Viols de Mazan: verdict attendu pour le dernier accusé qui risque une peine alourdie
information fournie par AFP 09/10/2025 à 14:56

Le procureur Dominique Sie lors du procès en appel des viols de Mazan au palais de justice de Nîmes, le 9 octobre 2025 dans le Gard ( AFP / Gabriel BOUYS )

Husamettin Dogan était le seul de la cinquantaine d'hommes condamnés pour avoir violé Gisèle Pelicot à avoir demandé à être rejugé. A-t-il eu raison de le faire ? La cour est partie délibérer après un réquisitoire puissant qui a réclamé une peine alourdie.

La cour d'assises du Gard, composée d'un jury populaire de cinq hommes et quatre femmes et de trois magistrats, s'est retirée en début d'après-midi pour un verdict attendu dans l'après-midi sur cette affaire qui a suscité un intérêt mondial.

"J'ai jamais voulu faire du mal à cette dame", a déclaré l'accusé dans ses derniers mots, après quatre jours d'audience à Nîmes où il s'est enfoncé dans le déni.

Une attitude qui a "désespéré", l'avocat général Dominique Sié qui lui a lancé: "Tant que vous refuserez de l'admettre, ce n'est pas seulement une femme, c'est tout un fonctionnement social sordide que vous cautionnez" et "il reste à faire évoluer pour vous, et pour la société, la culture du viol en culture du consentement".

L'accusant d'avoir participé comme les autres à "une oeuvre de destruction massive d'une femme livrée en pâture", il a requis 12 ans de prison contre cet ex-ouvrier de 44 ans. La même peine que celle qui avait été requise lors du premier procès à Avignon où il avait finalement été condamné à neuf ans de prison.

L'accusé Husamettin Dogan arrive au palais de justice de Nîmes pour le procès en appel des viols de Mazan, le 9 octobre 2025 dans le Gard ( AFP / Gabriel BOUYS )

Pour Dominique Sié, ce dossier "est une prise de conscience collective sur un fonctionnement social archaïque, destructeur, qui fait de l'homme, le mâle, le centre de l'univers. Qui fait que quand l'homme est d'accord, la femme est d'accord, elle n'a pas son mot à dire".

C'est "la société dans son ensemble qui doit changer de prisme", a-t-il estimé. Il n'y a pas de consentement par procuration comme l'a soutenu l'accusé, affirmant avoir été piégé par Dominique Pelicot.

"Bien sûr que Mme Pelicot n'était pas consentante" et "c'est désespérant" d'avoir entendu Husamettin Dogan continuer de nier l'intention de violer malgré la diffusion de vidéos accablantes que la cour a pris "de plein fouet, dans un silence de mort" et qui ont montré "ce qu'il y a de plus sordide, avilissant pour la femme", a poursuivi le représentant de l'accusation.

"On ne peut pas en 2025 considérer que parce qu'elle n'a rien dit, elle était d'accord. Car là, on se situe dans un mode de pensée d’un autre âge!".

- "Les réseaux sociaux qui s'agitent" -

La défense ne s'est pas départie de sa ligne, soutenant la thèse que leur client avait cru à un scenario libertin. "Dans libertin, il y a liberté: tout est envisageable, tout est transgressable", a plaidé Me Jean-Marc Darrigade.

Gisèle Pelicot (c) et son fils Florian Pelicot (g) entrent dans la salle d'audience pour assister au procès en appel des viols de Mazan au palais de justice de Nîmes, le 9 octobre 2025 dans le Gard ( AFP / Christophe Simon )

Sa consoeur Me Sylvie Menvielle a réaffirmé que l'accusé a été piégé par Dominique Pelicot, demandant: "Comment peut-on se libérer de la manipulation, quand le peut-on ?".

Rappelant qu'Husamettin Dogan n'était jamais retourné au domicile des Pelicot contrairement à d'autres hommes, revenus plusieurs fois pour violer Mme Pelicot, ils ont à nouveau plaidé "l'absence d'intention de M. Dogan de commettre un viol".

Ce père d'un enfant handicapé risque jusqu'à 20 ans de réclusion criminelle pour "viols aggravés".

Une peine cependant peu probable car elle le mettrait sur le même pied que Dominique Pelicot.

Lors du premier procès, la cour criminelle était composée uniquement de magistrats professionnels, une différence notable avec ces jurés populaires, qui devront tenir à distance "les réseaux sociaux qui s'agitent" et ne pas faire "un remake du procès de Mazan", leur a rappelé l'avocat général.

En décembre à Avignon, les 49 autres condamnés ont été condamnés à des peines allant de trois ans de prison, dont deux avec sursis, à 15 ans pour un homme venu à six reprises au domicile du couple à Mazan (Vaucluse).

Gisèle Pelicot (c) et son fils Florian Pelicot (d) s'installent dans la salle d'audience pour assister au procès en appel des viols de Mazan au palais de justice de Nîmes, le 9 octobre 2025 dans le Gard ( AFP / Gabriel BOUYS )

Mercredi lors de leur plaidoirie, les avocats de Gisèle Pelicot avaient estimé que "la peine est à revoir", selon Me Antoine Camus.

"Après le parcours du combattant mené par Gisèle Pelicot, on espère que ce jury dira haut et fort qu'en France, les droits de l'homme sont aussi ceux de la femme, que le consentement ne se recueille pas auprès du mari, qu'un acte sexuel imposé à un corps endormi est un viol", avait-il ajouté.