Bruno Le Maire, de grand argentier aux Armées information fournie par AFP 05/10/2025 à 21:36
Après sept années passées à Bercy, Bruno Le Maire fait son retour dimanche au gouvernement, aux Armées, portefeuille régalien où il devra piloter le réarmement français face au regain de tensions géopolitiques.
À 56 ans, ce normalien et énarque hérite d'un portefeuille stratégique dans un contexte marqué par la montée des tensions géopolitiques depuis l'invasion russe de l'Ukraine.
Sous réserve de l'adoption du projet de budget 2026, Bruno Le Maire devra s'atteler à l'actualisation de la Loi de programmation militaire (LPM) pour accélérer le réarmement du pays face à la détérioration de la sécurité en Europe sous la menace russe.
Le président Emmanuel Macron avait annoncé en juillet vouloir renforcer l'effort budgétaire pour la défense déjà engagé, en ajoutant des dépenses de 3,5 milliards d'euros en 2026 puis à nouveau 3 milliards de plus en 2027.
Avec son homologue allemand Boris Pistorius, ce germanophone est également chargé d'ici la fin de l'année de trouver un chemin pour tenter d'engager la prochaine étape du projet Scaf de futur avion de combat européen, actuellement bloqué par les intérêts divergents des industriels des deux pays.
- Record de longévité à Bercy -
Son arrivée aux Armées est une surprise: l'ex-ministre qui enseignait depuis un an dans une université suisse, était devenu depuis quelques mois conseiller stratégique du géant technologique néerlandais ASML, et se disait en retrait de la vie politique.
Mais Bruno Le Maire reste dans la continuité de son parcours de poids lourd du gouvernement.
Pendant sept ans - un record de longévité à la tête de ce ministère - il avait piloté le "paquebot" Bercy et l'économie française, déployant la politique de l'offre d'Emmanuel Macron et son cortège de baisses d'impôts.
Défendant les réformes contestées des retraites et de l'assurance-chômage, il fait du plein-emploi et de la réindustrialisation de la France des priorités, conditions nécessaires selon lui d'une croissance durable et d'un pays attractif.
Partisan d'un Etat moins dispendieux, il ouvre toutefois grand les cordons de la bourse face au Covid, à l'inflation et à la flambée de l'énergie, avant d'amorcer un virage vers l'orthodoxie budgétaire, essayant tant bien que mal de sortir progressivement du "quoi qu'il en coûte".
- Déficit excessif -
Après la reprise post-Covid de l'économie, il cherche à convaincre du nécessaire redressement des comptes publics si fragilisés que la France a été épinglée par la Commission européenne pour déficit excessif et a vu sa note abaissée par l'agence S&P.
La croissance ralentit, le déficit public dérape (5,5% en 2023) et la dette explose. Des dizaines de milliards d'euros d'économies sont jugés nécessaires.
Il y a eu "des erreurs bien entendu, des choses qui n'ont pas été parfaites, mais j'ai toujours fait le mieux possible", avait reconnu Bruno Le Maire, tirant le bilan de son septennat, auquel mettra fin la défaite du camp présidentiel aux législatives anticipées à l'été 2024.
- Soutien de la première heure -
Bercy lui avait permis de renaître politiquement après son échec cuisant à la primaire de la droite fin 2016. Un choc dans le parcours jusque-là sans accroc de ce brillant élève des beaux quartiers, normalien et énarque, qui a "grandi dans les couloirs des cabinets" ministériels, comme il le dit lui-même.
C'est en 2007, sur les conseils d'un de ses mentors, Dominique de Villepin, dont il a été directeur de cabinet à Matignon, que ce catholique pratiquant s'était fait élire député pour la première fois, en Normandie.
Le style du nouveau locataire de l'Hôtel de Brienne, amateur d'envolées lyriques et de citations littéraires, tranche avec la réserve de son prédécesseur, Sébastien Lecornu. Les deux hommes se connaissent bien: ce dernier a notamment été son conseiller en 2008 au ministère des Affaires européennes, puis lors de la primaire perdue de 2016.
Bruno Le Maire, mélomane germanophile, qui se dit autant écrivain que politique, est père de quatre garçons et marié à une artiste peintre.
Dans son entourage, on loue "un homme de conviction et d'intuition", "grand bosseur". Agrégé de lettres modernes, Bruno Le Maire, qui se considère autant écrivain qu'homme politique, a publié au moins six livres depuis 2017.