USA-Mobilisation en masse des manifestants "No Kings" contre Donald Trump information fournie par Reuters 18/10/2025 à 23:42
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La politique sur l'immigration, l'éducation et la sécurité contestée
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Plus de trois millions de personnes attendues - experte
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"Je ne suis pas un roi", dit le président américain
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par Brad Brooks
De nombreuses personnes se sont rassemblées à travers les Etats-Unis samedi dans le cadre de plus 2.600 manifestations "No Kings" (Pas de rois) contre Donald Trump, estimant que la politique du président en matière d'immigration, d'éducation et de sécurité pousse le pays vers un régime autocratique et des décisions anti-démocratiques.
Les organisateurs du mouvement estiment que la mobilisation devrait rassembler d'ici la fin de la journée aux Etats-Unis, des millions de personnes, aussi bien dans les grandes villes que les petites. Elle fait suite aux importantes protestations de juin et reflètent la frustration des manifestants aux décisions prises par le locataire de la Maison blanche depuis son accession au pouvoir en janvier. Ils reprochent notamment à l'administration d'avoir engagé des poursuites pénales contre des personnes perçues comme les ennemis politiques du président, d'avoir procédé à des arrestations à grande échelle de migrants et d'avoir déployé des troupes fédérales dans certaines villes.
"Il n'y a rien de plus américain que de dire 'nous n'avons pas de rois' et d'exercer notre droit de protester pacifiquement", a déclaré Leah Greenberg, cofondatrice d'Indivisible, une organisation progressiste, principale organisatrice du mouvement "No Kings".
A Washington D.C., des manifestants ont envahi les rues et marché vers le Capitole, scandant des slogans et brandissant des pancartes, des drapeaux américains et des ballons. De nombreux participants, accompagnés de leurs chiens, étaient déguisés dans une ambiance bon enfant, digne d'un carnaval.
Quatre manifestants, vêtus comme des prisonniers et arborant de grandes caricatures de Donald Trump et d'autres responsables de l'administration américaine, ont brandi une pancarte sur laquelle on pouvait lire "Destituez à nouveau Trump".
"Nous voulons montrer notre soutien à la démocratie et à la lutte pour ce qui est juste. Je suis contre l'abus de pouvoir", a déclaré Aliston Elliot, un manifestant ayant sur la tête un symbole de la Statue de la Liberté et brandissant une pancarte "Non aux dictateurs en herbe".
Des manifestations à New York, Boston, Chicago et Atlanta ont également attiré de nombreuses personnes. Dans le centre-ville de Houston, Daniel Aboyte Gamez, âgé de 30 ans, ancien membre du Corps des Marines des Etats-Unis, l'une des six branches des Forces armées du pays, s'est joint à quelques centaines d'autres participants.
"Je ne comprends pas ce qui se passe dans ce pays en ce moment", a dit celui qui a servi en Irak, en Afghanistan et en Syrie. "En tant qu'ancien combattant des Marines, je comprends que les Etats-Unis ont été fondés sur la lutte contre les tyrans et les rois", a-t-il rappelé.
A Portland, dans l'Oregon, Kevin Brice, un ancien militaire âgé 70 ans, arborait un sweat-shirt noir sur lequel était écrit: "Pas de rois depuis 1776".
"Je suis gêné que des agents fédéraux masqués arrêtent des gens dans la rue. Je suis gêné qu'on parle d'utiliser l'armée contre des civils. Je suis gêné qu'on puisse mentir et inventer des histoires", a-t-il déclaré.
"Alors, même si je suis républicain depuis toujours, je ne soutiens pas l'orientation que prend le parti", a-t-il ajouté.
Depuis l'arrivée de Donald Trump à la Maison blanche, son administration a durci les lois sur l'immigration, supprimé des postes de fonctionnaires et réduit le financement des universités les plus prestigieuses, en réponse aux manifestations pro-palestiniennes contre l'offensive menée par Israël dans la bande de Gaza, aux programmes de diversité sur les campus et aux dispositifs concernant les personnes dites "transgenres".
Le président américain a aussi déployé la Garde nationale dans de grandes villes comme à Chicago, affirmant que cela est nécessaire pour protéger les agents de l'immigration et pour aider à lutter contre la criminalité.
TRUMP DIT QU'IL N'EST PAS UN ROI
Donald Trump s'est montré jusqu'ici particulièrement discret sur ces manifestations. Mais dans une interview accordée à Fox Business et diffusée vendredi, il avait déclaré: "On me qualifie de roi, alors que je ne suis pas un roi".
Plus de 300 groupes ont participé à l'organisation en faveur des manifestations de samedi, a indiqué Leah Greenberg. The American Civil Liberties Union (L'Union américaine pour les libertés civiles) a dit avoir prodigué une formation juridique à des dizaines de milliers de personnes qui joueront le rôle de "marshals" lors des différentes manifestations. Elle a ajouté que ces personnes avaient également été formées à la "désescalade". Des messages sur le mouvement "No Kings" ont été diffusés sur les réseaux sociaux afin de renforcer la participation aux mouvements de protestation.
Le sénateur Bernie Sanders, un indépendant qui vote généralement avec les démocrates, et l'élue Alexandria Ocasio-Cortez, une démocrate, soutiennent le mouvement de protestation, tout comme l'ancienne secrétaire d'Etat Hillary Clinton, battue par Donald Trump lors de l'élection présidentielle de 2016. De nombreuses célébrités ont également apporté leur soutien au mouvement.
Plus de 2.000 manifestations "No Kings" ont été recensées en juin, dans une ambiance généralement sans heurts, notamment le jour où Donald Trump a célébré son 79e anniversaire avec l'organisation d'un défilé militaire à Washington.
DES MANIFESTATIONS JUGÉES ANTI-AMÉRICAINES
Vendredi, en amont des manifestations, le président de la Chambre des représentants aux Etats-Unis, le républicain Mike Johnson, avait critiqué le mouvement "No Kings", estimant lors d'une conférence de presse qu'il s'agit d'un "rassemblement de la haine de l'Amérique".
D'autres républicains ont reproché aux démocrates et aux organisateurs du mouvement "No Kings" d'encourager les citoyens à commettre des actes de violence politique, semblant faire référence à l'assassinat en septembre de l'activiste d'extrême droite Charlie Kirk, très proche de Donald Trump.
Dana Fisher, professeure à l'American University de Washington et auteure de plusieurs ouvrages sur l'activisme américain, estime que la journée de samedi pourrait constituer plus grande mobilisation de l'histoire moderne des Etats-Unis, disant s'attendre à plus de trois millions de participants.
"Cela ne va pas changer la politique menée par (Donald) Trump. Mais cela pourrait enhardir les élus à tous les niveaux qui s'opposent à Trump", a-t-elle dit.
C'est en dehors des Etats-Unis qu'ont eu lieu les premiers rassemblements à l'encontre de Donald Trump avec quelques centaines de manifestants devant l'ambassade des Etats-Unis à Londres et d'autres à Madrid et à Barcelone.
(Reportage Brad Brooks, AJ Vicens et David Shephardson; version française Claude Chendjou)