* Le groupe a décidé de fermer le site incriminé
* Les salmonelles libérées par des travaux en 2017
* La bactérie était présente depuis 2005 à Craon
* 141 bébés malades en 2005, 38 en 2017
* 25 autres bébés ont été contaminés entre 2006 et
2017-Pasteur
(Actualisé avec Institut Pasteur)
PARIS, 1er février (Reuters) - La souche bactérienne à
l'origine de cas de salmonellose en 2005 et 2017 chez des
nourrissons ayant consommé du lait infantile produit sur le site
Lactalis de Craon (Mayenne) a contaminé 25 autres bébés entre
2006 et 2017, a-t-on appris jeudi auprès de l'Institut Pasteur.
Le PDG du groupe Lactalis, confronté à une crise sanitaire
sans précédent après la contamination à Salmonella Agona de
produits infantiles issus de Craon, disait ne pas exclure que
"des bébés aient consommé du lait contaminé" depuis 2005, dans
un entretien paru jeudi dans Les Echos.
Deux occurrences étaient pour l'heure identifiées : 141
contaminations en 2005 et 38 contaminations à fin 2017, qui font
l'objet de plaintes en justice.
Sur la période inter-épidémique, entre 2006 et 2017, "il y a
bien eu 25 cas confirmés", a dit à Reuters Simon Le Hello,
codirecteur du Centre national de référence des Salmonella de
l'Institut Pasteur, confirmant une information de franceinfo.
"Il s'agit de cas très sporadiques sur une longue période",
a-t-il précisé.
Au total, 204 bébés ont donc été contaminés depuis 2005.
"Cette approche rétrospective est intégrée à l'enquête en
cours et a été rendue possible grâce à la généralisation de
nouvelles technologies mises en place depuis 2017 qui nous
permettent d'identifier très précisément cette souche
épidémique. Tout nouveau cas sera facilement détectable", a dit
Simon Le Hello.
Emmanuel Besnier a annoncé mercredi aux salariés la
fermeture de la tour de séchage numéro un de Craon, à l'origine
de la contamination, et un programme de mobilité pour les 327
salariés concernés dans les sept sites Lactalis qui se situent
dans un rayon de 50 kilomètres autour de Craon.
La bactérie Salmonella Agona était présente dans la Tour
numéro 1 depuis 2005, date des premiers cas de salmonellose,
affirment Emmanuel Besnier ainsi que le groupe dans un
communiqué.
LES FAMILLES DE VICTIMES "SIDÉRÉES"
A l'époque, le site appartenait à Celia, société rachetée en
2006 par Lactalis. Selon le groupe, la bactérie, confinée, ne
s'est alors pas développée "du fait des barrières sanitaires et
procédures mises en place".
Elle a été libérée par des travaux successifs, à partir de
début 2017, "lors du démontage de cloisons et de la réfection
des sols" de la tour, précise Lactalis.
"Elle a contaminé des équipements amovibles qui servent à
produire des petites séries de lait infantile. Cela s'est fait
par du matériel de nettoyage", précise le PDG du groupe aux
Echos.
Il s'interroge dans le quotidien sur les 16.000 analyses
réalisées par un laboratoire privé qui n'ont rien révélé
d'anormal. "Nous avons des doutes sur la sensibilité des tests".
"Nous aurions évité la crise", souligne le groupe dans son
communiqué, dans une mise en cause implicite du laboratoire.
Désormais, "les tests seront sécurisés par un deuxième
laboratoire".
Deux alertes aux salmonelles dans l'environnement sont
survenues en août puis novembre 2017. "Quand cela arrive, on
nettoie jusqu'à ce que tout soit conforme".
La production sera désormais concentrée dans la Tour numéro
deux, "toute récente", et devrait reprendre au premier semestre
2018.
Emmanuel Besnier, qui chiffre à plusieurs centaines de
millions d'euros le préjudice pour le groupe, estime qu'"une
partie importante" des 12 millions de produits concernés par les
rappels depuis le début de la crise, le 1er décembre dernier, a
été consommée.
L'Association des familles victimes du lait contaminé aux
salmonelles (AFVLCS) dit jeudi sa "sidération" et son "effroi"
face aux révélations de Lactalis.
"L'usine est contaminée aux salmonelles depuis au moins 2005
par la même bactérie. Les produits fabriqués par cette usine
depuis cette date pourraient avoir contaminé de très nombreux
enfants", dit-elle dans un communiqué.
"Il s'agit ici de plusieurs centaines de millions de boîtes
concernées et de plusieurs centaines de milliers de tonnes de
produits envoyés dans plus de 80 pays. C'est un scandale
sanitaire d'une ampleur inédite", ajoute-t-elle.
(Sophie Louet, édité par Yves Clarisse)