Un "gouffre financier" pour EDF : alerte sur l'EPR d'Hinkley Point
information fournie par Boursorama avec Media Services 29/04/2025 à 09:31

Le rapporteur général du budget Charles de Courson et la présidente des affaires économiques Aurélie Trouvé tirent le signal d'alarme face au projet d'EPR et de son coût estimé dépassant déjà les 50 milliards d'euros.

La centrale nucléaire d'Hinkley Point est située dans le sud-ouest de l'Angleterre (illustration) ( AFP / DANIEL LEAL )

En parallèle de Flamanville, un autre très cher "EPR" outre-Manche. Le projet de deux réacteurs nucléaires EPR d'Hinkley Point en Angleterre est un "gouffre financier" pour EDF, ont alerté lundi 28 avril la présidente de la Commission des affaires économiques Aurélie Trouvé et le rapporteur général du budget Charles de Courson après une visite de contrôle au Trésor. Les députés LFI et Liot ont dénoncé depuis l'Assemblée nationale une "anomalie démocratique", déplorant que le Parlement ne soit pas consulté sur une relance des programmes nucléaires, au vu des surcoûts constatés à Flamanville et Hinkley Point.

Ils ont également invoqué des conséquences pour les ménages et entreprises françaises, EDF étant désormais détenu à 100% par l'État. Le 16 avril, les deux élus ont passé cinq heures à la direction du Trésor pour une mission de contrôle autour du chantier d'Hinkley Point. "C'est un véritable gouffre financier", a déclaré Mme Trouvé lors d'un point presse à la chambre basse.

"On arrive aujourd'hui, d'après ce qu'on nous a dit, à un coût estimé à l'horizon 2030 à 46 milliards de livres sterling (environ 54 milliards d'euros), dont 85% est aujourd'hui à la charge d'EDF", détaille la députée de Seine-Saint-Denis, rappelant que le coût du devis était de 18 milliards au début du projet en 2016.

"Le gouvernement savait, puisque dès 2015, on a des notes qui ont montré que, déjà, il y a des alertes sur (...) des coûts qui seraient probablement sous-évalués", a-t-elle pointé.En outre, les deux députés affirment que Bercy ne dispose pas du contrat. "Ca nous choque évidemment, puisque l'Etat était déjà actionnaire en 2015 (au moment des négociations avant la signature, ndlr) de 85% d'EDF, et qu'il l'est aujourd'hui à hauteur de 100%", a critiqué Mme Trouvé.

"Anomalie démocratique"

Aurélie Trouvé et Charles de Courson s'exprimaient en marge d'un débat, sans vote, organisé dans l'hémicycle lundi sur la politique énergétique française, avant la publication d'ici à la fin de l'été d'un décret définissant la feuille de route du pays pour les dix prochaines années.

En dépit des annonces du Premier ministre prévoyant l'examen d'une proposition de loi sur le sujet, censée contribuer à la mouture finale du décret, Charles de Courson a dénoncé une "anomalie démocratique", déplorant notamment l'absence de vote sur la feuille de route. "Hélas, ces décisions échappent au Parlement alors qu'elles ont des conséquences directes sur les finances publiques", a-t-il déclaré.

La semaine dernière, en amont d’un sommet sur l’énergie à Londres, le ministère français de l’Energie a fait savoir que le ministre Marc Ferracci appellerait le gouvernement britannique à "prendre ses responsabilités quant au financement" du projet d'Hinkley Point, faute de contribution du partenaire chinois d’EDF, CGN, pour financer les surcoûts.

Dans son rapport de janvier 2025 sur la filière EPR, la Cour des comptes avait recommandé que "tout nouveau projet international dans le domaine du nucléaire soit générateur de gains chiffrés et ne retarde pas le calendrier du programme EPR2 en France". L'enjeu pour EDF, en pleine relance d'un programme nucléaire en France, est de réduire son exposition financière dans ses projets à l'international, et donc d'être minoritaire dans ses participations.