dernier, c'est un autre chef triplement étoilé, Marc
Veyrat et son restaurant de Manigod (Haute-Savoie), qui avait
été rétrogradé. S'estimant "victime d'une erreur
d'appréciation", le cuisinier, très affecté, avait saisi la
justice, qui l'a débouté en décembre dernier.
Le tribunal de grande instance de Nanterre avait considéré
que Marc Veyrat n'avait produit aucune pièce à même de prouver
l'existence d'un préjudice.
Interrogé sur Europe 1 et BFM TV, notamment, le propriétaire
de "La Maison des Bois" s'est dit effondré par la décision
"dramatique" du Guide Michelin à l'encontre de l'établissement
de Paul Bocuse.
"Ils veulent effacer toute la génération Bocuse", a-t-il
dit, évoquant le chef alsacien Marc Haeberlin, qui a lui aussi
perdu en 2019 sa troisième étoile, qu'il détenait depuis 1967 à
l'Auberge de l'Ill. Un record avec le restaurant de son ami Paul
Bocuse.
(Sophie Louet avec Matthieu Protard, édité par Jean-Michel
Bélot)